Boxe: "Quelque chose d’exceptionnel", Cissokho présente le choc d’unification Charlo-Castano

Souleymane, les super-welters vont vivre une unification des quatre ceintures mondiales principales ce week-end avec le combat entre Jermell Charlo et Brian Castano. Que représente ce choc pour votre catégorie?
Il n’y a jamais eu d’unification à quatre ceintures dans cette catégorie (le dernier champion incontesté des super-welters, l’Américain Ronald "Winky" Wright, l’était avec les ceintures WBC, WBA et IBF en 2004, époque où le titre WBO n’était pas nécessaire pour obtenir ce statut, ndlr). Avoir toutes les ceintures en jeu, c’est vraiment quelque chose d’exceptionnel.
Le favori est l’Américain Jermell Charlo, déjà champion WBC-WBA Super-IBF mais aussi détenteur de la prestigieuse ceinture The Ring. Quelles sont ses principales qualités?
Charlo est un requin. Avec son frère Jermall, champion WBC des moyens, ils se surnomment "les lions" mais c’est un requin. Il a faim, il est déterminé. Mentalement, il se dit qu’il ne peut laisser personne lui marcher dessus et lui changer sa vie. Il gagne de l’argent, il a un style de vie dans lequel il veut rester et il se dit que personne ne va venir lui voler ça. Il est une détermination, une façon de se dire qu’il va tout donner à chaque combat et que le mec en face va prendre cher. C’est un boxeur assez complet, qui recule, qui avance, qui a de la gouache et qui envoie. Il est surtout très fort mentalement. Tu le vois à sa façon d’être avant de monter sur le ring. Il est vraiment très fort.
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Selon vous, est-il au-dessus de la mêlée chez les super-welters?
C’est le numéro 1, oui, mais je ne dirais pas non plus qu’il est au-dessus de la mêlée. On a vu ses deux combats contre Tony Harrison. Le premier était serré mais la décision a été donnée à Harrison. Dans le deuxième, il ne faut pas oublier qu’il perdait le combat même si derrière il a touché et mis KO Harrison, qui manquait de ring à ce moment-là car Charlo avait combattu entretemps contrairement à lui. Face à un boxeur, quelqu’un qui sait vraiment bien boxer, Charlo a quand même du mal. Harrison gérait avec son jab, il bougeait beaucoup, il variait très bien, et ça lui posait problème. Maintenant, il dit qu’il a pris en expérience. Il a fait face à toutes sortes de boxeurs, des grands, des petits, des mecs qui avancent, des mecs qui reculent, et je pense qu’il va nous sortir un gros combat. En tout cas, il s’attend à avoir un combat assez dur.
Que pouvez-vous nous dire sur son adversaire, l’Argentin Brian Castano, détenteur de la ceinture WBO depuis sa victoire sur Patrick Teixeira en février?
Castana était quelqu’un qu’on ne connaissait pas mais quand il a boxé face au Français Michel Soro (victoire de l’Argentin sur décision partagée en juillet 2017, ndlr), je disais à tout le monde: attention. Je le connaissais car c’est un boxeur que je devais rencontrer en WSB, quand je boxais pour le Mexique et qu’on devait affronter l’Argentine pour laquelle il avait fait quelques combats. J’avais commencé à regarder les vidéos de ses combats et c’est un boxeur très, très bon, complet, qui a un débit de coups exceptionnel. A l’époque, même si j’étais à 100% pour Michel, je prévenais que ça n’allait pas être un combat facile même s’il n’avait que treize combats pro au compteur et que les gens insistaient là-dessus. Ils ont ensuite vu ce que ça a donné. Là où il est dangereux, aussi, c’est sur tout ce qu’il y a derrière lui. Charlo boxe pour Houston, sa ville, il est fier de la représenter et il sera devant son public au Texas. Mais Castano boxe pour l’Argentine, pour tout un peuple. Il a une faim énorme, son père en parlait dans les vidéos de Showtime pour promouvoir le combat. Il boxe pour tout un pays. Ce genre de mecs, ce sont des crève-la-dalle. Il y a autre chose derrière qui les fait avancer. Il veut rentrer dans l’histoire et ça passe par battre Charlo. En tout cas, avec son clan, ils ont confiance en ses capacités à le faire.
Il y a donc un vrai danger pour Charlo face à lui?
Bien sûr. Castano est un boxeur qui encaisse, solide, avec ce débit de coups qui m’a toujours étonné tant il est impressionnant. Au-delà de ça, il est frais, il n’a pas beaucoup de combats, il a la dalle. Ce ne sera pas un combat facile pour Charlo.

Quand un boxeur s’empare des quatre ceintures, il choisit parfois de monter de catégorie, comme Charlo pourrait le faire, et les titres redeviennent vacants et se disséminent. Pouvez-vous nous expliquer en quoi cela peut être très positif pour votre quête d’une ceinture mondiale, vous qui avez intégré le top 15 de la WBA?
Ce qui va se passer samedi est très positif. Derrière, les ceintures vont être divisées. Même si le vainqueur reste dans la catégorie, certaines ceintures vont sans doute devenir vacantes car chaque fédération a son challenger obligatoire et peut destituer le champion s’il ne l’affronte pas. Des choses vont se passer dans cette catégorie. Charlo, je suis quasiment sûr à 100% qu’il montera chez les moyens derrière quoi qu’il arrive, qu’il gagne ou qu’il perde. La catégorie devrait être assez libre derrière. Il y aura plusieurs ceintures à aller chercher et c’est là qu’il faudra très vite se placer.
Dans un monde idéal, affronter un Charlo ou un Castano avec les quatre ceintures en jeu serait votre rêve ultime dans la boxe?
Bien sûr. Affronter un mec comme Charlo aujourd’hui, c’est comme les boxeurs qui voulaient combattre Floyd Mayweather à l’époque. Tu boxes le meilleur. Et là, ce sera celui qui aura les quatre ceintures, le champion incontesté. Ce serait plus qu’une satisfaction. Tu peux être champion du monde et même champion du monde unifié. Mais avoir la chance de boxer pour les quatre ceintures et de pouvoir les remporter, c’est quelque chose de fou. Tu es à jamais gravé dans l’histoire de notre sport. On en a vu des champions du monde, il y en a beaucoup et on a parfois tendance à les oublier. Mais les mecs qui ont remporté les quatre ceintures, on ne les oublie pas. C’est ce genre de combats qui permettent de marquer l’histoire.
Autre question de boxe fiction: Charlo devient champion incontesté mais perd une ceinture, par exemple la WBA, car il ne veut pas affronter son challenger obligatoire et vous finissez par remporter ce titre. Vous considéreriez-vous comme champion du monde ou un Charlo qui aurait encore deux ou trois ceintures serait-il le vrai champion de la catégorie?
Je serais champion du monde. Mais on va dire champion d’une partie du monde, pas du monde entier. (Rires.) Pour être vraiment champion incontesté, selon moi, il faudrait quand même battre le mec qui aurait plus de ceintures que moi. Battre ce qu’on appelle le champion linéaire.
Aujourd’hui, quand vous voyez Charlo ou Castano, est-ce que vous vous dites que vous êtes déjà au niveau et iriez-vous les affronter tout de suite si on vous en donnait la possibilité?
Je pense qu’il me faut encore quelques combats. Techniquement parlant, sur le pur niveau pugilistique, je n’ai rien du tout à leur envier. Là, j’ai encore quelques trucs sur lesquels je travaille, notamment la préparation physique, prend un peu plus en masse, etc. Sur la boxe, selon moi, je suis au-dessus. Mais je dois prendre en puissance, travailler certains petits trucs. Et quand j’aurai réussi, ce qui n’est pas le plus dur car le plus dur reste la boxe, et ça je l’ai, je serai prêt à affronter tous ces mecs-là. Je dois juste travailler sur ces détails qui vont me permettre de mieux transférer la puissance, d’être encore beaucoup mieux sur le ring. Mais on y est presque, c’est une histoire de très peu de combats.
Quand vous voyez l’affiche de ce week-end, êtes-vous déjà impatient d’arriver à ce niveau où vous pourrez tenter de devenir champion du monde?
Bien entendu. D’autant que j’ai encore passé un cap mental. J’ai beaucoup grandi avec mon dernier combat et je suis encore plus motivé, j’ai très envie d’être là où ils sont. Quand on voit un tel combat, ça donne envie. Comme la première fois où j’avais été au Madison Square Garden en tant que spectateur et que je me disais que j’aimerais y combattre, ce que j’ai fait par la suite. J’aimerais bien être à leur place et je ferai tout pour y être. Et ce ne sont pas que des paroles, je ferai vraiment tout. Quand on a cette détermination, il suffit juste de mettre tous les ingrédients, bosser comme il le faut et continuer de faire ce qu’il y a à faire pour monter. C’est une histoire de quelques combats.
Une dernière question plus personnelle, avez-vous des informations sur votre prochain combat?
Je suis prévu sur la carte du gros combat de poids lourds entre Anthony Joshua et Oleksandr Usyk, le 25 septembre, qui devrait se faire dans le stade de Tottenham.