Insultes en ligne, pression en salle d'échauffement, exfiltration... Le lutteur français Ibrahim Ghanem menacé par des Iraniens après un combat aux Championnats du monde

Ibrahim Ghanem a la tête lourde ce dimanche. Il regrette d’avoir laissé échapper un deuxième titre mondial des moins de 72 kilos en lutte gréco-romaine après avoir mené 2-1 dans sa finale face à l’Azerbaïdjanais Ulvu Ganizade. Lourd aussi d’avoir été pris pour cible par des Iraniens furieux de la manière dont il avait sorti leur chouchou, Seyed Sohrabi en quart de finale.
"Sur Instagram, en 20 minutes, j’ai reçu plus de 5.000 commentaires sur ma photo, que des insultes. Puis 10.000 autres, je ne comprends pas", raconte à RMC Sport le lutteur d’origine égyptienne depuis Zagreb.
Un déferlement de haine
"Un sauvage", "Il devrait être jugé pour crime de guerre"... Voici le genre de messages qu’il a pu lire. Les fans perses, où ce sport est très important, déversent leur haine à torrent. Le combat entre Ghanem et Sohrabi a donné lieu à un drôle de scénario vendredi. Au début de leur affrontement, Sohrabi se met à saigner au visage après un coup involontaire de Ghanem. L’équipe médicale arrive. En cumulé sur un match, elle peut intervenir sur un saignement pendant quatre minutes, pas une seconde de plus. Le visage du champion d’Asie se réouvre plusieurs fois. En fin de deuxième période, alors que le Tricolore mène 4-2, le compte à rebours arrive à zéro. Ghanem passe en demi-finale sur cet article du règlement.
Les Iraniens l’accusent d’avoir sciemment donné des coups à la face. "Il est très fort, c’est un match serré. On se bagarre sur les mains, il y a des chocs. C’est de la lutte, se défend Ghanem. C’est le point de départ de l’entreprise de déstabilisation. "Je suis resté une journée dans le stress à cause de ça. Les médias iraniens ont parlé de ça. Les Iraniens m’ont envoyé des messages, ils ont envoyé quelqu’un en salle d’échauffement et le coach iranien m’a mal parlé. Il a aussi mal parlé à mon coach."
Une influence sur sa finale?
En conséquence, une personne de la fédération accompagne Ghanem partout entre la salle et l’hôtel jusqu’à sa finale prévue le lendemain. Lorsqu’il arrive dans la salle croate pour le match pour l’or, le Français est accueilli par des bordées de sifflets des nombreux fans iraniens. "Ce n’était pas de la peur mais cette histoire m’a atteint mentalement, m’a sorti du moment", analyse-t-il. Est-ce que cette affaire a eu des répercussions sur l’arbitrage de la finale face à Ganizade samedi? Ghanem le croit.
Face à son plus grand adversaire, il écope de deux points de pénalité pour un coup au visage. Une décision venue d’en haut selon lui. La conséquence du match face à Sohrabi? "Bien sûr! Je ne comprends pas. J’ai dit que je ne l’avais pas touché, qu’il était blessé au visage avant la finale. L’arbitre ne me prévient pas qu’il va me pénaliser. Normalement, tu as d’abord un avertissement. Derrière la table, le chef des chefs des arbitres dit de me pénaliser de deux points. Deux points c’est pour une vraie faute."
Mené 3-2 puis 4-2 après un challenge vidéo perdu, il ne reviendra pas. Son visage traduit l’agacement. Au coup de sifflet final, il reste longtemps un genou sur le tapis, prostré. "Je suis partagé entre deux sentiments. Le bon, c’est ma troisième finale mondiale en trois ans. D’un autre côté, je suis triste. Je perds le deuxième titre mondial. Il était vraiment important pour moi. J’ai ces deux choses dans mon cœur", explique Ghanem. Après la descente du podium, Ghanem ne rentre pas à l’hôtel officiel avec le reste des combattants. Il préfère monter seul dans un minibus. "Après ça, on va oublier, prendre des petites vacances, faire une petite fête et on va recommencer à s’entraîner. On n’a pas le choix", conclut-il.