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"Même si on a le sifflet, on n'a pas la vérité": face aux critiques, les arbitres plaident pour plus de communication

Un arbitre de Ligue 1

Un arbitre de Ligue 1 - ICON Sport

Pas le même maillot mais la même passion. C’est la devise des journées de l’arbitrage La Poste 2025. Ce mercredi à Paris quatre arbitres ont mis à l’honneur leur profession devant 150 enfants.  L’occasion de revenir avec eux sur les critiques dont ils font l'objet.

Sur le terrain de sport Goutte d’or, l’ambiance est festive. Pendant une heure, une soixantaine d’enfants, âgés de 9 à 13 ans, s’initie à l’arbitrage. Au programme, quatre ateliers pour découvrir les piliers de la profession. Décision, communication, passion et réactivité.

Sur le bord du terrain, des arbitres professionnels guident les jeunes. Chacun sa discipline: football, handball, rugby et basketball. Mais un objectif commun rendre leur passion accessible à tous. "Les jeunes, en se mettant à la place de l’arbitre, se rendent compte des difficultés, raconte Camille Soriano, arbitre assistante en Ligue 2 BKT. Ça change leur regard, avec beaucoup plus de bienveillance".

Pour cette 24e édition, Nikola Karabatic est parrain de l’évènement. "Une journée comme celle-ci est importante parce que le rôle de l'arbitre est un rôle dans l'ombre. Soit on n'en parle pas et c'est que le match s'est bien déroulé. Soit il y a un camp qui râle et les décisions peuvent être pointées du doigt, explique l’ex-handballeur tricolore. Le rôle de l'arbitre est rarement valorisé alors qu'il est partie prenante du jeu. Sans l'arbitre, on ne peut pas faire un match".

Une profession toujours plus critiquée

A la fin de la matinée, les ateliers ont porté leur fruit. "Je ne pensais pas que c’était aussi dur d’arbitrer, témoigne Octave, collégien. On se plaint tout le temps de l’arbitre et des décisions qu’il peut prendre mais en fait il subit beaucoup. C’est dur et injustifié. Même s’il a tort, l’arbitre a toujours raison".

Chez les jeunes, l’arbitrage a plutôt bonne presse: un sondage Ipsos rapporte ainsi que 72% des jeunes ont une image positive des arbitres. Mais dans le monde professionnel, la tendance est moins vraie. En témoigne la sortie du président du Losc Olivier Létang ce dimanche après la défaite de son équipe face à Lyon: "On a un vrai problème de fond avec l’arbitrage en France (…) Tous les week-ends, sur quasiment tous les matchs, il y a des problèmes".

Une critique qui fait réagir le corps arbitral. Kevin Bralley, arbitre de Top 14, veut nuancer: "Quand on est plus médiatisé, forcément on touche un public beaucoup plus grand, donc on peut être sujet à plus de critiques". Brahima Sissoko, arbitre international de basket, partage cet avis. "La problématique qu'on a, c'est que l'erreur fait partie de notre activité et on a souvent du mal à le faire accepter".

D’autant que certaines actions sont difficiles à trancher. "Il y a toujours des situations qui peuvent être ambiguës, analyse Camille Soriano. Par exemple, les mains dans le football prêtent beaucoup à contestation (…) On ne pourra jamais faire des heureux partout".

"Même si on a le sifflet, on n'a pas la vérité"

Pour préserver l’arbitrage face aux critiques virulentes, des solutions se mettent en place voire existent déjà. A commencer par la controversée "haie d’honneur". Avant chaque match de Top 14, les joueurs se mettent en ligne, face à face, pour accueillir les arbitres de la rencontre.

Une nouveauté de la saison 2025/2026 qui ne fait pas l’unanimité. "Ça part d'un bon sentiment, témoigne Kevin Bralley. Mais comme on est plus médiatisé, on est souvent au centre de l'attention quand il y a décisions fortes, ou des arbitrages vidéo. Et on aime aussi être des gens de l’ombre. Les stars, ce sont les joueurs".

Pour les arbitres, peu importe la discipline, le maître mot c’est la communication. Avec tous les acteurs du sport. "Même si on a le sifflet, on n'a pas la vérité, développe l’arbitre de Top 14. On est des hommes et des femmes. On fait des erreurs, et on se nourrit de nos erreurs et des erreurs des staffs et des joueurs également, pour arriver à tous se remettre en question et faire vivre cet écosystème-là".

Et quand la communication ne suffit pas, la clé c’est peut-être dans le règlement lui-même, comme l'explique Nikola Karabatic: "Dans le handball, on peut communiquer avec l’arbitre, mais si c’est trop virulent, on prend deux minutes de sanction et on laisse l’équipe en infériorité numérique. Ça apaise tout de suite les tensions".

Même si la profession arbitrale fait régulièrement l’objet de critiques, d’après le même sondage Ipsos, 55 % des jeunes pourraient envisager de devenir arbitre dans leur sport.

Diane Carlotti