Pascal Martinot Lagarde : stop mais encore ?

"Je l'accompagne du mieux possible, mais sans se mettre la rate au court-bouillon comme on le fait depuis 10 ans" avoue Benjamin Crouzet, l'entraîneur historique de Pascal Martinot-Lagarde. "Il est à l'écoute de ses sensations, sans se prendre la tête. Il y a moins d'entraînements, moins de kiné. Cela lui va bien. Moi, ce que je veux, c'est qu'il parte heureux et accompli". PML est sur la fin. "Il ne faut pas se leurrer" admet le principal intéressé. "L'année olympique s'est tellement mal passée que je m'étais convaincu que je ne pouvais pas mener deux projets à la fois." Outre l'objectif évident de qualification pour les Jeux de Paris, Martinot-Lagarde a lancé depuis plusieurs années avec sa femme une entreprise de location d'appartements. "Après ma non-qualification aux Jeux, j'avais acté ma fin de carrière. Je pouvais me consacrer à 100% à ma boîte. Mais j'ai constaté que je n'étais pas plus productif sans avoir entraînement. J'ai pris conscience que le sport te fait mieux dormir, ça donne la pêche. J'en ai encore besoin".
"J'ai quitté le sport pression, celui qui empêche de dormir"
Pascal Martinot-Lagarde a "quitté le sport pression, celui qui empêche de dormir" pour basculer vers un "sport plaisir". Après sa victoire au meeting de Metz en 7.66 la semaine dernière, PML a commencé à ressentir les choses évoluer. "Les défaites ne me font plus mal du tout, si ça marche, c'est cool, sinon je m'en fous complètement. Mais si j'ai l'occasion de faire des minima et de porter encore le maillot de l'équipe de France, je ne vais pas me priver. S'il faut embêter les Suisses, les Hollandais, les Polonais, je serai là". Le hurdler aux 12 médailles internationales ne pensait pas si bien dire. Lors du meeting de Bercy, il termine quatrième de la finale en 7.54. Soit les minima pour les Europe d'Apeldoorn validés, et PML s'approche à deux centièmes des Mondiaux de Nanjing.
PML tout proche d'une 32e sélection internationale
"Surprise, c'est le mot, je ne m'attendais pas à faire une performance comme ça. J'ai vraiment cru que j'étais fini, cela faisait un moment que je faisais de la figuration. Dans l'idée, j'estimais que j'étais vieux et que c'était bientôt la fin. Je voulais m'amuser et faire des performances au niveau des minima. Mais je parlais des Europe, là je suis tout proche des Mondiaux. J'ai remis une pièce dans la machine". Pour le championnat continental, PML a vraiment gagné le droit de rêver. Car la Fédération Française d'Athlétisme va emmener trois hurdlers, sachant qu'en plus de lui, seuls Wilhem Belocian et Just Kwaou-Mathey ont réussi les minima pour le moment. Pour les championnats du monde en salle, c'est plus compliqué car PML doit valider 7.52 et il n'y a que deux places à pourvoir sachant que Belocian et JKM ont aussi potentiellement leur billet. Sans oublier que Sasha Zhoya n'a pas complètement renoncé à faire une saison en salle. En attendant de savoir ce que fera le Franco-Australien, Just Kwaou-Mathey, qui revient d'une déchirure au tendon d'Achille, n'est pas sûr de forcer cet hiver non plus. "Mes objectifs, c'est juste d'aller vite, je prends ce qu'il y a à prendre. Je vais aller aux championnats de France mais je n'ai pas en tête de faire les Europe ou les Monde". Avec cette combinaison d'évènements, PML a une vraie chance de revêtir le maillot Bleu une dernière fois.
"Je ne veux pas finir par la petite porte"
Pascal Martinot-Lagarde n'est donc pas encore uniquement un chef d'entreprise. Le hurdler aux douze médailles internationales (Champion d'Europe 2018, médaillé de bronze mondial 2019, triple vice-champion du monde en salle notamment) mérite une sortie à la hauteur de son talent. "Je ne veux pas finir par la petite porte, en balançant un tweet. Je ne fais pas l'athlète qui se cache. Je fais des 'demi au revoir'. Il y a une chance sur deux pour que 2025 soit la dernière saison". PML devra terminer sur le podium des championnats de France de Miramas les 22 et 23 février pour vivre une dernière sélection avec la France. Et ses adversaires ne l'ont pas encore totalement enterré. Wilhem Belocian, meilleur français cet hiver pour l'instant, admire son aîné. "Pendant l'hiver, c'était vraiment le patron. Je le voyais comme un acharné, un guerrier. Quand il était sur une ligne de départ en finale, tu savais qu'il allait prendre une médaille. Il pouvait faire une saison merdique de fou, le jour J il prenait une médaille quand même. C'est ce que je kiffais chez lui". Même s'il parle au passé, le Guadeloupéen respecte évidemment Martinot-Lagarde, qui sur le papier aimerait terminer au meeting de l'ES Montgeron au mois de mai, son club de toujours. Et quoi qu'il arrive ce jeudi soir à Liévin, il ne regrettera rien. "Pour Bercy, la Fédé voulait me rendre hommage, je m'attendais à une vidéo. Quand j'ai vu ma petite famille débarquer sur la piste, les larmes sont montées. C'est le genre de moment dont on se rappelle toute une vie".