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Ligue 1 : l’OL est (raisonnablement) optimiste avant la DNCG

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A quelques heures du passage devant la DNCG, l’OL a bien préparé son grand oral. Les clignotants de circulation, pour la saison 25-26, au rouge vif en novembre lors de la décision qui notamment envoyait le club en Ligue 2 prend, sept mois plus tard, une teinte plus verte, porteuse d’espoirs. Mais cela ne signifie pas que le chemin sera (totalement) dégagé des obstacles. La décision finale, programmée dans la foulée de l’audition de ce mardi à 16h, restera le seul juge de paix du travail de John Textor.

Il fut un temps où la formule qui servait de guide à la compréhension de la vie de l’OL tenait dans cette formule, répétée par des proches de Jean-Michel Aulas: "le Prez’ dit toujours la vérité, votre travail est de dénicher le moment." Pour John Textor, son successeur, les mêmes suiveurs peuvent utiliser peu ou prou, la même règle: "Il dit ce qu’il va faire, il finit toujours par le faire ; mais quand..." Avec en sous-titrage, ce conseil: à vous d’être patient et d’attendre.

Force est de constater que de nombreuses opérations annoncées, durant les sept mois qui séparent le vendredi 15 novembre de toutes les angoisses pour les supporters, (encadrement de la masse salariale, interdiction de recrutement et rétrogradation à titre conservatoire à l’issue de la saison sportive) de cette audition du 24 juin, se concrétisent. Le plan de départs volontaires d’une centaine de personnes, un mercato efficace à la case "départs", l’injection de liquidités, la vente des parts de Crystal Palace ou encore l’introduction en bourse du groupe Eagle, qui chapeaute la structure générale (Molenbeek, Botafogo, Palace et OL) sans oublier ce "brin de chance".

Un mercato efficace à près de 100 millions d'euros

Parmi les pistes pour faire rentrer du cash d’ici le 30 juin 2025, le mercato en mode "sortant" se devait d’être actif. Force est de constater que l’équipe autour de Mathieu Louis-Jean, le directeur technique a plutôt bien œuvré: entre les transferts de l’hiver de Maxence Caqueret (Come), Jeffinho (Botafogo),  et Gift Orban (Hoffenheim), sans oublier les options d’achat inscrites (et levées) dans les prêts de Said Benrahma (Neom) et Amin Sarr (Hellas Verone), Lyon avait déjà bien garni ses comptes dès janvier, sans oublier, dans le cadre de la mutualisation, l’inscription des droits de mutation de Luiz Henrique de Botafogo au Zénith Saint-Pétersbourg (33 millions d’euros) sur les comptes de l’OL. A cela s’ajoute la vente du 10 juin de Rayan Cherki à 36,5 millions d’euros (+ de 6 de bonus et 15% sur l’intéressement à une potentielle revente). "Pour une année de contrat restant, c’est bien joué", juge un agent connaisseur du milieu. Au total, c’est près de 100 millions d’euros qui ont afflué dans les caisses dans ce premier semestre 2025. "Pas des promesses, mais des ventes bien réelles et concrétisées", appuie-t-on en interne.

Injections de liquidités

A ces sommes "extérieures", viennent s’ajouter des apports "intérieurs", ceux des actionnaires: 83 millions en fin d’année dernière en attendant un autre potentiel versement qui pourrait irriguer les comptes en ce début d’été. John Textor peut aussi compter sur des alliés (parfois ses voisins en Floride) propres à l’aider. Ainsi, Michèle Kang, patronne des OL Lyonnes, va installer sa structure féminine à Meyzieu, futur ex-Académie de l’OL, en échange de 20 millions d’euros. La femme d'affaires avait également décidé de faire tous les matchs au Groupama Stadium, là où elle pensait faire construire son propre stade. La location de l’enceinte de Décines apportera de l’argent supplémentaire et le fait qu’elle reste dans l’environnement proche de John Textor consolident sa présence dans le tour de table financier, là où un déménagement, par exemple à Gerland, désormais tanière du LOU Rugby aurait fait sortir la même enveloppe, hors du giron d’Eagle.

Il y a aussi, le modèle d’un club en multipropriété qui permet des passerelles. Ainsi, Le Progrès, en épluchant les documents financiers du club côté en bourse et qui doit donc une transparence certaine, a aussi relevé la présence d’un prêt de 8,5 millions d’euros de la part de "OL Brésil" à "OL France" à 6% d’intérêt dans les dossiers du club.

De quoi donner une marge de manœuvre nouvelle aux dirigeants pour régler des ardoises. Depuis quelques jours, les créanciers de l’OL en local – prestataires de services, fleuristes, agents, hôteliers, traiteurs - ont reçu des propositions d’étalement de paiement de leur dette, dont la première échéance est réglée rapidement. De quoi alléger l’ambiance générale avec les fournisseurs. Et d’envoyer un message au milieu du football que l’OL n’est plus le (très) mauvais payeur d’hier. Le moment est bien choisi alors que la somme de 20 millions d’euros de factures impayées sur Lyon occupait la chronique du monde économique local, déjà peu enclin à lui faire confiance après l’éviction de JMA.

"La chance, ça se provoque"

Une qualification en Coupe d’Europe à la dernière minute du temps additionnel du dernier match en mai 2024 sur un pénalty face à Strasbourg. Bis repetita un an plus tard, avec le pénalty qui prive du point du nul ... Strasbourg à la dernière minute et qui permet à l’OL d’être européen à l’ultime seconde. La victoire de Botafogo en Copa Libertadores en novembre 2024 (et son chèque de 23 millions d’euros de vainqueur). Sans oublier le même jour, la victoire de Crystal Palace en Coupe d’Angleterre qui donne un billet pour la Coupe d’Europe avec les conséquences positives pour le propriétaire américain présent à Londres, le 17 mai dernier.

"La chance, cela se provoque", sourit-il quand on lui égrène ces planètes qui s’alignent au bon moment, au bon endroit. D’autant qu’au moment d’atterrir à Paris, ce mardi pour défendre la cause de l’OL devant le gendarme financier, John Textor aura peut-être en plus, avec une qualification pour les 8e de finale de la Coupe du Monde des clubs, acquise la nuit précédente, lors du 3e match de poule face à l’Atlético de Madrid après son succès face à Seattle et le PSG, avec les dollars promis. De quoi habiller la mariée de plus belle manière encore en présentant le dossier à la DNCG, même si la future saison en Europe, ses droits TV et recettes de billetterie n’est qu’à la case "ressources à venir" et que le produit de la vente du club londonien reviendra dans le pot commun Eagle, avec un ruissellement à arbitrer ensuite.

La vente de Crystal Palace

C’est "La" promesse de John Textor qui revenait sans cesse: vendre ses 43% de parts achetées 87,5 millions de livres en août 2021. Or, comme sœur Anne, le personnage d’un des contes de Charles Perrault au 17e siècle, personne ne voyait rien venir, sauf "le ciel qui poudroie et l’herbe qui verdoie". D’autant que ces actions qui placent leur propriétaire comme actionnaire principal, ne donne pas la majorité en voix. Un vrai handicap.

Mais le 17 mai dernier, en s’asseyant dans les tribunes de Wembley pour la finale de la Coupe d’Angleterre, l’homme d’affaires américain a encore porté chance à "son" club qui l’emporte (1-0) face à Manchester City pour inaugurer la salle des trophées du plus vieux club de Premier League (1905). Ce succès ouvre les portes de l’Europa League. Bien vite pourtant, puisque l’UEFA va mettre un stop à l’inscription de l’institution londonienne en hiérarchisant les clubs de la galaxie Eagle. Dans le cadre de la multi-propriété, suivant une jurisprudence que l’instance européenne met en place de façon empirique devant la multiplication de telles organisations, on retrouverait l’OL en n°1 et Crystal Palace en n°2. Seule solution rapide – et encore, il aurait fallu que ce changement d’actionnaires soit validé avant le 1er mars mais l’UEFA ferme les yeux sur cette obligation - la vente de ces 43%, afin de rompre le lien "familial" entre les deux entités, française d’un côté et britannique de l’autre.

Ce premier trophée de l’histoire des Eagles dessine un avant et un après. Ce qui était ardemment souhaité par Textor depuis fin 2024 mais peu entendu par les autres actionnaires résonne différemment à leurs oreilles. Promptement, un ami investisseur est trouvé et ce lundi 23 juin, en attendant un communiqué en précisant les contours, la vente des parts à Robert Wood Johnson, milliardaire US propriétaire d’une franchise NFL des Jets de New York, a été officialisée.

Et même si la somme devra être ventilée dans le groupe Eagle, l’OL peut imaginer récolter une partie des 200 millions d’euros de la vente (autour de 40 millions d’euros?), en attendant un autre "projet", maintes fois annoncé: IPO, l’introduction en bourse à New York de la holding. Débutée en décembre avec un premier apport d’une société anglaise (40 millions d'euros), elle a pris du retard (si bien qu’elle ne pourra être vraiment concrète et visible dans le dossier présenté par les dirigeants de l’OL ce mardi). Mais le processus a bien débuté le vendredi 13 juin avec le dépôt de la déclaration d’enregistrement auprès de la SEC (Securities and Exchange commission), une autorité fédérale chargée de réguler les marchés financiers.

La masse salariale en baisse

En sept mois, du 15 novembre au 24 juin, le(s) visage(s) de l’OL a (ont) aussi changé pour des dossiers menés par différentes personnes. Le directeur général, Laurent Prud’homme (jusqu’à sa disgrâce à la mi-avril) a fait signer au début janvier 2025, le plan de départs volontaires d’une centaine de collaborateurs qui place l’OL dans un format moins "XXL", lui qui a compté jusqu’à 700 employés du temps de son ère "polyvalent" (OL féminin, OL Reign et LDLC Arena compris). Les fiches de poste ont été ainsi redessinées pour coller mieux à "l’actualité du fonctionnement, qui était pour le moins anachronique", selon une source interne. Les 500 postes ont moins de doublons. Et même si ce ne sont pas des salaires XXL, les charges inversent la tendance des précédentes années à la hausse. En même temps, les fins de contrat d’Alexandre Lacazette, Maxence Caqueret, Anthony Lopes ou encore Rayan Cherki accentuent le mouvement. John Textor pourrait ainsi convaincre par des preuves écrites, noir sur blanc, dans les documents remis à la DNCG, un infléchissement conséquent de 128 millions d’euros à 74 millions d'euros.

Prudence et humilité

Mais n’allez pas croire que "l’élève Textor" s’avance, sûr de lui à 16h ce mardi à la DNCG. "Nous avons le sentiment d’avoir très bien préparé ce rendez-vous et ce, depuis le soir de la décision du 15 novembre, dans un climat apaisé avec les acteurs du foot français et européen", explique-t-on dans l’entourage de John Textor, qui ne se sépare plus jamais de Michael Gerlinger. Le directeur du football d’Eagle occupe désormais un rôle central dans la réorganisation interne. Fort de son passé au Bayern Munich (18 ans) et créateur de l’ECA (association européenne des clubs), il possède les relais nécessaires pour faire avancer les dossiers avec les codes du milieu. Après avoir passé l’obstacle de la licence FFF pour représenter la France à l’UEFA, le 28 mai en attendant un autre verdict, celui de l’UEFA qui avait tiré les oreilles de l’OL, trop dispendieuse – le désaccord est en passe d’être réglé -, le duo va se présenter ce mardi à 16h devant la DNCG, avec un double sentiment, "le sérieux d’un travail bien réalisé en amont, mais avec une grande humilité", fait savoir l’entourage des dirigeants.

En principe, John Textor, présent au plus près de Botafogo dans la Coupe du Monde des clubs, devrait assister au match de l’équipe carioca au Rose Bowl de Pasadena dans la banlieue de Los Angeles, à 21h lundi soir, heure française avant de défendre son deuxième club, à 16h à Paris, demain mardi. Un défi à la mesure de celui à réussir devant les experts en chiffres de la DNCG. Sur le papier, ça passe. Dans la réalité, "faut y voir fini", comme on dit entre Rhône et Saône.

Edward Jay