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Les explications du président de la Fédération française d’athlétisme sur les dossiers chauds

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André Giraud, le président de la Fédération française d’athlétisme, a répondu ce lundi aux questions de RMC Sport sur la nomination de Florian Rousseau, la position du DTN, le cas Claude-Boxberger et la suspension de la Russie.

André Giraud, pourquoi avez-vous nommé Florian Rousseau, ancien cycliste sur piste et triple champion olympique, au poste de directeur de la très haute performance ?

Florian Rousseau va occuper le poste de directeur de la très haute performance, au niveau de la Fédération française d’athlétisme. C’est un nouveau positionnement au sein de la Fédération, dans l’organisation de la Fédération. C’est un projet novateur qui va dans le sens de la réforme souhaitée aujourd’hui par le gouvernement et l’Agence nationale du sport. Les mauvais résultats obtenus à Doha nous ont amenés à débriefer très rapidement avec Claude Onesta et l’Agence nationale du sport pour savoir ce qui n’avait pas marché. Et avec le DTN et les équipes. Nous avons travaillé depuis de longues semaines puisque notre première rencontre avec la ministre (des Sports, Roxana Maracineanu) le 8 octobre, le lendemain de notre arrivée. Nous avons eu tout un processus de travail pour arriver à procéder quelque chose de cohérent, avec un cadre d’Etat qui connait très bien le haut niveau, qui a été patron de la préparation olympique, qui connait parfaitement l’athlétisme pour l’avoir accompagné entre 2013 et 2017. Florian, que je connaissais aussi par rapport à ses qualités humaines, ses qualités de manager, est pour moi l’homme de la situation aujourd’hui pour préparer Tokyo dans de bonnes conditions.

Patrice Gergès, le DTN, est-il en danger ?

Il n’y a pas de mise à l’écart du DTN. Le DTN reste le DTN avec toutes ses prérogatives. Je pense que l’erreur qui est commise depuis plusieurs années, ça ne date pas d’aujourd’hui, c’est qu’à la Fédération française d’athlétisme, qui est un sport complexe avec plusieurs disciplines, le DTN n’est pas l’homme de toutes les situations. Il ne peut pas travailler à la fois sur la détection, le développement, le renforcement de la lutte contre le dopage et être à la fois le manager du très haut niveau. Donc on fait comme de nombreuses fédérations. Au tennis, ce n’est pas le DTN le capitaine de la Coupe Davis, de la Fed Cup. En football, il y a Didier Deschamps. En rugby, il y a Fabien Galthié. Dans tous les sports, il y a un DTN et quelqu’un qui gère le très haut niveau. Nous avons fait ce choix. C’était le moment de le faire. Le sport français est en pleine rénovation.

Est-ce un choix dicté par la ministre des Sports, Roxana Maracineanu ?

Je l’affirme haut et fort : c’est le choix du président. Personne ne m’a dicté ce choix. Les seuls contacts que nous avons eus, et ils ont été nombreux, c’est avec Claude Onesta. Ça a été, dans un premier temps, de la réflexion pour voir ce qui n’a pas marché aujourd’hui dans l’accompagnement de l’équipe de France. Ensuite, n’oublions pas que les fédérations sont autonomes. La volonté du gouvernement et de la ministre, c’est de donner plus d’autonomie aux fédérations. Donc il n’y avait aucune raison que le choix soit imposé par la ministre, pas plus que par Claude Onesta. Dans un premier temps, nous avons fait le choix de l’organisation à mettre en place. Ensuite, il a fallu faire le choix des hommes. Et le choix de l’homme m’appartient.

Pourquoi ne pas avoir fait ce choix avant Doha si vous pensiez qu’il manquait un maillon à la chaîne ?

Oui, pourquoi ne pas l’avoir fait avant Doha… Parce que je me suis laissé entraîner dans les anciennes habitudes de la Fédération. Ghani Yalouz venait de l’extérieur et il a réussi par son management. Mais il avait à côté de lui des DTN adjoints qui faisaient fonctionner les territoires. Donc il y avait deux personnages qui faisaient fonctionner le sportif. Moi, j’ai pensé qu’un seul pouvait le faire. Comme ce qui a été fait par mes prédécesseurs, bien avant. A chaque fois que nous avons mis en route ce système, ça ne marchait pas. Donc aujourd’hui, la rénovation du sport français nous permet de le faire. Je pense qu’on ne parle pas d’armée mexicaine au football, au rugby, au handball. On regrette la performance des filles au handball, malheureusement. On ne parle pas d’armée mexicaine. Il y a un sélectionneur, un accompagnateur, un DTN. C’est ce modèle que nous avons construit avec Claude Onesta. Le DTN est en parfait accord avec cette organisation. Il va pouvoir se consacrer maintenant à des missions beaucoup plus structurantes sur l’ensemble du territoire. Il a des idées qui me plaisent bien. Nous avons un très bon DTN, qui connait parfaitement l’athlétisme. C’est pour ça qu’il n’a jamais été question de s’en séparer.

Comment gérez-vous le dossier d’Ophélie Claude-Boxberger ? La Fédération est muette…

On n’a pas la main sur le dossier. C’est normal. Il y a une agence indépendante qui gère tous les cas de dopage. L’affaire Boxberger est entre les mains de l’AFLD et de la gendarmerie, via l’OCLAESP. A partir de là, n’ayant aucun élément sur ce dossier, il est difficile de se prononcer. Si ce n’est que comme vous, je découvre des interviews, des prises de position. Laissons l’enquête se dérouler. Le seul regret que j’ai, mais qui n’est pas spécial à cette affaire, c’est que dans notre pays, dès qu’il y a des affaires judiciaires en cours, ça peut être très long. Sous l’ancien système, les fédérations avaient la main sur ces affaires et on réglait les cas de dopage en quatre mois maximum, puisque ça nous était imposé. Aujourd’hui, l’affaire Calvin, ça fait huit mois et ça n’est pas réglé. Ça peut durer encore des années. J’espère que pour l’affaire Boxberger, on va laisser le temps aux instructeurs de travailler, mais qu’on aura assez rapidement quand même des conclusions. A l’heure qu’il est, la Fédération n’a reçu aucune notification concernant Ophélie Boxberger. Aujourd’hui, pour nous, elle n’est pas suspendue. On n’a pas de notification officielle.

Ophélie Claude-Boxberger et son compagnon Jean-Michel Serra expliquent qu’ils ne reçoivent pas de réponse de votre part…

Oui, je confirme. Je crois que j’ai reçu deux mails et un SMS. On est dans un pays de droit. Il y a aujourd’hui une instruction en cours. Je n’ai aucun élément du dossier. Je pense que mon devoir, c’est de protéger l’institution de la Fédération française d’athlétisme. A partir du moment où des gendarmes ont procédé à des gardes à vue, que l’AFLD s’occupe du dossier, je n’ai à aucun moment pensé à mettre la Fédération à la faute. Je n’ai pas de jugement à porter aujourd’hui. Je ne veux pas non plus que la Fédération soit accusée à un moment donné de s’immiscer dans un dossier dont elle n’a pas été informé officiellement, si ce n’est par les médias.

Comment jugez-vous la suspension de la Russie pour les Jeux olympiques pour quatre ans ?

L’athlétisme s’est déjà positionné au niveau international au sujet de la Russie. Cela fait déjà plusieurs années que les Russes sont exclus. On ne peut qu’approuver cette décision. Ça veut dire que l’AMA a bien constaté que la lutte contre le dopage en Russie n’était pas la même que dans d’autres pays. Je respecte cette décision. Je pense que c’est une décision courageuse de l’AMA. On peut se réjouir que chez nous, même si on est atteint par ce fléau, la lutte contre le dopage fonctionne. Si ça ne fonctionnait pas, on pourrait se retrouver dans le cas de la Russie.

LP avec Aurélien Tiercin