Championnats du monde de cyclisme 2025: un défi sportif hors norme sur fond de tensions géopolitiques

Jamais les championnats du monde de cyclisme sur route n’avaient posé leurs roues en Afrique. Kigali accueillera le point d'orgue de la saison avec un parcours considéré comme le plus difficile de l'histoire des Mondiaux de cyclsime sur route.
Au programme : 267,4 km pour la course en ligne élite hommes et pas moins de 5 475 mètres de dénivelé positif. À 1 500 mètres d’altitude, les organismes seront mis à rude épreuve.
Un contexte géopolitique inquiétant
Si le Rwanda met en avant sa capacité d’accueil, la réalité sur le terrain est beaucoup plus tendue. Depuis mars 2022, le pays est en conflit avec la République démocratique du Congo. Le mouvement armé M23, soutenu selon Kinshasa par Kigali– ce que le gouvernement de Paul Kagame dément – contrôle désormais une grande partie du Nord-Kivu et des villes stratégiques comme Goma et Bukavu, tombées en 2025.
Les chiffres donnent le vertige : plus de 7 millions de déplacés selon l’UNHCR (Agence des Nations Unies pour les réfugiés, ndlr) et des milliers de victimes civiles. Kigali n’est qu’à une centaine de kilomètres à vol d’oiseau des zones de combats, ce qui alimente l’inquiétude des délégations.
Face aux rumeurs de délocalisation, l’UCI avait tenu à clarifier la situation dans un communiqué :
"Aucun déplacement des Championnats du Monde 2025 du Rwanda vers la Suisse ou tout autre lieu n'est prévu à ce jour", assure l’instance, qui ajoute suivre "de près les développements dans la région est de la République démocratique du Congo".
Coûts exorbitants et forfaits de certaines nations
Au-delà de la sécurité, c’est aussi la facture qui refroidit certaines fédérations. Les Pays-Bas et la fédération danoise ont ainsi décidé de ne pas envoyer de sélection dans les catégories juniors et espoirs
"D’un point de vue purement sportif, nous sommes bien sûr très tristes […] Mais voyager et rester au Rwanda coûte très cher", déplore Morten Bennekou, le manager de la fédération danoise de cyclisme.
Même constat en Belgique, où la directrice générale Nathalie Clauwaert évoque un budget record de 250 000 €, soit 10 % du budget annuel pour la seule participation aux Mondiaux.
Vaccinations, malaria et eau potable : Un protocole sanitaire drastique
Le médecin de la sélection belge, Kris Van der Mieren, a dressé un plan sanitaire impressionnant selon le média Het Laatste Nieuws. Tous les membres de la séléctions ont reçu un protocole complet de vaccination l'hépatite A, le tétanos, la diphtérie, la coqueluche, la polio, la rougeole, les oreillons, la rubéole et la typhoïde
"Chaque membre de la délégation a reçu une série complète de vaccinations […] Même Remco Evenepoel a été vacciné l’hiver dernier, hors compétition."
Le dispositif inclut également la prévention quotidienne contre la malaria, des pulvérisations anti-moustiques, une interdiction des poignées de main pendant quatorze jours et même le recours exclusif à de l’eau embouteillée ou bouillie.
"Ma plus grande crainte reste la rage. Tout coureur mordu sera immédiatement rapatrié", ajoute le médecin, soulignant la rigueur mise en place.
Kigali, terre de cyclisme malgré tout
Si le contexte politique suscite des interrogations, le Rwanda entend profiter de cette vitrine mondiale pour se présenter comme une terre de cyclisme. Ses routes sinueuses, ses montées casse-pattes et son public passionné offrent un cadre unique. Le Tour du Rwanda, devenu une référence de l’UCI Africa Tour, a habitué les spectateurs à voir des équipes WorldTour et ProTeam se frotter à ses pavés et à ses ascensions abruptes.
L’UCI mise sur cette énergie pour faire de ces Mondiaux au Rwanda un moment historique. Plus qu’une compétition, c’est un symbole. Celui d’un cyclisme qui s’ouvre à de nouveaux horizons, malgré les incertitudes.