Prost : « Le Grand-Prix de France, un problème strictement économique »

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Alain, quelle analyse faites-vous sur la saison de F1 qui vient de s’achever et plus précisément sur le titre de Sebastian Vettel ?
Cette année a d’abord été marquée par la domination de l’écurie Red Bull, double championne du monde des constructeurs et des pilotes, mais aussi par les performances individuelles de Sebastian Vettel. Les dix pole-positions acquises par le jeune Allemand donnent du crédit au sacre mondial, bien qu’il ne soit pas le pilote ayant réalisé le plus de meilleurs tours en course (Hamilton devance Vettel avec cinq meilleurs tours contre trois, ndlr). Avec trois succès lors des quatre derniers Grands-Prix, l’Allemand prouve qu’il mérite de succéder au Britannique Jenson Button, sacré en 2009. Les quatre prétendants (Hamilton, Webber, Alonso et Vettel) au championnat auraient tous pu légitimement prétendre à la victoire finale, mais l’Allemand a su limiter les fautes en combinant talent et panache.
Que pensez-vous de la stratégie de l’écurie Ferrari sur le dernier Grand Prix à Abu Dhabi ?
Stefano Domenicali, le directeur sportif de la Scuderia, s’est trompé de concurrent en choisissant de marquer l’Australien Mark Webber (Alonso possédait huit points d’avance sur Webber et quinze sur Vettel). De mon domicile et avec le même logiciel de calcul des temps utilisé par les écuries, je vous assure que si Mark Webber n’avait pas été gêné par Alguersuari pendant deux tours après son arrêt, Alonso serait ressorti derrière l’Australien. Il s’agit d’une double erreur de la part de Ferrari due à la pression. Lorsqu’on dispute le championnat à quatre on ne peut pas calquer sa stratégie uniquement sur un pilote, surtout avec Vettel aux avant-postes. L’erreur de la Scuderia arrive au plus mauvais moment de la saison. C’est dommage pour Fernando Alonso qui a réalisé une fin de saison de très haut niveau mais d’un autre côté, Vettel mérite davantage ce titre.
Vous suivez avec attention le dossier du Grand Prix de France. Pouvez-vous nous en dire davantage sur l’avancée du projet ?
Le premier projet à Disneyland Paris soulevait trop de critiques évoquant des nuisances pour aboutir. Celui de Flins, dans les Yvelines, possédait toutes les qualités requises pour accueillir un Grand-Prix : un site exceptionnel couplé d’un vrai plan économique. Les F1 n’auraient nui aux écologistes que huit heures dans l’année, et le projet revêt un plan social solide. L’idée a été abandonnée à cause des élections régionales et des complications écologiques et politiques. Aujourd’hui, le problème est strictement économique, le prix d’un plateau de Formule 1 atteint une quinzaine de millions d’euros par an. En France, quel que soit le circuit, la recette billetterie tablerait sur 60 000 personnes payantes, étant donné que les revenus publicitaires sont bloqués. La perte sèche serait de huit millions d’euros pour l’éventuel organisateur. Seuls les politiques peuvent décider d’organiser un Grand-Prix en France. La France qui cherche des promoteurs, c’est une hérésie totale. Moi-même et le groupe Lagardère étions sur les rangs mais le projet économique doit être viable, sinon on ne cherche plus un promoteur mais un mécène…