Tour de France : Froome, la suspicion en héritage

Chris Froome vainqueur du Tour de France 2013 - -
Une question, une colère. A chaque fois que Bernard Hinault a dû répondre aux doutes de certains sur les performances de Chris Froome pendant ce Tour de France 2013, le quintuple vainqueur (1978, 1979, 1981, 1982, 1985) s’y est assez violemment opposé. Alors au soir de la victoire du Britannique, le « Blaireau », membre de l’organisation, n’a pas changé de braquet. « Il existe des connards, crie Bernard Hinault à propos de ceux qui ont jeté la suspicion tout au long de cette 100e édition. Qu’ils s’occupent des autres sports et on verra bien. La preuve, dans l’athlétisme, il y a trois ou quatre grands du 100m… Pourquoi on ne met pas le discrédit sur l’athlétisme ? Pourquoi toujours le cyclisme ? Les coureurs, ce ne sont pas des voyous, des bandits. Il faut arrêter les conneries ! »
Ces doutes, ils sont nés dans les Pyrénées. Première étape de montagne. Première démonstration de force de Chris Froome. « L’étape d’Ax-3-Domaines nous a fait peur, reconnait Bernard Thévenet, double vainqueur du Tour de France (1975, 1977). On avait un petit peu de suspicion. La suite du Tour a démontré que c’est son style. On n’est pas habitué. Mais ça lui appartient. Il a une vitesse de jambes qu’il a travaillée pendant plusieurs années. » Au Ventoux, dans l’Alpe d’Huez, le leader de la Sky a encore sprinté, mouliné, pour s’arracher à la pente et distancer ses adversaires. Une méthode qui lui a valu des insultes sur le bord de la route. « C’est toujours gênant d’entendre des gens dire ‘‘dopé, dopé’’, regrette Nicolas Portal, le directeur sportif français de la Sky. Mais c’est l’héritage du passé… »
Roche : « Ce n’est pas juste que les coureurs payent pour ce qui est arrivé dans le passé »
Un passé encore trop présent. Il y a six mois, les aveux de Lance Armstrong ont brisé la confiance des passionnés. « Mais là, ce n’est pas comme il y a dix ans, estime Bernard Thévenet. On voit que dans son équipe, ils ne sont pas tous à la planche toute la journée. Ils roulent et puis ils sautent, comme tout le monde. C’est rassurant. » Pour Stephen Roche, Chris Froome est même un exemple. « C’est un très beau vainqueur et un très bon ambassadeur pour le vélo, assure l’Irlandais, vainqueur du Tour de France en 1987. Il a appris le français. Il ne se cache derrière rien, malgré le fait qu’il y ait eu des avis abusifs à son égard. Il s’est comporté en gentleman. Il a essayé d’être le plus transparent possible, sans se mettre à poil sur le podium protocolaire ! C’est un très bon élément pour l’avenir du vélo. »
Les analyses de puissance qui font de Chris Froome un « mutant », les rumeurs sur de nouveaux produits indétectables, la crainte d’un énième mensonge… Cette vision du cyclisme et du Tour de France ne serait donc pas légitime. « Il y a beaucoup de charlatans qui se prennent pour des spécialistes, des techniciens, des médecins et qui n’ont jamais fait de vélo, tempête Stephen Roche. Ce n’est pas juste que les coureurs payent pour ce qui est arrivé dans le passé. On n’est jamais coupable avant de passer au tribunal. » Patienter avant de juger. L’avenir pour prouver. Nicolas Portal est certain que le vent de la suspicion va faiblir. « J’ai le sentiment que les gens commencent à se dire que Chris et l’équipe, nous sommes honnêtes. » Chris Froome a aussi fait une belle promesse sur le podium du Tour de France : « C’est un maillot jaune qui résistera à l'épreuve du temps ».
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