Fred Hermel 01/03

UN INTELLECTUEL PEUT-IL REUSSIR DANS LE FOOTBALL?
La question que je pose, aujourd’hui, dans le titre de ma petite chronique hebdomadaire n’est pas du tout due au hasard. A dire vrai, c’est la nouvelle victoire d’Almería, dimanche à Santander (2-0) qui m’en a donné l’idée. Je vous explique pourquoi. Juan Manuel Lillo, l’entraîneur de l’équipe andalouse, est l’une des personnes les plus intellectuelles que j’ai pu connaître au cours de mes quarante ans de vie. Un fait assez surprenant dans un monde du football qui brille souvent par son cruel manque de culture, son absence d’ouverture sur les autres et sa propension à l’insulte et à la vulgarité. J’ai connu Lillo au cours de la Coupe du Monde 2006, grâce à un programme de la chaîne de télé espagnole « La Sexta ». Nous avons passé dix heures par jour ensemble durant un mois et je dois reconnaître avoir été subjugué par son intelligence. Chaque détail de la vie, et du football, donnait lieu à une profonde réflexion. Tout était conceptualisé. Je me suis souvent demandé comment ce grand intellectuel, féru de lecture d’essais les plus divers, était capable, dans le secret du vestiaire, de transmettre son message tactique à ses joueurs. Sa magnifique réussite avec le modeste Almeria prouve qu’il y parvient. Arrivé en décembre dernier alors que l’équipe andalouse flirtait dangereusement avec la descente, Juan Manuel Lillo a réussi à placer le club à une confortable douzième place. Et il est aujourd’hui présenté comme l’entraîneur à la mode de la liga. J’en suis très heureux pour lui car il y a belle lurette que ce Basque de naissance aurait du être reconnu à sa juste valeur. A savoir entraîner un grand club. Il en fut très proche en 2003. A l’époque, Lluis Bassat, le principal favori de l’élection à la présidence du Barça, devait en faire le coach de l’équipe catalane, avec, d’ailleurs, un certain Pep Guardiola comme directeur sportif. Malheureusement, une ignoble campagne antisémite fit perdre l’élection à Bassat (je tiens à préciser que le vainqueur des urnes, Joan Laporta, n’avait absolument rien à voir avec cette campagne de dénigrement contre Bassat et qu’elle était du fait d’un autre candidat). Et Lillo manqua une sublime occasion de faire éclater son talent sur la scène internationale. Un jour, le football rendra justice à cet homme. Je l’espère.
FRED HERMEL