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Calassi, marqué à vie

Paul Calassi

Paul Calassi - -

Il y a bientôt vingt ans survenait le drame de Furiani. Parmi les 2350 blessés, Paul Calassi, 63 ans, qui a tout perdu le 5 mai 1992. Mais aujourd’hui encore, ce Corse continue à se battre pour le respect des victimes.

C’est un homme détruit et amer. Paul Calassi n’a plus l’usage de ses jambes mais son verbe est toujours là. Haut et cinglant. « Il y a toujours cette haine, personne ne pourra me l’enlever », confie-t-il de sa voix grave et posée. Le Corse de 63 ans fait partie des 2.350 blessés victimes de l’effondrement d’une tribune au stade de Furiani, à Bastia le 5 mai 1992, qui a aussi causé la mort de dix-huit spectateurs juste avant le coup d’envoi de la demi-finale de Coupe de France Bastia-Marseille. Paraplégique depuis, il n’a jamais oublié. « C’est quelque chose qui est constamment dans notre mémoire. Mon fauteuil est là pour me le rappeler. Je revois tout à fait le stade, l’ambiance, la chute et les dégâts qui ont suivi. C’est ancré. »

Ce jour-là, alors qu’il s’était placé au sommet de la tribune, « inquiet de la hauteur de l’échafaudage », il se retrouve « dix-sept mètres plus bas » en quelques secondes. « Ca a tremblé et tout s’est écroulé. On ne pouvait pas s’échapper, c’était l’entonnoir », raconte l’homme aux cheveux blancs, membre actif du collectif des victimes. Transporté à l’hôpital « sur une planche, en estafette », Calassi est touché à la colonne vertébrale. S’ensuivent des problèmes pulmonaires. « Ca a gâché ma vie, ça a tout changé ».

Alors qu’il prévoyait de devenir propriétaire d’un restaurant à Nice, il est contraint au divorce. Il a subi de multiples opérations et s’est toujours battu pour que les victimes soient respectées. « Le procès ne nous a pas satisfaits. On aurait aimé en savoir beaucoup plus. Personne n’a voulu prendre ses responsabilités. Les seuls qui ont été à la hauteur, ce sont les pompiers ».

« Aucun respect pour les morts »

L’homme qui vit aujourd’hui à Poggio-d'Oletta en Haute-Corse et qui devra bientôt déménager pour se rapprocher des hôpitaux s’est maintes fois insurgé contre les instances du football qui organisaient des rencontres le 5 mai alors qu’elles avaient promis qu’il n’y en aurait plus ce jour-là. « Ce n’est pas normal. Il n’y a aucun respect pour les morts », dit-il encore aujourd’hui, faisant allusion notamment à cette finale de la Coupe de la Ligue organisée le 5 mai 2001.

Cette saison, pour commémorer les vingt ans de la catastrophe, pas un match officiel n’aura lieu. Le vieil homme, lui, ira se « recueillir devant la stèle avant la messe d’anniversaire ». Calassi, en passionné de football, a fini par retourner au stade de Furiani. Mais il est resté au bord du terrain. « Je ne supporte plus d’être en hauteur, je suis mal à l’aise ». Le stade Armand Cesari n’est toujours pas aux normes. Incompréhensible pour lui. « Insultant » pour les victimes. Les travaux sont toujours en cours. 

Sylvie Marchal (avec G.Q.)