
Melbourne, la tête à l’envers

Rafael Nadal et Roger Federer, finalistes l'an passé à Melbourne. - -
Federer et Nadal font de la résistance
« J'ai toujours aussi faim. » Les jeunes impudents sont prévenus, Roger Federer n’est pas encore prêt à céder son trône. Sa double quête du record de victoires en Grand Chelem (15) et de sacre à Roland-Garros accomplie en 2009, on pouvait imaginer le Suisse moins vorace pour la saison à venir. Plus dispersé aussi par les joies de la paternité avec ses deux jumelles. Mais l’appétit de jeu et de records de sa Majesté fait apparemment bon ménage avec le pouponnage. « Je n'ai pas fait que du "baby-sitting" ces derniers mois », rigole-t-il. En ligne de mire désormais : le record de semaines passées à la première place du classement mondial (286) et d’années conclues en tête (6), tous deux détenus par Pete Sampras. Et un Grand Chelem réussi sur une année civile ? Un objectif suprême qui débute par la reconquête de son titre australien, abandonné les larmes aux yeux à Rafael Nadal l’an passé. L’Espagnol de 23 ans est lui aussi en reconquête à Melbourne. Absent des palmarès ATP depuis mai dernier, le tenant du titre garde son calme et compte bien prouver qu’il n’est pas le joueur usé avant l’heure qu’on décrit parfois. « Tout ce que je sais, c'est que si je joue bien, j'ai une chance de l'emporter. Le reste... » Elémentaire.
Del Potro, Djokovic, Murray, Davydenko et les autres...
Si le monstre à deux têtes Federer-Nadal a finalement maintenu son joug en fin de saison dernière, Rafael Nadal lui-même estime qu’une bonne dizaine de joueurs sont candidats à un titre majeur cette année. Juan Martin Del Potro (21 ans) a montré la voie lors du dernier US Open en arrachant un trophée que Federer tenait solidement entre ses mains depuis 2004. Vainqueur de quatre Masters 1000 en 2009, Andy Murray (22 ans) s’est lui glissé quelques semaines à la deuxième place avant de rentrer dans le rang. Sur la terre de son unique succès en Grand Chelem, Novak Djokovic (22 ans) peut reprendre sa marche vers un sommet qui lui paraissait promis il n’y a pas si longtemps. Mais les jeunes loups devront aussi se coltiner deux vieux briscards rassérénés. A 28 ans, Nikolay Davydenko est dans la forme de sa vie. Il vient ainsi d’enlever le Masters 1000 de Shanghai, le Masters de Londres et le tournoi de Doha en trois mois. Le tout en écartant tout ce qui se fait de mieux sur le circuit, dont trois fois Nadal et deux fois Federer, qui l’avait battu lors de leurs douze premières confrontations ! Ne reste plus qu’à tenir la distance sur quinze jours et sept matchs au meilleur des cinq sets. Six mois après sa finale épique perdue 16-14 au cinquième set à Wimbledon contre Federer, Andy Roddick (27 ans) ne désespère pas d’ajouter un deuxième titre du Grand Chelem à son palmarès. Même Lleyton Hewitt (29 ans) s’est promis d’en regagner un avant de raccrocher. Sur ses terres ?
Des Français en ordre dispersé
Jo-Wilfried Tsonga et l’Australie, c’est une histoire qui tourne. Finaliste en 2008 et quart de finaliste en 2009, c’est sans doute à Melbourne que le Manceau a le plus de chances de mettre fin à plus de 26 ans de disette française masculine en Grand Chelem. Sa finale à l’exhibition de Kooyong – perdue contre Verdasco – l’a rassuré sur son niveau de jeu et l’état de son poignet abîmé en fin de saison. En délicatesse avec une épaule, qui l’a contraint à renoncer au tournoi de Sydney cette semaine, Gaël Monfils arrive sans grand repère. Mais le Parisien a l’habitude de jongler avec les blessures, surtout dans les grands rendez-vous. Il espère ne pas revivre la mésaventure de son abandon l’an passé en huitième de finale contre Gilles Simon, qui a déclaré forfait pour cause de genou insuffisamment remis. Reste le mystère Gasquet, finaliste malheureux samedi à Sydney mais qui ne semble pas encore armé pour tenir la cadence d’une quinzaine de Grand Chelem. Les Françaises tenteront de combler le vide laissé par la néo-retraitée Amélie Mauresmo. Et notamment Marion Bartoli, qui a opté pour une préparation sans le moindre tournoi de… préparation et vise au moins un deuxième quart consécutif en Australie. La deuxième semaine semble un objectif raisonnable pour Virginie Razzano et Alizé Cornet. Mais la surprise pourrait se nommer Aravane Rezaï, qui a bien failli s’offrir le scalp de Serena Williams en demi-finale à Sydney. Une performance inachevée mais prometteuse. On n’oubliera pas le come-back, sous forme de rappel, de Fabrice Santoro, histoire de faire un compte rond en Grand Chelem (70) et de boucler 22 ans de carrière. Définitivement, cette fois.
Enfin des vraies patronnes ?
Le visage du tennis féminin en 2010 risque de ne ressembler que de loin à celui de 2009. Après s’être désespérément cherché une patronne, le circuit WTA a retrouvé de sérieuses candidates au poste. Pour peu que les sœurs Williams -Serena est tenante du titre à Melbourne- se branchent sur courant continu, la bataille devrait faire rage avec les deux revenantes belges Kim Clijsters et Justine Henin. Après avoir créé la sensation en remportant l’US Open en septembre dernier, pour son troisième tournoi seulement, Clijsters (26 ans) a confirmé en s’imposant la semaine passée à Brisbane aux dépens de… Henin (27 ans), au terme d’une finale d’anthologie qui fleurait bon le milieu des années 2000. Une mauvaise nouvelle pour la n°2 mondiale Dinara Safina, qui court toujours après son premier sacre en Grand Chelem. Mais aussi pour la relève emmenée par Caroline Wozniacki (19 ans), Viktoria Azarenka (20 ans) et Agnieszka Radwanska (20 ans).