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Lucho Herrera, légende du cyclisme colombien, accusé d'avoir fait assassiner ses voisins

Lucho Herrera sur le Tour de France 1987

Lucho Herrera sur le Tour de France 1987 - AFP

Trois ex-paramilitaires ont affirmé devant la justice que Lucho Herrera, ancienne gloire du cyclisme colombien, vainqueur du Tour d'Espagne 1987, aurait demandé au chef d'un groupe armé de faire disparaître quatre de ses voisins, dans le but de récupérer leurs terres.

Lucho Herrera, meilleur grimpeur des Tours de France 1985 et 1987 et vainqueur de la Vuelta 1987, fait l'objet d'une enquête pour sa responsabilité présumée dans la disparition forcée de quatre personnes en Colombie, a révélé dimanche Noticias Uno, une chaîne d'information colombienne. Le média a eu accès aux déclarations judiciaires de trois ex-paramilitaires, qui désignent le cycliste comme l'instigateur du crime.

Dans les témoignages dévoilés, les anciens membres de "l'Autodefensas Campesinas del Casanare" y affirment que Lucho Herrera a convenu avec eux de la disparition et de l'assassinat de quatre paysans, tous voisins de Herrera, en les désignant comme des miliciens des FARC.

Désignés comme membres des FARC pour être assassinés

Les paysans étaient Gonzalo Guerrero Jiménez, Víctor Manuel Rodríguez Martínez, José del Carmen Rodríguez Martínez et Diuviseldo Torres Vega. Selon le témoignage des paramilitaires, ils n'étaient pas des guérilleros, et le prétendu intérêt de Lucho Herrera était, soi-disant, de les déposséder de leurs terres, de leurs petites propriétés.

Le parquet général a déclaré que la disparition de ces quatre hommes le 23 octobre 2002 était un crime contre l'humanité, et donc imprescriptible. Le dénommé "Ojitos", en compagnie du dénommé "Menudencias", a assuré au tribunal que Herrera était particulièrement proche de Martín Llanos, qui était à l'époque le chef du groupe.

"Il a rencontré Don Martin et nous a donné l'ordre que tout ce dont M. Lucho avait besoin à Fusa... (...) Il nous a dit qu'il devait envoyer ces gens pour nettoyer, qu'ils étaient des miliciens de la guérilla", a raconté "Ojitos". "M. Lucho Herrera m'attendait à la ferme, il m'a offert quelque chose à boire, m'a donné une bouteille d'eau, et m'a dit qu'il avait quelque chose à me donner: il a sorti deux enveloppes, dans l'une d'elles il y avait des photos de quatre personnes que nous devions ramasser, il a dit qu'ils étaient des miliciens de la guérilla, qu'ils allaient le kidnapper et dans l'autre enveloppe il y avait 40 millions de pesos (8000 euros aujourd'hui) et il nous a demandé si nous voulions acheter des fusils et des motos. Ces gens vivaient à côté de sa ferme, c'était des petites fermes à côté de sa ferme."

Des détails sordides

"Menudencias" raconte lui l'enlèvement: "Ces personnes ont été enlevées dans une camionnette Toyota Hilux beige à quatre portes. (...) Nous en avons pris deux à un endroit et les deux autres à des endroits différents, nous avons utilisé des badges du DAS, avec des gilets et des casquettes, il était environ 6 ou 7h de la nuit. Nous en avons mis deux à l'arrière de la voiture et deux à l'avant."

"Nous les avons enterrés sur la route de Novilleros à La Aguadita, dans une ferme (appartenant à Lucho Herrera) au bord de la route. Nous les avons égorgés et découpés à la machette. Nous avons creusé deux fosses, deux petits trous d'environ 50X50 à hauteur de poitrine, d'une profondeur d'environ 1,50m. Nous les avons découpés en six morceaux: la tête, les bras, les jambes et le tronc."

Un premier suspect condamné à 22 ans de prison

"Ojitos" a assuré que ce n'est qu'après le crime qu'ils ont découvert que les victimes ne faisaient pas partie des FARC: "Les familles des victimes affirment qu'à aucun moment les disparus n'ont été des miliciens de la guérilla." Pour l'heure, le juge a ordonné l'ouverture d'une enquête et a condamné "Ojitos" à 22 ans de prison. Un tribunal de Fusagasugá a ordonné l'ouverture d'une enquête contre Lucho Herrera et transmis le dossier au procureur général afin d'ouvrir une enquête de grande ampleur.

Luis "Lucho" Herrera était l'un des grands grimpeurs du cyclisme mondial des années 1980, une idole colombienne et un pionnier du succès en Europe. Il a remporté la Vuelta en 1987, devenant le premier Colombien et le premier Sud-Américain à le faire. Interrogé par W Radio, il a assuré qu'il donnerait toutes les explications aux autorités, mais a affirmé qu'il était "pas impliqué dans les événements qui ont été rapportés": "Je m'adresserai aux médias en temps voulu et je consulte mon avocat pour comparaître devant le bureau du procureur général afin de donner toutes les explications qui pourraient être nécessaires."

AC