Péraud-Pinot, double ration de podium

- - -
Cyrille Guimard avait prévenu. « Thibaut Pinot a fait d’énormes progrès en chrono, ne l’enterrez pas », martelait le membre de la Dream Team RMC Sport ces derniers jours. Le Franc-Comtois ne l’a pas fait mentir. Douzième du contre-la-montre individuel entre Bergerac et Périgueux (54 km), ce samedi, le coureur de la FDJ.fr a rempli la double mission qu’il s’était fixée : conserver sa place sur le podium et garder son maillot blanc. Sur les Champs-Elysées, ce dimanche, Thibaut Pinot portera bien le paletot de meilleur jeune du Tour. Et il montera sur la troisième marche du podium. Derrière, Alejandro Valverde n’a jamais pu l’inquiéter, décevant, trop juste physiquement (28e du chrono).
Alors, certes, il n’aura pu empêcher Jean-Christophe Péraud, spécialiste de l’effort solitaire, de lui chiper sa belle deuxième place. Mais à 24 ans, avec encore une marge de progression sur tous les plans, Thibaut Pinot a marqué le présent et pris rendez-vous avec l’avenir. Peut-il gagner un jour le Tour et succéder à Bernard Hinault ? Le potentiel est bien là. Mais l’avenir n’est jamais un champ de certitudes, surtout dans le cyclisme. On salive déjà, en tout cas, des batailles à venir avec l’autre jeune Français dans le vent, Romain Bardet, finalement passé de la cinquième à la sixième place du général pour… deux secondes (il peut maudire sa crevaison pendant le chrono).
Guimard : « Une belle revanche pour le cyclisme français »
En attendant, la jeunesse doit s’incliner devant un vétéran. Jean-Christophe Péraud, 37 ans, médaillé d’argent olympique en VTT et désormais dauphin de Vincenzo Nibali sur la Grande Boucle 2014. En pleurs sur la ligne d’arrivée ce samedi (7e), comme s’il avait enfin réalisé la portée de son exploit. « Revenez dans un mois pour l’interview », lançait-t-il alors avec émotion. L’avenir ne lui appartient pas. Mais il a bien mérité de savourer l’instant présent. « C’était inimaginable il y a quelques semaines, lance Julien Jurdie, directeur sportif de l’équipe AG2R. C’est un truc de fou, une très grosse émotion. » Un résultat qui récompense la carrière et le parcours d’un garçon humble et travailleur, qui aura su exploiter au mieux sa forme et les circonstances de course.
Un résultat qui, surtout, replace enfin la France sur le podium de son Tour. Pour la première fois depuis Richard Virenque en 1997 (2e), un coureur hexagonal va grimper sur la boîte sur les Champs-Elysées. Il faut même remonter encore plus loin, 30 ans en arrière, avec Laurent Fignon et Bernard Hinault (1er et 2e) en 1984, pour trouver deux Français sur le podium. Le duo Péraud-Pinot compris, la chose n’est arrivée qu’à onze reprises après-guerre, dont quatre fois pour les places de deuxième et troisième (la dernière avec Raymond Pingeon et Raymond Poulidor en 1969). Cocorico, quoi.
« La nation France a repris une belle part dans le cyclisme international », estime Vincent Lavenu, le manager de la formation AG2R. « C’est le renouveau du cyclisme français qui revient en première page du cyclisme international », juge Cyrille Guimard. Luc Leblanc, autre membre de la Dream Team RMC Sport, va plus loin : « Ça fait longtemps qu’on attendait un tel podium. Ça va apporter beaucoup pour l’avenir, pour la motivation des jeunes. » Cela fait du bien, aussi. En souvenir des années sombres. « Pendant longtemps, on s’est foutu de la gueule du cyclisme français, rappelle Cyrille Guimard. On ne savait rien faire, on était has been… Mais nous, on n’est jamais rentré dans le système de la préparation biologique. Qu’est-ce qu’on a pu prendre… Aujourd’hui, c’est une belle revanche. »
A lire aussi : >> En images : comme Nibali, ils ont gagné les trois grands Tours >> Pinot : "Du mal à savourer" >> Lavenu : "Ça me fait pleurer"