
XV de France : les raisons du naufrage

Frédéric Michalak - -
Des joueurs fatigués et usés
Avec deux défaites d’entrée, en Italie (23-18) et face au pays de Galles (16-6), le XV de France a réalisé sa pire entame de Tournoi depuis 1982. Sur le pré de Rome, puis au Stade de France, les Bleus sont apparus émoussés, usés physiquement et mentalement. La faute, en partie, à un calendrier démentiel qui ne leur laisse que peu de répit. « Il y a eu cinq changements pour affronter l’Angleterre, je pensais qu’il y en aurait plus, qu’on allait peut-être changer les trois-quarts de nos joueurs, glisse Abdelatif Benazzi, l’ancien avant international. Le sélectionneur (Philippe Saint-André) laisse peut être certains joueurs se reposer en vue de la tournée de cet été en Nouvelle-Zélande. Maintenant, les changements qui ont été faits, j’espère qu’ils seront bénéfiques. Au-delà du moral, l’équipe est un peu amochée, j’espère que ce weekend va permettre de se conditionner pour un rendez-vous capital. Peut-être que le fait de jouer avec la peur va permettre de créer une cohésion et d’obtenir un résultat. »
Un manque de temps et de cohésion
C’est une doléance récurrente chez les sélectionneurs du XV de France. Le manque de temps. Tous se plaignent de ne pas disposer suffisamment de leurs joueurs durant la saison. Une frustration à laquelle n’échappe pas Saint-André, contraint de bâtir une équipe avec les moyens du bord, sur fond de divergences entre la FFR et les clubs du Top 14. « D’une manière générale, il faut plus de solidarité de l’ensemble du rugby français, estime Marc Lièvremont, le prédécesseur de PSA. Il faut un peu plus d’empathie des uns et des autres. On sait que c’est compliqué pour les clubs dans cette période internationale, avec la longueur du championnat qui est dense et qui tape sur les nerfs. Il existe aussi le sentiment de travailler dans l’urgence. Dès fois, avec succès et bonheur, comme ça été le cas au mois de novembre pour les hommes de Philippe Saint André. D’autres fois, en étant dans le rouge, sachant que le réservoir de l’équipe de France n’est pas extensible. C’est le cas en ce moment. Mais d’une manière générale, la grosse problématique, c’est ce sentiment de toujours travailler dans l’urgence et d’aller à l’essentiel. Il y a une forme de frustration par rapport à ça. »
Un système de formation en questions
Les jeunes joueurs français sont-ils bien préparés aux joutes internationales ? Vu les performances de la relève tricolore ces dernières semaines, le doute est permis. Certains, à l’image de Pierre Berbizier, ont même un avis tranché sur la question. Pour l’ancien entraîneur du Racing Métro 92, la France accuse aujourd’hui un déficit de formation par rapport à ses plus illustres rivaux. « Je me demande si notre formation au haut niveau n’enferme pas nos joueurs dans un monde virtuel, glisse-t-il. Un monde qui surprend ensuite, quand on se retrouve avec la réalité du terrain, la réalité du haut niveau. Pour l’avoir vécu aussi, j’ai l’impression que nos joueurs sont maintenant dans un monde virtuel et ils sont parfois surpris par ce retour du bâton qui les rappelle à l’ordre et qui les place face à la réalité du terrain. »