Evans, le jour de gloire est arrivé

Cadel Evans - -
« Merci, merci à tout le monde. C’est vingt ans de travail qui payent aujourd’hui. » Les yeux rougis, les joues humides, la voix tremblotante, pas en raison de l’effort mais à cause de l’émotion. Réputé introverti, Cadel Evans, 34 ans, craque. La façade souvent inexpressive de l’Australien s’est fissurée, un peu, laissant place à un homme heureux, comblé d’avoir enfin accroché un grand Tour à son palmarès. Et quel Tour, probablement le plus indécis de ces dix dernières années.
Deuxième à l’issue du contre-la-montre disputé ce samedi à Grenoble, derrière l’Allemand Tony Martin, « Droopy » a soufflé, la veille de l’arrivée finale à Paris, le maillot jaune à Andy Schleck. Le tout avec maîtrise. Lui, favori de cette 20e étape du Tour, n’a pas failli, comme en 2007 et 2008, où il avait enterré ses illusions à l’issue du contre-la-montre final, d’abord pour 23 secondes devant Alberto Contador puis pour 29 secondes face à Carlos Sastre.
« Mentalement très fort »
Non, cette fois, Evans n’a pas flanché. Hormis un problème mécanique sans suite vendredi au Télégraphe, la poisse qui lui collait encore la peau l’année dernière, à l’image de cette fracture du coude gauche survenue lors de la 8e étape, l’a laissé en paix. « Mentalement, il est devenu très fort, confessait Andy Rihs, le patron de BMC. Pour faire ça à la fin du Tour… Cadel est exceptionnel. Il a vécu toute l’année pour ça, pour cette victoire. »
C’est donc sans appréhension qu’Evans a englouti son retard de 57 secondes et a pu déborder, dès la mi-parcours, le cadet des Schleck. Avec 1’34 d’avance sur Andy et 2’30 sur Fränk, le voilà assuré, sauf incroyable incident de parcours, d’être dimanche sur les Champs-Elysées le premier Australien vainqueur du Tour. Lui qui n’a pas, en dépit de son succès au Mûr-de-Bretagne (ndlr, 4e étape), cherché à animer la course, contrairement aux Schleck et à Contador mais qui aura fait parler un brillant sens tactique et une gestion hors-pair, notamment lors de l’attaque du Luxembourgeois au Galibier. « Il a su maîtriser la situation, rappelait le directeur du Tour Christian Prudhomme. Il n’a jamais craqué. Il était là tout au long des trois semaines du Tour de France et il n’a pas laissé passer l’occasion. » Celle, enfin, de triompher sur la Grande Boucle et de confirmer, après son titre de champion du monde sur route en 2009 et la Flèche-Wallonne l'an dernier, que l’étiquette d’éternel « loser » ne lui colle plus à la peau.