RMC Sport

Philippe Auclair - Back in England! 27/09

Le week-end des longs couteaux... Chelsea, Arsenal, Tottenham, descendez!

Chelsea, Arsenal, Tottenham, descendez! Manchester United, reculez! A la veille de matchs de Ligue des Champions dont deux au moins n’ont rien d’évident pour les représentants de l’Angleterre (les déplacements à Valence et Belgrade), ceux-ci ont recueilli en tout et pour tout un point sur douze lors du week-end le plus riche en surprises de la saison. De quoi donner des idées à Valence (qui flambe, d’ailleurs), Twente, au Partizan et même à Marseille...

C’est évidemment le succès de West Brom à Arsenal – leur première victoire sur le terrain des Gunners depuis 1983 – qui a chatouillé l’indice maximum sur l’échelle de Richter. Suffisant, et insuffisant, cet Arsenal, qui a été justement remis à sa place par des Baggies enthousiasmants, qui ont su dominer le combat physique sans renier leur tradition d’équipe joueuse. Bravo à Roberto di Matteo, qui a su inverser la tendance dans le club des Midlands après une entame de saison plutôt délicate (six buts encaissés le premier jour...). Certains diront que les joueurs d’Arsenal auraient pu partager les points lorsqu’ils firent – enfin – le siège du but de West Brom dans les vingt dernières minutes du match. C’aurait été une injustice. On pointera du doigt Manuel Almunia, à la faute sur les buts du 2-0 et du 3-0, en oubliant qu’il avait arrêté un pénalty auparavant. Mais s’il est clair que l’Espagnol porte une part de responsabilité dans le naufrage d’Arsenal, il est aussi indiscutable que ses coéquipiers – tous ses coéquipiers – sont passés au travers. Les meilleurs Gunners? Samir Nasri, mais en deuxième période seulement; ses deux buts, superbement exécutés, ne doivent pas faire oublier 45 premières minutes ratées, alors qu’il avait la responsabilité du jeu. Et Jack Wilshere, impeccable, comme d’habitude, dès son entrée en jeu.

Wenger était furieux contre ses joueurs, et avec raison. Est-ce la peine de montrer autant de gnac contre Bolton et Blackburn pour s’étioler aussi lamentablement contre West Brom? Bien sûr que non. La Premier League est impitoyable envers ceux qui pensent que quelque point que ce soit est ‘acquis d’avance’. Et tant mieux. Espérons que les nouveaux venus, Squillaci et Koscielny en particulier, justement loués pour leurs prestations jusqu’à présent, retiennent la leçon après avoir bafouillé par excès de ‘confiance’. Cela dit, Wenger lui aussi était responsable, et il le savait – d’où son expression si fermée après le match. Il avait choisi la mauvaise équipe (Diaby titularisé alors qu’il n’était visiblement pas prêt), et n’avait pas su la préparer psychologiquement. Il avait aussi raté son coaching, avec un troisième remplacement incompréhensible (Squillaci out, Vela in, Song qui glisse en défense centrale...mamma mia...). A bad day at the office, comme on dit ici, depuis le patron jusqu’au réceptionniste.

Cela dit, ne crions pas à la catastrophe trop vite. Hormis Manchester City, aucun des prétendants au titre n’a tiré le meilleur parti de l’incroyable faux pas des Gunners. Chelsea, comme je vous l’avais dit et répété depuis la publication du calendrier, arriverait à Eastlands avec 15 points sur 15. Le premier test serait contre la città di Manchester, cette équipe de Serie A qui s’est retrouvée parachutée en Premier League par la grâce de Mancini, et qui a appliqué le plan de ce dernier (‘on bétonne le milieu, on attend, on contre’) à la perfection, avec un Nigel de Jong qui a éclipsé les milieux de Chelsea (ce qui n’est pas rien), un David Silva qui a montré, enfin, de jolies choses, et un Carlito qui nous a fait du Tevez, bref, qui nous a épaté, une fois de plus. Sir Alex, ne rêvez-vous pas trop souvent de cet Apache qui aurait pu être à toi?

Quel manque de créativité des Blues dans les trente mètres adverses! C’est dans ce genre de match qu’on se rend compte de l’influence que Frank Lampard a sur le jeu de Chelsea. Ses appels, son mouvement, offrent des solutions au porteur du ballon, que Essien, Mikel ou Ramires ne peuvent pas proposer. Florent Malouda ne peut pas tout faire tout seul, même s’il l’essaie parfois. Didier Drogba parait boudeur – et n’a visiblement pas apprécié d’être remplacé à 15 minutes de la fin du match. Nicolas Anelka, brillant contre Newcastle en League Cup (quand ‘Didi’ était absent...un hasard?), n’a presque rien réussi de ce qu’il a entrepris. D’où peut venir l’étincelle? De Benayoun? De Josh McEachran, très convaincant après son entrée en jeu? Je ne me fais cela dit pas trop de soucis pour les Blues; le gène du ‘savoir gagner’ a été greffé sur son ADN par Mourinho, et Ancelotti est trop intelligent pour ne pas savoir en tirer parti. Il est aussi superstitieux, dit-on. Auquel cas il doit commencer à penser que Man City est son chat noir – les Citizens ont désormais remporté leurs trois derniers matchs de championnat contre les Blues. Qui peut en dire autant? Personne...

Manchester United....hum. Un bon, ou un mauvais résultat que ce 2-2 à Bolton? Bolton, après tout, c’est un derby. C’est aussi une équipe qui monte. Mais que l’occasion était belle de revenir sur Chelsea, et de prendre trois longueurs d’avance sur Arsenal...Au bout du compte, ce sont pourtant les Wanderers d’Owen Coyle qui avaient des raisons d’être déçus, et Alex Ferguson des motifs d’inquiétude avant le voyage des red devils au Mestalla. Giggs s’est blessé (deux semaines d’indisponibilité); Rooney le serait qu’on verrait à peine la différence. Son back-four actuel est probablement le plus faible de MU depuis la saison 1991-92; 1,5 but concédé par rencontre en championnat, c’est inadmissible. Trois matchs à l’extérieur, zéro victoire...Mais United est malgré tout second de la Premiership, mal en point, certes, mais porté par son orgueil, et une poignée de joueurs qui le justifient: Berbatov, Fletcher, Scholes, van der Sar; Nani aussi parfois, encore que l’on ne sache jamais quoi attendre du Portuguais. Hier, c’était un but de toute beauté. Demain...Il est malgré tout difficile de ne pas sentir que United doit exploiter ses ressources au maximum pour demeurer un vrai challenger. On a du mal à sentir un potentiel d’explosion, si je puis dire.

Mais n’est-ce pas le cas de la Premier League toute entière cette saison? Une stat’ qui n’est pas sans intérêt: nous avons déjà 22 matchs nuls en 6 journées de championnat cette saison, contre 4 seulement en 2009-10, alors que la moyenne de buts par match n’a pas changé: c’est le signe d’un resserrement des valeurs, plus que du déclin supposé des caïds. Ce qui est une excellente chose, mais peut aussi être un gros handicap pour les équipes également appellées à jouer en Europe, et qui doivent, chaque week-end, affronter des adversaires autrement plus difficiles que leurs futurs rivaux.

Je pense à Tottenham, par exemple, qui recevra Twente mercredi. La semaine passée, ils avaient su négocier un match très compliqué au retour de leur 2-2 à Brême. J’espérais alors qu’ils avaient passé un cap psychologique. Mais depuis, bang! Bang! 1-4 contre les Gunners en Coupe de la League à White Hart Lane, et ce revers 1-0 à Upton Park (ou au Boleyn Ground, pour les connaisseurs), sur une tête parfaitement ajustée de Frédéric Piquionne (eh oui!). Harry Redknapp a également de gros problèmes de personnel, avec une liste de blessés qui ne cesse de s’allonger: King (quelle surprise...) et Gallas ont rejoint Jermain Defoe, Michael Dawson et Luka Modric à l’infirmerie. Du coup, Bassong est le seul défenseur central qui lui reste...au point que Corluka (pourtant lui aussi souffrant) a dû être aligné dans l’axe à West Ham. Cette saison ‘historique’ pour les Spurs ressemble de plus en plus à une série de points d’exclamation et de points d’interrogation, dans laquelle on a du mal à lire un sens.

Un dernier mot sur Everton, la lanterne rouge du championnat, avec 3 points sur 18, après un 0-0 de somnambules à Fulham. Quelles que soient l’estime et l’admiration – toutes deux justifiées - que M. Kenwright porte à David Moyes, ne serait-il pas temps de songer sérieusement à la succession de l’Ecossais? Certains de mes amis Toffees m’avaient dit au mois d’août – ‘ça sera sans doute la dernière de ‘Moyesey’’. D’autres me disent aujourd’hui que l’affection portée au manager est telle que les supporters s’interdisent de le critiquer de quelque façon que ce soit. Cette loyauté est admirable. Elle a aussi ses dangers.

PS:'' il est de bon ton de casser du sucre sur le dos de Gérard Houllier, alias ‘Talleyrand’ ou ‘Culbuto’. Je m’en suis toujours gardé, ayant beaucoup d’estime pour l’homme et de respect pour le technicien, même si le ‘politique’ n’est à la hauteur ni de l’un, ni de l’autre (ce qui, pour moi, n’est pas un péché mortel, mais plutôt la preuve qu’il n’est pas fait pour ça). L’unanimité dans l’admiration comme dans le dénigrement est toujours suspecte. Il est évidemment beaucoup trop tôt pour porter quelque jugement que ce soit sur l’impact que Houllier aura sur Aston Villa. Il est clair, néanmoins, qu’il s’est impliqué à fond dans ce projet, et que le message commence à passer auprès de certains cadres des Villans, dont leur capitaine Stilyan Petrov...sans parler d’Emil Heskey. Deux matchs, deux victoires, dont une dans un derby à l’extérieur, c’est un tremplin. Au lieu d’assassiner Houllier, on devrait peut-être se demander si le football français est si riche que ça en hommes dont la passion pour le jeu et les talents d’organisateur sont à la hauteur des siens. ''