01/06 Philippe Auclair

Avec des ‘si’...
Si Louis Saha n’avait pas écrasé une litière de chats noirs, mis à sac la Galerie des Glaces, etc, etc, et avait pu jouer une saison complète – rien qu’une fois – dans un club de haut niveau, l’équipe de France ne chercherait pas ou plus un avant-centre digne d’un champion du monde. Il l’a encore montré dimanche, en marquant le but le plus rapide de l’histoire de la FA Cup, plus rapide encore que l’exocet de Roberto di Matteo contre Boro en 1997. Et quel but! Pour l’inscrire, il fallait toutes les qualités requises d’un rival potentiel de Didier Drogba: l’aplomb, l’équilibre, la puissance, la technique, la jugeote. Ce but faisait bien plaisir pour ‘Ti-Louis, mais il attisait aussi bien des regrets. Saha aura 31 ans le 8 aout. Il a passé le faîte de la colline, et on ne saura jamais si celle-ci aurait pu être plus haute.
Si Roman Abramovitch ne craignait pas le Kremlin, Guus Hiddink serait demeuré à Chelsea, et là aussi, dieu sait jusqu’où Chelsea aurait pu aller. Ancelotti? Pas convaincu, je vous l’avoue. Son anglais est encore plus mauvais que celui de Luis-Felipe Scolari – et de Jacques Santini, c’est dire. Dans un club dont les tauliers s’appellent Terry et Lampard, ce n’est pas un détail. Mais c’est peut-être la tristesse sincère que je ressens à voir partir Hiddink qui me fait parler ainsi. En l’espace de quelques semaines, Guus a séduit tout le monde. Les joueurs, les fans, les neutres, les journalistes. Parce qu’il n’est pas qu’un techncien de la trempe d’un Sacchi; parce qu’il est aussi un vrai ‘mister’, dont l’humanité a fleur de peau était encore sensible samedi soir, lorsqu’il arriva (très en retard, ce dont il s’excusa) à son point-presse d’après-victoire. Entre nous soit dit, il n’avait pas dû seulement fumer un havane et danser à l’africaine avec Essien, Mikel et...Abramovitch. Son regard était celui d’un homme qui n’avait pas voulu laisser réchauffer le champ’. Peu importe: il nous parla, longtemps, et bien, avec émotion et humilité, de ce que cette FA Cup représentait pour lui. Lorsqu’il s’est levé, j’ai été bien prêt de l’applaudir, comme beaucoup de mes confrères. On le fera quand il reviendra.
Si Steven Gerrard n’existait pas...quel gouffre cela laisserait dans le football anglais. Vendredi soir, c’était la remise du trophée du ‘Footballer of the Year’ (le vrai) au Royal Lancaster Hotel. Stevie G commença son discours de remerciements – sans notes – en remerciant le personnel des cuisines et les serveurs de l’hôtel. J’ai assisté à beaucoup de ces dîners, et c’était la première fois qu’une ‘star’ avait l’élégance de se souvenir des invisibles de ce genre d’occasions. Un geste simple, qui ne coûtait rien – autrement dit, le geste d’un homme de classe. Bien d’autres lauréats de cette distinction s’esquivent aussi vite que possible (n’est-ce pas, Cristiano Ronaldo, qui dit trois phrases avant de filer à la portuguaise?); pas Gerrard, qui prit sur lui de rendre visite à chacune des 50 tables de la salle, avec une gentillesse confondante. Une raison de plus d’aimer ce joueur, parmi mille autres.
Si Florentino Perez se taisait de temps à autre...ok, ok, nous aurions un peu plus de mal à remplir le temps d’antenne, mais peut-être aurions-nous aussi l’occasion de nous intéresser à des gentlemen qui font moins de bruit sans être moins intéressants pour cela, et surtout moins de bruit pour rien. Bref résumé: non, Wenger n’ira pas à Madrid (pas de happy end à notre feuilleton, mon Fred adoré); non, Ribéry, ce n’est pas ‘fait’, et loin, loin de là (plus sur ce sujet dans le grand after); non, Ronaldo n’est pas ‘fait’ non plus, malgré l’existence d’un pré-accord entre le Real...de Calderon et le joueur; Kaka, sans doute, encore qu’il sera intéressant de voir les répercussions que l’arrivée d’Ancelotti à Chelsea ne manquera pas d’avoir sur le marché.
Si Michel Platini arrêtait de nous refaire ‘Hibernatus’ en refusant quelque utilisation de la vidéo que ce soit, Florent Malouda aurait été crédité du plus beau but de sa carrière, ce week-end à Wembley. Au lieu de quoi il a été volé. L’arbitre et son assistant n’y pouvaient rien: leur placement leur interdisait de trancher, et ils se devaient donc de refuser le but. Mais, franchement...cinq secondes de ‘replay’ sur l’écran vidéo du 4ème arbitre, et justice aurait été faite. L’évidence crève parfois tellement les yeux qu’elle rend certains aveugles.
Philippe