"Un système de draft où le meilleur des jeunes va dans la plus mauvaise des équipes!" Comment sauver le système cassé des transferts dans le vélo

L'affaire a défrayé la chronique en Belgique et dans le monde du vélo à l'inter-saison, quand les coureurs cyclistes travaillent leurs aptitudes au cyclo-cross ou à prendre un peu de brioche avant de partir en stage de pré-saison à Calpe ou Majorque. Maxim van Gils avait demandé une grosse augmentation de salaire à son équipe belge, la Lotto. Refus des intéressés, rupture de contrat du jeune espoir qui avait encore deux ans dans l'équipe belge. Et nouveau contrat, bien plus rémunérateur, à la Red Bull Bora, une des nouvelles "super teams" du peloton, avec une compensation financière estimée à 1.2 million d'euros pour la Lotto. Après le bras de fer de Cian UijtdeBroeks la saison dernière entre la Bora et Visma-Lease a Bike et le départ en sens inverse de Primoz Roglic frustré de son Tour d'Espagne 2023, un signe supplémentaire que le système de transferts dans le vélo est plus que grippé.
Résultat, des "petites" équipes, et notamment françaises, qui voient les meilleurs espoirs leur filer sous le nez avant même de mettre un pied chez eux (comme Isaac del Toro, convoité par la Groupama-FDJ et qui a finalement signé chez UAE) ou dès que l'occasion se présente (le grand espoir français Lenny Martinez qui signe chez Bahraïn plutôt que prolonger à la Groupama-FDJ), sans compensation cette fois pour la Groupama-FDJ. Faut-il en arriver à un système de mercato, comme en football?
"Mon coureur le mieux payé s'appelle Urssaf"
Ce n'est pas forcément le souhait des différents acteurs, au moment même ou l'arrêt Diarra de la cour européenne de justice fait tanguer le système de transferts de la FIFA. " La cause de ces transferts, c'est qu'on a actuellement 3 ou 4 équipes au monde qui pèsent d'un poids considérable sur l'économie du cyclisme et vous pourrez mettre en place toutes les indemnités que vous voudrez sous réserve qu'elles soient acceptées par la cour européenne de justice, Vous n'empêcherez pas UAE de proposer un contrat de six ans à un jeune qui sort de cadet ou junior et que ce jeune ne réfléchira même pas pour savoir s'il serait mieux chez Groupama-FDJ ou chez Decathlon AG2R", explique l'agent Philippe Raimbaud dans le podcast Grand Plateau (retrouvez tous les podcasts Grand Plateau par ici).
D'autant que les équipes françaises et européennes n'ont pas les mêmes charges que leurs homologues kazakhes ou émiraties. "Quand j'étais à la tête d'une équipe (Saur-Sojasun), j'avais été coutume de dire moi j'ai un problème c'est que mon meilleur coureur, celui qui est le mieux payé de l'équipe, il ne prend jamais le départ d'une course. Ce coureur, il s'appelle Urssaf et effectivement, c'était la partie la plus importante du, budget des équipes que j'ai pu gérer et ça évidemment chez UAE ou dans d'autres équipes, on n'a pas ce style de problème."
"Comparer des choux-fleurs et des carottes"
Résultat, des talents qui s'empilent dans quelques équipes, quitte à ne pas trop courir et rarement pour soi et des victoires qui sont concentrées entre les mains d'une poignée d'équipe. Et la petite musique, lancinante : il faut un salary cap ou un budget cap, comme en Formule 1. "Le budget cap ou le salarie cap, moi je ne sais pas trop comment on va mettre en oeuœuvrevre quelque chose qui va comparer des choux-fleurs, des carottes et des tomates, c'est-à-dire des économies kazakhes, émiraties, belges, espagnoles, australiennes et françaises, explique Philippe Raimbaud. Il y a un moment où il y a une telle disparité dans les réglementations locales que je ne vois pas bien comment on va mettre ce système en place."
En revanche, le très bientôt néo-retraité a une proposition : "je crois plus à un système de draft où le meilleur des jeunes va dans la plus mauvaise des équipes." Un système en vigueur aux Etats-Unis dans les Ligues fermées comme la NBA ou la NFL, une idée déjà avancée par Jonathan Vaughters, le patron de l'équipe EF qui mettait regard l'imprédictibilité et le développement de la NFL avec ce système de draft qui permet aux plus mauvaises équipes de se renforcer avec les meilleurs jeunes talents. "Je ne dis pas qu'il faut forcément qu'on adopte le même système que celui de la NFL, parce que peut-être que ça marchera, et peut-être que ça ne marchera pas, mais je dis qu'il devrait y avoir quelque chose. Il devrait y avoir des tentatives pour réguler la façon dont les coureurs sont recrutés, la façon dont les équipes sont construites et ce qui est considéré comme jute financièrement."
Pour l'instant, on en est loin.