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Berbizier : « Je ne crois pas en l’homme providentiel »

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Ancien sélectionneur de l’équipe de France (1991-1995) et de l’Italie (2005-2007), Pierre Berbizier donne un avis très tranché sur les maux du XV de France. Si le peu de changements pour affronter l’Italie après un début de Tournoi raté ne l’interpelle pas plus que ça, l’ancien demi de mêlée estime que le projet de jeu doit revenir au centre des débats. Joueurs, staff et dirigeants, Berbizier met chacun devant ses responsabilités alors que les Bleus traversent une période d’échec.

Peu de changements ont été annoncés par Philippe Saint-André pour affronter l’Italie (dimanche 15 mars). Est-ce logique après ses déclarations visant le comportement de ses joueurs ?

Les changements sont dus aux blessures. Il a fait dans la continuité. Mais au-delà des joueurs, il faudrait peut-être parler un peu du jeu à mettre en place. Les joueurs l’oublient sur le terrain. Sauf pendant dix ou quinze minutes. Quand la cause est perdue, on a toujours un moment de redressement. L’essentiel aujourd’hui serait de revenir sur le jeu et de définir un vrai plan de jeu. Et seulement ensuite de choisir les joueurs capables de mettre en place ce plan de jeu pour être compétitif au plus haut niveau.

Avons-nous le talent nécessaire en équipe de France pour produire du jeu et gagner ?

On ne sait pas quel jeu cette équipe de France veut jouer. Donc il est difficile d’évaluer les joueurs. Ce qui interpelle, c’est le niveau de ces mêmes joueurs dans un autre cadre. C’est donc lié au jeu qu’ils pratiquent en équipe de France. Il faudrait définir un vrai cadre de jeu. Car je ne crois pas en l’homme providentiel. Notre problème, c’est de l’attendre. Et du coup, on a l’impression que les absents sont souvent les gagnants. Des joueurs bannis reviennent et sont considérés comme des Messi. Ça va, ça vient, mais ça ne règle pas le problème.

A sept mois de la Coupe du monde, n’est-il pas un peu tard pour parler de jeu ?

Oui et non. La Coupe du monde est une autre compétition. On l’a vu sur la dernière. Sans maîtriser son jeu, l’équipe de France a atteint la finale. C’est peut-être de là que vient le problème. Une ambiguïté est née. Un bilan n’a pas été fait. Tout le monde pense qu’on aurait dû être champion du monde. Mais quand vous avez trois défaites au compteur, vous ne pouvez pas être champion du monde dans une compétition. On s’est peut-être inscrit dans le faux. On n’a pas réglé les problèmes. Et quatre ans plus tard, on espère un nouveau mal entendu pour faire un bon parcours.

Vous ne semblez pourtant pas pour un électrochoc et le départ de Saint-André ?

Non, je ne veux pas la tête de Saint-André. Mais j’aimerais bien entendre Serge Blanco, qui devait épauler Saint-André. J’ai quand même trouvé son arrivée comme un cruel désaveu. La position de Serge Blanco doit être clarifiée, comme celle de son staff que l’on n’entend pas. Et du coup, il y a une incompréhension. Je me demande si les joueurs eux même comprennent quelque chose. Mais ils ont aussi leur part de responsabilité. Le souci, c’est que nous sommes en situation d’échec et que nous n’identifions pas clairement les responsabilités. Quelle est la part de responsabilité des joueurs ? Quelle est la part de responsabilité du staff ? Quelle est la part de responsabilité des dirigeants ? Le flou est entretenu et chacun se renvoie la balle.

Etes-vous inquiet pour la fin du Tournoi ?

Je ne suis pas rassuré. Mais on peut perdre en Italie et gagner en Angleterre. C’est le paradoxe de cette équipe. Quand on voit les Irlandais ou les Gallois, il n’y a rien de génial. Mais il y a une organisation, une répétition, de la simplicité. Ils sont néanmoins compétitifs. Il nous faut une organisation, s’y tenir et la répéter.

Maxime Raulin