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Top 14: face à la crainte de perdre 280 millions d’euros, l’aide de l’Etat ne suffira pas

Si les championnats sont assurés de se poursuivre malgré le nouveau confinement, le rugby professionnel est toujours en danger. Le Top 14 et la Pro D2 vont recevoir une aide d’environ 40 millions de l’Etat. Clairement insuffisant pour s’en sortir, selon les dirigeants des clubs.

L’Etat va bel et bien venir au secours du rugby professionnel. Au bord du gouffre en raison de la pandémie, le Top 14 et la Pro D2 pourront compter sur une aide d’environ 40 millions d’euros dans les semaines et les mois à venir, dont 70% seront versés dans les trois prochaines semaines. "C’est mieux que rien, mais ça ne suffira pas", voilà le sentiment de plusieurs présidents de clubs réunis jeudi soir en visioconférence. Car lorsqu’ils avaient rencontré, avec la Ligue Nationale de Rugby, les pouvoirs publics et le cabinet de Jean Castex le 1er septembre, ils avaient calculé des besoins en fonction de jauges à 5.000 spectateurs jusqu’à fin de l’année 2020.

La donne a malheureusement changé, avec des jauges à 1.000 personnes puis un huis clos généralisé en raison du confinement. Autant dire que les pertes sont considérablement plus élevées qu’au départ. Estimées à 54 millions pour des jauges à 5.000 sur une demi-saison (septembre-décembre 2020), elles monteraient à 180 millions d'euros pour des huis-clos sur la même période selon les informations de RMC Sport. Pire, en comptabilisant les pertes du printemps, elles passeraient à 280 millions sur l’ensemble de l’année 2020, toujours selon nos informations. "Si c’est pour toute la saison, c’est un pansement sur une jambe de bois", avoue un président qui, comme les autres, perd plusieurs centaines de milliers d’euros à chaque match à huis clos.

"C’est un début mais c’est très, très loin d’être à la hauteur des enjeux et des difficultés que l’on connait, avoue le Lyonnais Yann Roubert. Ça ne suffira pas. On peut évidemment se réjouir que le sport professionnel, dont le rugby, puisse continuer. C’est formidable pour le jeu et pour le sport. Mais si on regarde l’aspect économique, c’était intenable à 5.000 spectateurs, catastrophique à 1.000 et encore plus abominable à huis clos. On continue à assumer toutes nos charges mais on n’a pas le droit de faire rentrer le moindre euro."

Des exonérations de charges toujours attendues

Pour répartir cette aide gouvernementale, les clubs ont présenté des budgets à la Direction nationale d'aide et de contrôle de gestion, en fonction des différentes jauges. Un calcul sera mis en place en fonction des manques à gagner liées aux affluences basées sur les années précédentes. "On aura inévitablement des discussions avec les services de l’Etat qui sont, je pense, conscients de la situation, selon l’Agenais Jean-François Fonteneau. On ne peut pas permettre au sport professionnel de continuer son activité sans le soutenir en raison des huis clos. Ce n’est pas compatible."

Dans ces conditions, le rugby professionnel irait clairement dans le mur sans d’autres mesures pour accompagner cet énorme manque à gagner. "Il faut que l’aide se poursuivre jusqu’au mois de juin", selon une source proche du dossier. Les clubs attendent surtout d’autres compensations, en particulier une exonération des charges, comme cela avait été le cas de février à mai. Des demandes ont été faites en ce sens. "Nous n’avons pas mis la clé sous la porte, mais il faut nous aider pour que ça continue", nous dit-on. Le rugby professionnel, plus très loin du précipice, en a plus que jamais besoin.

Les chiffres à retenir:
• 54 millions d’euros: pertes estimées sur une demi-saison (septembre-décembre 2020) avec une jauge à 5.000 spectateurs
• 180 millions d’euros: pertes estimées sur une demi-saison à huis clos
• 280 millions d’euros: pertes globales en 2020 pour le rugby professionnel, en comptant donc le huis clos

Jean-François Paturaud