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Tranquille comme Agnel

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Pour son premier rendez-vous international chez les grands, Yannick Agnel aura le redoutable privilège de se frotter à l'Allemand Paul Biedermann, Paul le Poulpe comme il l'a surnommé. Signe que le jeune homme aborde sa compétition avec une étonnante décontraction.

Et en ce moment il dort bien. Très bien même. Il faut dire qu'on a du lui trouver une chambre avec un lit King Size. Yannick Agnel peut ainsi y étaler ses 2m02. En regardant le Niçois déambuler parmi ses camarades de l'équipe de France, on sent qu'il a pris de l'épaisseur. Le poids du baccalauréat (mention bien) évacué avec brio, la page des juniors magnifiquement refermée avec cinq titres européens il y a un mois, le jeune homme de 18 ans peut désormais se projeter sur ses championnats d'Europe. Sa première compétition internationale chez les grands. Le voilà qui débarque à Budapest avec la meilleure performance européenne de l'année sur 400m. Pas de quoi lui imposer une nouvelle pression. «Vous m'avez alourdi de dix kilos, lâche-t-il dans un éclat de rire. Plus sérieusement, j'aborde la compétition sans complexes. Je suis dans la position du petit qui arrive et qui essaye de bousculer les grands. Je suis focalisé sur mes courses et j'en veux. Je ne suis pas là pour faire le touriste ou cirer des pompes.»

A l’aise avec les médias

A son actif, deux ou trois références qui forgent son homme. Comme cette victoire sur Michael Phelps en juin dernier sur 200m à l'open de Paris. Agnel est d'ailleurs le seul à avoir battu des records de France depuis la fin des combinaisons. Le genre de performances qui attirent les médias. Et le nageur manie l'exercice avec une maturité déconcertante. Son entraîneur ne le protègera de toute façon pas sur le sujet. Bien au contraire. «On parle beaucoup de lui malgré un palmarès réduit. Mais il doit s'habituer, explique Fabrice Pellerin. C'est un apprentissage à effectuer. Au même titre que la nage. S'il n'est pas prêt à répondre aux questions, il n'a pas le niveau. Je ne suis pas contre qu'il soit assailli de questions. Et puis il est motivé. Il ne vient pas visiter Budapest mais se frotter aux plus grands.»

Place maintenant aux dernières heures avant l’entrée en lice du phénomène. Des derniers instants pas toujours faciles à occuper. Sieste, musique, étirements et lecture (100 ans de solitude de Gabriel Garcia Marquez), celui qui a quitté le cocon familial à 14 ans s'apprête à vivre une journée marathon puisqu'en plus du 400m, il s'est taillé une place dans le relais 4x100. A écouter Amaury Leveaux, on devine que l'intégration s'est faite sans souci. «Je ne vais pas dire qu'il m'impressionne. Il fait de bonnes choses, avoue son coéquipier de l'équipe de France. On se chambre, on rigole. Je lui donne deux ou trois conseils. Il peut aller très loin, mais il ne doit pas s'enfermer. Je pense qu'il est assez intelligent pour ne pas le faire.» Et à le voir se marrer et tirer la langue à la moindre caméra qu'il croise, on devine aisément que le garçon à la tête bien pleine n'a pas l'intention de se prendre… la tête.

Pierrick Taisne et Julien Richard