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Pourquoi la France fait peur

Sylvain Chavanel et l'équipe de France de cyclisme sur route

Sylvain Chavanel et l'équipe de France de cyclisme sur route - AFP

Menée par une nouvelle génération ambitieuse et qui accumule les bons résultats, l’équipe de France se présente au départ de la course en ligne de Ponferrada, ce dimanche, avec de réelles chances de titre mondial. La confirmation de son retour à la table des grandes nations du cyclisme.

La dernière fois, c’était déjà en Espagne. En 1997, autre époque (et autres mœurs) du cyclisme, Laurent Brochard levait les bras à San Sebastian pour devenir le huitième coureur français à revêtir le maillot arc-en-ciel de champion du monde. Dix-sept ans plus tard, le potentiel de voir l’exploit de « la Broche » trouver un successeur n’a jamais paru si grand. A Ponferrada, ce dimanche, sur les 254,8 kilomètres d’un parcours de 14 tours chacun jonché de deux petites difficultés, les neuf coureurs se tricolores se présentent en hydre ambitieuse. Plusieurs têtes pour autant de cartes à jouer.

Un sprint ? Nacer Bouhanni, 24 ans, trois victoires au Giro et deux à la Vuelta, a tout pour prendre part à la bataille des gros bras. Besoin d’un pur puncheur pour faire la différence ? Tony Gallopin, 26 ans, à l’aise sur les courses d’un jour (il a remporté la Clasica San Sebastian l’an dernier), porteur du Maillot Jaune et vainqueur à Oyonnax sur le dernier Tour de France dans une étape au final similaire à celui de Ponferrada, avec une descente sinueuse, possède le parfait profil et semble en belle forme. Une course d’usure qui fait briller ceux qui ont la « caisse » ? Le capitaine Sylvain Chavanel, l’étoile talentueuse Romain Bardet (sixième de la Grande Boucle), l’expérimenté Jean-Christophe Peraud (deuxième du Tour) ou encore Cyril Gautier pourraient tirer leur épingle du jeu.

« On manque peut-être encore de futurs grands rouleurs mais ça va finir. Pour le reste, on a des sprinteurs et des grimpeurs parmi les meilleurs au monde, constate Chavanel. On a un mix de coureurs très intéressant. » Qui mue les rêves les plus fous en possible réalité. « Une médaille est jouable et on ne s’interdit pas l’arc-en-ciel. On a une homogénéité qui nous permet d’avoir des ambitions élevées, des coureurs pour envisager tous les scenarii », lance Bardet. « Ce n’est pas à nous de le dire mais nos adversaires doivent nous craindre, insiste Bernard Bourreau, sélectionneur depuis 2013. Nos coureurs peuvent être performants sur toutes les phases de la course. »

Barguil : « On prouve qu’on est les meilleurs mondiaux actuellement »

Homogène et dangereuse sur tous les fronts, l’équipe de France fait peur. La conséquence de derniers mois où les coureurs hexagonaux ont brillé dans les petites comme dans les grandes courses avec 98 victoires au compteur cette saison, troisième meilleur total pour une nation derrière les Pays-Bas et l’Italie, sans oublier les podiums de Peraud (2e) et Thibaut Pinot (3e) sur la Grande Boucle. « On est dans la bagarre avec les meilleurs, confirme Gallopin. Désormais, les étrangers savent qu’on a une super nation, des bons coureurs et qu’on rivalise avec eux. » Au point d’intriguer au sein du peloton. « Je suis le seul Français dans mon équipe, poursuit Gallopin, qui évolue sous les couleurs de Lotto-Belisol. Mais mes coéquipiers me posent beaucoup de questions sur eux. Ils s’intéressent car ils voient qu’on est performant et ça fait parler. C’est bon signe. »

Avec sa jeune génération décomplexée, qui a déjà glané des bouquets sur les trois grands Tours, loin des années sombres où elle semblait reléguée à la cave de la petite reine mondiale, la France a retrouvé son rang à la table des grandes nations du cyclisme. Et les discours qui vont avec. De la confiance sans verser dans l’arrogance, avec l’envie d’effacer Anthony Geslin, dernier médaillé mondial tricolore sur la course en ligne avec le bronze en 2005. « On est tous des cibles parce qu’on a des résultats, explique Warren Barguil, double vainqueur d’étape sur la Vuelta 2013. On est plus observé et on prouve qu’on est les meilleurs mondiaux actuellement. J’espère qu’on va encore pouvoir le prouver dimanche. » Bouhanni confirme l’appétit bleu : « On est tous là pour le titre, pas pour une médaille. » Ancien patron des équipes nationales de jeunes et fin connaisseur de cette génération aux dents longues, Bourreau en est persuadé : « Il y a potentiellement un champion du monde chez l’un de ces jeunes. Ils sont en confiance et ont montré qu’ils étaient au niveau des meilleurs. » Et si tout cela se terminait dans un bel horizon arc-en-ciel ?

Alexandre Herbinet avec Georges Quirino à Ponferrada