Prost : « On a aseptisé la F1 »

Prost : « On a aseptisé la F1 » - -
Alain Prost, comme d’autres figures de la Formule 1, vous étiez la semaine dernière au Festival international de l’automobile (28-30 janvier, Invalides, Paris). L’occasion de montrer la proximité entre sport et industrie ?
Il n’y a que les gens qui ne connaissent pas l’automobile pour ne pas comprendre la relation entre la course et la voiture de série. Les constructeurs se dirigent de plus en plus vers des voitures légères et des petits moteurs, c’est exactement la direction que prend la Formule 1 en ce moment avec l’arrivée de nouveaux moteurs en 2013. Il faut prendre le monde de l’automobile dans sa globalité. La course fait partie de son histoire.
La F1 est-elle encore une vitrine pour les constructeurs ?
Quand vous voulez avoir un impact mondial il n’y a pas grand-chose de mieux que la F1. Le problème, c’est qu’à la fin il n’y en a qu’un qui gagne. Celui qui termine quatrième ou cinquième peut se demander pourquoi dépenser des millions pour se faire battre.
Une participation au Championnat du monde peut donc être contre-productive…
Les constructeurs prennent toujours l’excuse de se retirer pour des questions de coût. En réalité, c’est très souvent parce qu’ils ne gagnent pas. Ces dernières années, seuls deux ou trois se battaient pour le titre alors qu’il y avait six ou sept constructeurs présents. C’est un peu trop, et c’est là que se situe le piège.
La Formule 1 n’a-t-elle pas perdu en notoriété ?
C’est sûr. Il y a beaucoup de raisons pour expliquer cela. Il y a eu de très belles bagarres, des évolutions technologiques intéressantes, dont nous avions été les pionniers. Aujourd’hui, on est obligé de tout réglementer, et plus vous mettez de barrières, moins ça intéresse le public. La F1 s’est décalée géographiquement et intéresse désormais beaucoup les pays émergeant plus curieux et plus fortunés. Il est dommage de ne pas avoir gardé une certaine culture de la F1 en Europe. C’est important de rester ici et j’espère que ce n’est que la fin d’un cycle, mais j’ai peur que ça dure encore un peu de temps.
« Il faut des pilotes avec du charisme »
Comment y remédier ?
Le côté humain est très important. Il faut que les pilotes aient du charisme, qu’il y ait des bagarres et de belles histoires humaines. On a un petit peu aseptisé le milieu à un certain moment, ce qui explique aussi une certaine baisse de notoriété.
La France n’a plus de pilote, plus d’écurie et plus de Grand Prix en F1. Peut-elle revenir rapidement ?
Ce ne sera pas facile parce qu’on est vraiment au creux de la vague. Il faut reconstruire quelque chose. En France on n’est pas toujours motivé par cela car on est toujours contre l’automobile ce qui est paradoxal. L’automobile est l’une des plus grandes industries française et dans le même temps nous sommes contre l’automobile, notamment pour des questions d’environnement. Ce n’est pas toujours très objectif.