Un relais fissuré ?

Frédérick Bousquet, Yannick Agnel, Fabien Gilot, Alain Bernard - -
Et si un petit remous, né dans l’Hexagone cette semaine, finissait par provoquer une immense vague de déception, cinq mois plus tard dans le bassin olympique de Londres ? Avec son franc-parler habituel, Amaury Leveaux a en tout cas jeté un sacré pavé dans la mare. « Pour être franc, avec les relayeurs cela se passait super bien. Mais depuis quelque temps, ils ne prennent plus de nouvelles, a souligné le Belfortin au micro de RMC Sport (…). En France, c’est chacun pour sa peau. Si je peux buter l’autre, je le bute ! » Et s’est payé au passage Yannick Agnel, meilleur performeur français de l’année sur 100m (48’’80) et mondial sur 200m (1'45''52). « Son chrono, je ne vais pas le taper, je vais l’éclater, a lancé Leveaux. Ça va être la guerre ! »
Problème, cette « guerre » entre les sprinteurs s’amorce alors que l’échéance olympique approche à grands pas (27 juillet–12 août). Des JO où les relais du sprint masculin français (4x100m et 4x200m nage libre) vont concourir pour la médaille d’or. Pour Patricia Girard, championne du monde du relais 4x100m aux Mondiaux d’athlétisme de Saint-Denis, en 2003, ces déclarations seront oubliées une fois sur le plot de départ. « Un relais, c’est quatre forces qu’il faut regrouper en une seule, souligne-t-elle. Ce jour-là, quand on a gagné aux championnats du monde en 2003, il fallait regrouper toutes nos forces pour aller au bout. Dans l’athlétisme ou la natation, c’est exactement pareil. Même si on n’est pas super amis, on est là pour les mêmes choses, il faut se serrer les coudes. »
Donzé : « Forcément des gens atypiques »
Christian Donzé, le DTN de la natation française, ne s’inquiète pas non plus de ces petites attaques. « Les athlètes de haut niveau sont forcément des gens atypiques, qui ont de fortes personnalités, souligne-t-il. On ne leur demande pas forcément de partir en vacances ensemble. Ils dessinent certaines affinités. Ce qu’a dit Fabien Gilot (« On le pense également mais on le présente et on le formule différemment », en référence aux propos de Leveaux, ndlr) est plein de maturité. On connaît les athlètes, leur personnalité, leur profil. Il ne faut prendre que ce qui est essentiel dans ce qu’ils disent, c’est-à-dire être les plus performants. Si on veut gagner un relais, il faut quatre individus au top niveau mondial. »
Dès le 18 mars, les « requins » du sprint français s’expliqueront lors des championnats de France de Dunkerque, qualificatifs pour les prochains JO. Un lieu idéal pour régler « à la nage » les différends. Et pour se focaliser sur l’objectif de l’année : monter enfin sur la plus haute marche du podium à Londres, quatre ans après la médaille d’argent décrochée par le 4x100m à Pékin, huit centièmes seulement derrière les Etats-Unis.