RMC Sport

Cyclisme: l'UCI interdit le Tramadol, médicament addictif et dangereux

Image d'illustration

Image d'illustration - AFP

C’est un médicament initialement destiné à traiter la douleur chronique. Dans le vélo, son usage a été détourné. Parce qu’il permet de mieux tolérer la souffrance et de s'entraîner plus dur, certains y ont vu un très bon compagnon de route. Sauf que, en plus de diminuer l’attention et les réflexes en course, le Tramadol est un médicament addictif et dangereux.

Il faut remonter au printemps de l’année 2014. Accepter un flashback douloureux. Des images terribles. Le début de la campagne des classiques flandriennes est alors marquée par de nombreuses chutes. De mémoire de cycliste, on en avait rarement vu autant en si peu de temps. Impressionnantes autant que violentes. Sur la touche notamment pour avoir goûté le bitume sur Gand-Wevelgem, l’Allemand André Greipel, le sprinter star de l’équipe Lotto-Belisol, (aujourd’hui chez Arkea Samsic), victime d’une luxation acromio-claviculaire. Quatre de ses coéquipiers doivent également laisser à ce moment charnière de la saison le vélo au garage suite à des chutes en cours de course. De la malchance? Pas si sûr.

A l’époque, Jan Mathieu, le médecin de l’équipe belge se confie à la chaîne de télé flamande Sporza avec un coupable dans son viseur: "Le Tramadol n'explique bien sûr pas toutes les chutes, mais c'est un médicament qui agit sur le système nerveux central et engendre de sérieux problèmes de concentration." La déclaration fait alors beaucoup de bruit et relance la question de la mise au ban de cette molécule de la catégorie des opiacés, que les équipes membres du MPCC (Mouvement pour un cyclisme crédible) voulaient déjà voir sur la liste des produits interdits par l'Agence mondiale antidopage (AMA). Si ce souhait n’est aujourd’hui pas exaucé, l’AMA ayant encore récemment refusé de placer le Tramadol sur sa liste noire, le Dr Mathieu peut malgré tout se réjouir.

Cinq mois de suspension en cas de récidive

Lanceur d’alerte il y a cinq ans sur la question du Tramadol, il obtient aujourd’hui en quelque sorte gain de cause, puisque l’Union Cycliste Internationale fait évoluer son règlement à compter du 1er mars et interdit désormais "pour des raisons médicales" (et non dans le cadre de la lutte antidopage) l’utilisation de ce puissant anti douleur. A l’avenir, tout coureur prenant part à une course inscrite au calendrier national ou international peut ainsi être amené à fournir un échantillon de sang pris au bout du doigt, afin de détecter du Tramadol. En cas d'infraction, le risque est une simple amende pour un premier test positif, cinq mois de suspension en cas de récidive. Neuf mois au terme d'un troisième contrôle. De quoi dissuader.

"Mais pourquoi a-t-il fallu autant de temps?", s’insurge Cyrille Guimard, le sélectionneur de l’équipe de France. "C’était un médicament autorisé, mais au-delà des risques de chutes qu’il engendre, ça a toujours été du dopage. Celui qui ne prend pas de Tramadol et se fait péter les jambes en roulant, comment peut-il accepter qu’un gars qui ait pris un petit cachet puisse avoir moins mal et donc soit plus fort que lui. Il fallait l’interdire. On ne peut que saluer la décision de l’UCI en la matière", souligne-t-il. "5 % des échantillons des coureurs présentent des traces de Tramadol, c’est bien qu’il y a un sujet", expliquait récemment David Lappartient, le président de l’Union Cycliste Internationale.

Les premiers contrôles commenceront dans une petite dizaine de jours, sur Paris-Nice. L’UCI devient ainsi la première fédération internationale à interdire cette substance. "Mais il faut aller plus loin et interdire également les corticoïdes. Les anglo-saxons voient ça comme du confort, mais c’est du dopage, point ", selon Cyrille Guimard. La tâche sera malgré tout sans aucun doute plus ardue en la matière. L’UCI souhaite se pencher sur le cas de ces "corticos", mais a du mal pour l’instant, comme elle l’a fait pour le Tramadol, notamment en terme d’addiction, à prouver leur atteinte à la santé. Pour l’instant, des experts planchent toujours sur la question. Sans succès. Sous couvert d'autorisation d'usage à des fins thérapeutiques.

>> Retrouvez plus d'informations sur l'interdiction du Tramadol vendredi matin sur RMC Sport Premium

Arnaud Souque