Longo, la jusqu'au-boutiste

Jeannie Longo, l'« Anarchiste », comme la dépeint Cyrille Guimard - -
La Longo a toujours autant fasciné qu’agacé. En raison de son palmarès énorme (59 titres nationaux, 13 maillots arc-en-ciel et un or olympique), d’une longévité exceptionnelle (52 ans), et d’un mode de vie pour lequel elle n’entend pas rendre le moindre centimètre à ses détracteurs. Individualiste forcenée, redoutée dans le peloton, tolérée par les instances, la Française vient de manquer trois rendez-vous avec les préleveurs de la lutte antidopage français et américains. Autant d’actes manqués à l’égard d’un système qu’elle n’a jamais considéré comme sa famille. « Ce qui s’est passé me fait penser qu’il s’agit plus d’une posture de défiance à l’égard des instances dirigeantes que d’une volonté de se dérober à des contrôles antidopage », glisse le nutritionniste Denis Riché, aujourd’hui collaborateur chez Cofidis et du TFC, et qui avait connu la Française en 1999 pour la rédaction d’un hors-série de la revue Sport et Vie. « C’est une anarchiste », rejoint à sa manière Cyrille Guimard, l’ex-directeur sportif, devenu consultant RMC Sport. Elle va davantage dans les gîtes que dans les hôtels. »
Fondue d’écologie, adepte d’une alimentation taillée sur mesure, intransigeante jusqu’à l’intolérance envers les petits écarts qui pourraient la faire dévier de sa route, la Grenobloise est sans concession. « Dans son alimentation, il y a de la connaissance, de la conviction, et du dogme », poursuit Riché. Elle peut-être trop rigide. » Et obtuse, comme lors de l’affaire de la créatine, adoptée très tôt par la championne dans sa préparation, alors que le produit défrayait la chronique au début des années 2000 en France, avant d’être légalisée dans le commerce par les autorités sanitaires en 2006.
La fin de sa carrière ?
« Elle veut tout contrôler, c’est une perfectionniste, reprend Guy Chanal, ami de la famille Longo, et président depuis 22 ans du Palais des Sports de Grenoble. Quand elle était déjà championne olympique et championne du monde, elle venait s’entrainer avec une lampe frontale. Elle me disait « Guy, éteins les spots, j’ai pas besoin de ça ! »
Pour Chanal, Longo vit à l’écart du système fédéral comme des médias. « Elle donne de l’argent à des associations, mais personne ne le sait. Elle va voir des enfants malades à l’hôpital, mais elle n’appelle jamais les journalistes. Elle s'en tamponne le coquillard ! » Aujourd’hui dans la difficulté, le « système » va-t-il rouler pour elle ? « A travers cette erreur, elle a peut-être signé la fin de sa carrière », va jusqu’à suggérer Guimard. L’image d’un clap de fin est évacuée par l’avocat de la championne. « Elle ne s’arrêtera pas, elle va se battre jusqu’au bout », annonce Me Ravaz. Avant d’admettre du bout des lèvres. « C’est probablement difficile d’être soumis à des textes contraignants, et de vouloir s’en affranchir parce qu’on aime mieux sa liberté. »