Lemaitre remet le bleu de chauffe

Passé la déception de sa finale du 100 m, Christophe Lemaitre a rechaussé les pointes en vue du 200 m - -
« Christophe est passé à autre chose », affirme Pierre Carraz, son entraîneur à distance, resté à Aix-les-Bains (Savoie), base d’entraînement du sprinteur. La quatrième place sur l’épreuve reine n’est plus qu’un souvenir, comme l’assure à son tour Renaud Longuèvre, le référent, l’homme qui, à coup de Skype, joue les relais auprès du sprinteur en Corée du Sud. « Il n'y a pas d'amertume chez Christophe mais plutôt de la frustration, il sort renforcé des échecs. » L’athlète de 21 ans s’est reposé ces derniers jours, avant de reprendre l’entraînement. « Après la finale du 100 m, il a retrouvé ses copains de chambre Pierre-Alexis Pessoneaux (avec qui il s'entraine à Aix-les-Bains) et les autres membres du relais 4x100 m.
Lundi, ce fut repos et récupération et aujourd'hui en fin de journée, une première séance d'entrainement en vue du 200 m. Sur la piste, il a travaillé le virage sous les yeux de Longuèvre qui filmait chaque passage pour les lui repasser en boucle. « Christophe ne vire pas bien, analyse Carraz. Il a encore une grosse marge de progression, même s’il est plus un coureur de 200 m que de 100 m, parce qu’il finit toujours fort. » Champion d’Europe sur les deux distances, le Savoyard a débarqué à Daegu avec la conviction qu’il avait plus de chances sur 200 m (record personnel à 20’’16 ; meilleure performance de la saison à 20’’21). « C’est là que j’ai un coup à jouer » déclarait-il avant de s’envoler à Roissy. Le destin (forfaits de Gay et Powell, contrôles positifs pour Mullings et Rodgers, disqualification de Bolt) avait soudain ouvert un boulevard sur le 100 m, mais comme il le confiait lui-même : « En temps normal, je n’aurais pas dû passer en finale ». L’athlète et son coach savent pertinemment que cette médaille en chocolat n’est pas toute entière à jeter. « Vu les circonstances de la course, on aurait pu envisager une 3e ou une 2e place, mais on aurait signé des deux mains avant les Mondiaux pour une 4e place », résume Carraz.
Carraz : « Christophe est très lucide, il est passé au 200 m »
Lemaitre a donc remis le bleu de chauffe en vue de « son » rendez-vous, celui qu’il avait coché sur son agenda. Après la déception du 100 m, le sprinteur et son entraîneur n’ont pas changé leurs habitudes, et encore moins de discours. Et pour cause. « Christophe est un taiseux, avec lui, je fais souvent les questions et les réponses », s’amuse Carraz. Il parle peut, il faut le laisser comme ça. » Un caractère introverti connu des parents. « Depuis Barcelone (et sa triple couronne continentale en 2010), on voit qu’il a muri, c’est un jeune homme plus ouvert », se félicitaient récemment Christian et Marie-Thérèse.
A 21 ans, l’apprenti jeune homme a les limites de son âge. « Ils ont peut-être fait les fou fou avec Vicaut quand ils ont vu qu’ils étaient tous les deux en finale du 100 m », glisse Carraz. Avant le grand rendez-vous du 100 m, l’entraîneur historique de Lemaitre n’a pas reconnu son poulain. « Dans les blocks, il n’avait pas les mêmes mimiques que d’habitude, il n’y était pas… » Langage de gestes entre les deux Savoyards. Pour autant, le coach est catégorique sur la capacité de rebond de son élève. « Christophe est très lucide, il est passé au 200 m, il aura envie de prouver qu’il vaut mieux que ça. » Avec peu de mots, comme à son habitude.