Le deal entre joueurs : une stratégie complexe

- - -
Pourquoi dealer ?
Dealer entre derniers rescapés d'un tournoi est une pratique relativement courante. Savoir conclure le meilleur accord possible est aussi important que bien jouer au poker. Voici quelques pistes pour y parvenir.
Le Graal n'a jamais été aussi proche et lorsque vous relevez la tête, vous n'êtes plus que trois en course. Vous regardez la répartition des prix et vous vous apercevez que la différence entre la victoire et l'ultime place du podium est énorme...
La structure standard des prix donne généralement près de deux fois plus au premier qu'à son dauphin. Le troisième n'a lui droit qu'à la moitié de ce que touche le deuxième et ainsi de suite. En fait, la proportion du total du prizepool (ensemble de gains qui sont distribués aux vainqueurs) est fortement concentrée sur les trois premières places. Il peut donc être très intéressant pour les joueurs de trouver un arrangement financier : de dealer. C'est généralement à ce moment que la perspective de dealer se profile...
Cette pratique est théoriquement interdite par la loi française. Elle est pourtant très fréquente, notamment sur internet. Dans les Cercles ou les casinos, on la pratique aussi. Gagner de l'argent est la finalité du poker, parfois votre qualité de jeu ne suffira pas. Il est donc important de savoir négocier et de bien comprendre les subtilités d'un deal avantageux. Chercher un compromis où chacun semble gagnant, prendre son temps pour estimer sa situation, être patient pendant la discussion en écoutant les arguments adverses et toujours se donner le droit de dire non sont des qualités essentielles pour bien négocier. La répétition des Tables Finales et l'expérience qui va avec vous aideront à progresser dans la pratique du Deal.
Savoir que cette pratique existe vous évitera surtout de vous faire avoir la première fois que vous y serez confronté. Savoir à quoi vous attendre peut vous permettre d'économiser de l'argent mais aussi de ne pas perdre votre concentration lors de la reprise du tournoi. Plusieurs joueurs ont regretté l'arrangement qu'ils ont conclu dans la minute ou les semaines suivantes.
Le responsable du tournoi est généralement le témoin de la négociation. Il peut vous aider à faire les calculs et garantira la tenue des engagements que chacun a pris. "Nous sommes là pour que tout se passe bien, sans heurts. Ensuite, nous appliquons les termes de l'accord et les joueurs n'ont plus qu'à passer en caisse pour toucher leur part", explique le directeur de tournoi d'un cercle parisien qui a préféré rester anonyme.

Différentes formes
Pour se donner du poids dans la discussion, il faut tout d'abord ne pas être demandeur. Que vous vouliez le deal ou pas, ne pas paraître comme l'instigateur de ce dernier ne peut qu'être à votre avantage. Etre détaché et masquer son intérêt peut vous permettre d'empocher plus que le minimum acceptable. Ce minimum acceptable, c'est le prix du prochain joueur à sortir plus la proportion de vos jetons par rapport à ceux en jeu dans le tournoi converti en argent. Un deal peut néanmoins prendre plusieurs formes.
Imaginons que la répartition soit de 20.000, 10.000 et 5.000 euros et que les trois derniers joueurs possèdent un nombre de jetons quasiment équivalent. Les joueurs vont pouvoir décider de gommer les écarts et peuvent s'entendre pour une nouvelle répartition (15, 12 et 8K par exemple). Ils peuvent aussi décider de prendre chacun la même somme (10.000 euros) et de jouer le reliquat à la régulière (5.000 euros de plus pour le premier), c'est la forme de deal la plus courante.
Certains joueurs appliquent la politique du "no deal". Dans ce cas là, il n'est pas inutile de laisser les autres perdre leurs forces dans une négociation que vous refuserez à la fin. Alors que vos adversaires s'usent mentalement pour trouver un accord, vous gardez votre concentration et vous vous donnez un petit avantage qui peut vous rapporter gros. Quand vous avez aussi un énorme avantage en jetons, refuser tout deal permet de laisser vos opposants sous pression. La peur de l'élimination et l'énormité de la somme en jeu peuvent les faire déjouer, donc refuser quand vous êtes en position de force peut vous donner un avantage supplémentaire.
Mais en cas de refus, vous deviendrez peut être la cible de joueurs mécontents. Il est donc important de refuser dans les formes et poliment. C'est à dire en montrant que vous avez bien entendu les arguments de chacun mais que vous ne pouvez accepter. Cela poussera probablement vos adversaires à vous offrir plus pour obtenir votre accord... et à se frustrer tout seul.
Si les tractations sont fructueuses, ne vous relâchez pas et continuez à jouer votre meilleur poker. Il arrive fréquemment que la négociation fasse sauter des verrous psychologiques chez vos opposants.
Le titre de l'encadré ici
|||
Le premier principe qui régit le deal, c'est l'unanimité. L'unanimité est d'ailleurs l'unique condition obligatoire. Si un des joueurs concerné refuse, il bloque le processus. Ne donnez jamais votre accord sans être sûr de vous et de ce que vous gagnez car un deal n'est donc pas forcément équitable pour toutes les parties en présence. Après tout, le bluff doit faire partie intégrante de votre arsenal.