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Le "psy" des Bleus : « Il y a de quoi être optimiste »

Thierry Dusautoir, Julien Pierre et Julien Bonnaire

Thierry Dusautoir, Julien Pierre et Julien Bonnaire - -

Spécialiste du coaching en entreprise, François Peltier a travaillé avec l'équipe de France ces deux dernières années. Il est persuadé que les Bleus sont dans les conditions idéales avant la finale ce dimanche contre les All Blacks (10h).

François Peltier, comment analysez-vous l'implication majeure des joueurs français depuis la défaite contre les Tonga (14-19) en phase de poules ?

Je trouve que c’est important que les joueurs aient pris le pouvoir. Il y a un moment où tout le travail foncier étant fait, c’est à eux de prendre en main leur destin et leurs responsabilités. Ils sont sur le terrain. C’est à eux de proposer leur propre déploiement de ce qui a été travaillé. Qu’ils aient pris le pouvoir, ça me parait naturel. En revanche, qu’ils aient mis Marc (Lièvremont, ndlr) de côté, ça me parait impossible. C’est un juste milieu. Churchill disait : "Je suis obligé de les suivre, c’est moi leur chef." Je pense que c’est comme ça que ça se passe maintenant.

Pourquoi Marc Lièvremont a-t-il une relation difficile avec les médias ?

Ce n’est pas quelqu’un qui a essayé de faire du media training pour savoir comment répondre aux journalistes. Je pense qu’il refuserait, de toute façon. Son tempérament, c’est d’être entier et direct. Il dit ce qu’il pense et il pense ce qu’il dit. Ce n’est pas forcément le cas de tout le monde. Ça stimule parfois. Dans d’autres cas, ça peut déstabiliser. Mais c’est lui. Il faut le prendre comme il est, l’accepter comme il est. C’est le signe d’une hyper-implication, d’une hyper-intention par rapport à ses responsabilités. Il a voulu être chef. Il a cherché à créer l’unité pour l’équipe, en se sacrifiant par moments. Il est soit très chaud, soit très froid. Ce n’est jamais médiocre chez lui.

Son impulsivité ne gêne-t-elle pas le groupe ?

Il peut être impulsif mais il peut ensuite très naturellement reconnaitre son tort, s’excuser. Il sait que, fondamentalement, ce ne sont pas des sales gosses. Il sait que ce sont des gens de valeur, des adultes responsables. Il sait qu’il n’aurait pas dû employer ces termes devant les médias comme devant les joueurs. Mais il est comme ça. Il est nature.

« Le parcours moyen réalisé jusqu'à présent est excellent »

Comment cette équipe a-t-elle survécu aux nombreuses claques depuis le printemps 2010 ?

Il y a un projet, une ambition, une apothéose sportive. Toutes les cicatrices liées aux défaites contre l’Australie, l’Italie et l’Argentine ont disparu au profit de l’avenir. Le regard sur le passé n’était pas prédominant. Un travail a été fait rapidement. Il a porté ses fruits en termes de cohésion, d’état d’esprit, de valeurs très fortes, de solidarité. Avec peut-être un ressort, une énergie intérieure, un amour et une confiance mutuelle dans l’équipe qui sont plus forts que pendant le Tournoi.

Ce groupe voulait-il être champion du monde dès le début de la préparation ?

Je leur avais proposé un petit exercice de réflexion. Je voulais voir s’ils considéraient que le titre de champion du monde était un objectif rêvé, idéalisé, ou si c’était un objectif réalisable, atteignable. J’ai été très surpris de voir qu’en creusant un peu, ce n’était pas rêvé. Pour eux, c’était vraiment un objectif, difficile certes, mais en même temps réaliste. Ça a mobilisé leur énergie individuelle et collective. Les joueurs se sont très rapidement soudés vers cet objectif commun. Ça a été très intéressant. Il y avait vraiment un très bon esprit dans cette équipe.

Quel est votre pronostic pour la finale ?

On n’est pas favoris. Mais on a un passé, une histoire, qui montrent que les exploits, ce sont à ces moments-là qu’on les réalise. Et face à ces adversaires-là. Je pense que l’évènement suffit à les transcender. Surtout que le parcours moyen qui a été réalisé jusqu’à présent est excellent. Ils ne peuvent pas s’appuyer sur une réussite extraordinaire, sur un exploit particulier. L’exploit, il est à venir. J’essaie de ne pas être trop optimiste, mais d’être réaliste. Mais même quand je suis réaliste, je me dis qu’il y a de quoi être optimiste.