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Boxe: Yordenis Ugas, l’homme qui veut encore choquer le monde (et enterrer un choc ultra attendu)

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Champion WBA des welters, Yordenis Ugas affronte l’Américain Errol Spence Jr, détenteur des titres WBC et IBF, pour un choc d’unification à trois ceintures ce week-end au Texas (en direct à partir de 3h dans la nuit de samedi à dimanche sur RMC Sport 1). L’occasion pour le Cubain de déjouer une nouvelle fois les pronostics quelques mois après avoir envoyé Manny Pacquiao à la retraite. Et de priver la boxe du très attendu combat entre Spence et Terence Crawford.

La plupart des spécialistes pronostiquent sa défaite car moins rapide, moins puissant, moins bon sur le jeu de jambes, le jab ou la défense. Il boxera "à l’extérieur", dans cet AT&T Stadium maison des Dallas Cowboys (NFL) qui accueille son adversaire – résident texan – pour la troisième fois sur ses quatre derniers combats. A l’heure du plus gros rendez-vous pugilistique de sa carrière, une unification à trois ceintures mondiales chez les welters contre le champion WBC-IBF Errol Spence Jr, Yordenis Ugas ne semble pas avoir grand-chose qui aille dans son sens. Mais le combattant cubain (27-4, 12 KO), 35 ans, n’en fait pas une montagne. Au contraire.

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Beaucoup l’imaginaient déjà perdant avant de le voir battre Manny Pacquiao sur décision unanime en août dernier pour la ceinture WBA Super des welters et envoyer la légende philippine à la retraite. Alors pas de raison d’avoir peur… "Je me suis souvent retrouvé dans cette situation où je suis l’outsider, comme dernièrement contre Pacquiao, mais je sais comment le gérer et ce que j’ai à faire dans le ring, lance-t-il sur le site du magazine The Ring. J’ai pris confiance après la victoire sur Pacquiao. Ça a renforcé ma foi car je savais que de bonnes choses allaient se passer quand je me retrouverais avec lui dans le ring. J’ai le même pressentiment avant ce combat: des bonnes choses vont arriver quand je vais combattre Spence."

S’il affiche aujourd’hui une confiance XXL, Ugas aura dû attendre pour éclore au plus haut niveau. Produit de l’école amateur cubaine, avec laquelle il a remporté l’or mondial en 2005 et le bronze olympique en 2008 à Pékin, où il avait été surpris en demi-finale par le Français Daouda Sow, ce fils unique laisse ses parents derrière lui et quitte son île en 2010 pour rejoindre les Etats-Unis (sur un raft) dans le but de gagner sa vie dans le ring et de devenir champion du monde. Mais son début de carrière chez les pros n'est pas à la hauteur de ses espoirs. En 2014, après deux défaites de rang contre Emanuel Robles et Amir Ahmed Imam, il songe même très fortement à prendre sa retraite et connaît des moments difficiles sur le plan psychologique. Mais une pause de plus de deux ans lui redonne un second souffle.

Après huit victoires de rang, une première chance mondiale s’offre à lui en mars 2019 contre Shawn Porter, alors champion WBC. Une défaite sur décision partagée alors que beaucoup l’avaient vu gagnant mais surtout un ticket d’entrée pour sa place à la table des meilleurs welters de la planète. Deux victoires plus tard, il s’offre le titre "régulier" WBA en battant Abel Ramos avant d’être promu champion "Super" (le plus haut niveau pour cette organisation) à la place d’un Pacquiao trop inactif au goût de la WBA. Puis de légitimer son statut en battant le futur candidat à l’élection présidentielle philippine. Ugas est désormais un vrai champion du monde. Et il le doit en partie à… Spence, qui devait affronter Pacquiao l’été dernier avant d’être privé du choc pour un décollement de la rétine à l’œil gauche et remplacé par le Cubain.

Yordenis Ugas (de face) lors de son combat face à Manny Pacquiao en août 2021
Yordenis Ugas (de face) lors de son combat face à Manny Pacquiao en août 2021 © AFP

Plus monté sur le ring depuis décembre 2020, quand il avait battu Danny Garcia sur décision unanime après déjà plus d’un an sans combattre suite à un gros accident de voiture, l’invaincu américain (27-0, 21 KO) doit prouver qu’il peut retrouver son meilleur niveau suite à ces embûches sur son parcours. Mais pas de quoi pousser les observateurs à ne pas le mettre favori. Frustrant pour son adversaire, évoqué par Spence comme "un grand guerrier"? Celui qui semble avoir enfin trouvé la bonne formule pour sa carrière pro répond par un autre mot: motivant. "Spence est très compliqué à combattre. Il a une mentalité agressive, il avance tout le temps sur vous et il veut faire des dégâts 100% du temps. Mais je sais comment gérer ça. Je sais que je suis un meilleur combattant que je ne l’étais avant Pacquiao. Je suis rempli de beaucoup plus de confiance et j’ai de nouvelles armes à montrer."

Avec sa capacité à maîtriser la distance, son très bon jab et ses qualités en contre, le Cubain a toujours su gérer les "fausses pattes" (boxeurs gauchers) comme Spence, à l’image de ce qu’il a su faire contre Pacquiao, contre qui il a touché avec 60% de ses coups puissants contre… 16% pour le Philippin. Face aux gauchers, l’orthodoxe Ugas présente ainsi un bilan de 6-1. Mais le champion WBC-IBF, plus grand, avec plus d’allonge et dont le jab est également très efficace, a les outils pour s’en sortir. Pas grave: Ugas a quelque chose en plus selon lui. "Je sais que je combats pour quelque chose bien plus grand que moi. Errol Spence combat pour Errol Spence. Moi, je combats pour tout un pays, pour mon peuple de Cuba. C’est ce qui me motive tous les jours."

Avec ce supplément d’âme apporté par toute une nation, il s’annonce prêt à déjouer les pronostics comme lors de son dernier combat. "Battre Pacquiao est un moment qui a changé ma vie et j’ai devant moi un autre champion à battre. Je vais encore choquer le monde. Je crois en mes qualités pour le faire. Je suis un champion, un guerrier qui répond à l’appel du gong et aux challenges les plus difficiles. Je suis prêt pour tout ce qui vient sur mon chemin. Je combats depuis que j’ai six ans et j’ai commencé à gagner des championnats à dix ans. Ce n’est pas quelque chose de nouveau pour moi. Je vais laisser mon sang, ma sueur et mes larmes sur ce ring pour gagner."

S’il y parvient, Yordenis Ugas n’aura pas seulement créé une nouvelle surprise. Il aura privé le monde de la boxe d’un des combats les plus attendus des dernières années, un choc entre Spence et un autre Américain invaincu qui fait partie des meilleurs combattants de la planète, Terence Crawford, champion WBO de la catégorie. Ce serait frustrant pour les amoureux du noble art. Mais il aurait alors bien mérité d’être l’homme opposé à Crawford pour l’unification totale à quatre ceintures des welters.

https://twitter.com/LexaB Alexandre Herbinet Journaliste RMC Sport