OL-PSG: "Il dégage quelque chose, une sorte de charisme", à la découverte de la méthode Fonseca, à peine en place mais déjà à l'épreuve

Arrivé le 30 janvier et spectateur du dernier match de poule de Ligue Europa face aux Bulgares de Ludogorets (0-0) avant de diriger – 48 heures et une séance d’entraînement plus tard – son baptême du feu à Marseille (3-2), Paulo Fonseca va vivre son premier choc avec l’Olympique Lyonnais ce dimanche 23 février face au Paris Saint-Germain.
Avec une vingtaine de séances, sans matchs européens ou de Coupe de France pour en scinder la dynamique, le technicien portugais espère que ce rendez-vous mettra en lumière les progrès de son groupe, aperçus face à des formations déclassées - Reims (4-0) et Montpellier (1-4) – mais qu’une performance majuscule face à l’épouvantail parisien, invincible et irrésistible, rendrait plus crédibles.
Examen de passage réussi
"Mon quotidien? Oh, il est donc très facile à comprendre. Je suis totalement concentré sur le jeu!" Et pour cause: loin de sa famille, Paulo Fonseca, qui n’a pas encore cherché (et donc trouvé) de maison depuis son arrivée à Lyon, vit à l’hôtel: "Celui qui est juste à côté du stade et du terrain d’entraînement. J’arrive au club à 8 heures et j’en repars pour aller dîner... dans le même hôtel!" Il ne peut être en retard: tout se fait en marchant en moins de cinq minutes. Son pied à terre possède une vue imprenable à la fois sur le Groupama Stadium et sur le Groupama OL Training Center! Pratique pour ne pas perdre de temps dans un compte à rebours complexe: il faut gagner des matchs pour se rapprocher de l’exigence présidentielle (le podium) tout en sachant que la "patte" d’un entraîneur met toujours du temps à s’imprimer. Une difficile équation suggérée dès sa deuxième prise de parole.
Aidé par le calendrier récent (Reims en chute libre et déplacement chez la lanterne rouge Montpellier), Paulo Fonseca a réussi son examen de passage. "Ça ne fait que deux matchs, mais je trouve qu’il y a du positif, avoue Charles, un supporteur. Je suis moins stressé et j'ai plus confiance, car il a tout simplement plus d'expérience que Pierre Sage qu'on avait avant. Je sens qu'il dégage quelque chose, une sorte de charisme: sur le bord de la touche, on le voit, il fait ses gestes, il replace les joueurs, on l'entend aussi. Je pense que les joueurs ont besoin aussi de ça quand ils sont mal placés. Même l'attitude sur le banc de touche est plutôt bonne".
Au classement, un frémissement apparaît: les deux succès de février font gagner un rang à l’OL (7e à 6e) et gratter trois points sur le podium (de sept à trois de retard).
Moins catégorique, Norvan Derderian, entraîneur de l’US Feurs en régional et consultant régulier de KopGones sur BFM Lyon juge plus les têtes que les jambes lyonnaises: "Pour moi, ce n'est pas d'abord sur l'aspect tactique, mais plutôt sur l'aspect mental que je vois l’évolution, note le technicien. Le fait d'avoir ce choc psychologique avec l’éviction de Pierre Sage, cela permet de redonner une bouffée d'oxygène à certains qui jouaient moins, ou de remettre des têtes un petit peu à l'endroit pour ceux qui étaient impactés par rapport aux mauvais résultats. C’est comme s'il y avait eu un reset, et cet effet-là permet de voir d'autres choses sur le terrain".
Les mêmes hommes, à une exception près
Mais justement, sur l’aspect tactique, en une vingtaine de séances sur les trois semaines qui séparent les deux sommets de l’hiver (OM le 2 février, PSG le 23 février), rien de fondamental ne varie. Le changement dans la continuité. Car en prenant la succession de Pierre Sage, débarqué le 27 janvier au lendemain d’un cinquième match sans succès (un défaite, trois nuls et l'élimination en Coupe de France face à Bourgoin-Jallieu), Paulo Fonseca ne révolutionne pas ses compositions d’équipe.
À cela plusieurs raisons: quand il prend l’équipe, il n’y a pas le feu au lac avec son 6e rang de la Ligue 1; l’effectif a beaucoup maigri, le mercato de janvier étant passé par là pour l’amputer de neuf éléments ce qui limite la concurrence. Dans la foulée de la formule de Jorge Maciel qui assure l’intérim en Ligue Europa un jeudi soir anonyme face à Ludogorets («il y aura beaucoup de Pierre Sage dans ma composition d’équipe»), Paulo Fonseca ne fera guère différent. Il continue de relancer Sael Kumbedi, qui a suppléé Ainsley Maitland-Niles; de déclasser Duje Caleta-Car comme son prédécesseur; qu’il fait confiance, comme le coach du miracle de 2024, aux mêmes hommes (Ernest Nuamah, Rayan Cherki, Georges Mikautadze et Alexandre Lacazette) en attaque. Sa seule touche? La double titularisation de deux profils identiques et défensifs (Tanner Tessmann et Nemanja Matic) au milieu afin de laisser Corentin Tolisso plus libre et plus haut dans le jeu. Ainsi, il rééquilibre son onze de départ.
Ce qui fait dire à Norvan Derderian: "Pour moi, c'est trop tôt pour juger. Il n'y a que quelques matchs qui ont été effectués. Un coach arrive avec une méthodologie, avec des idées, et il les met en place sur la durée, mais ça serait manquer de respect à ce qui a été mis en place auparavant, et à Pierre Sage et son staff que de dire, ça y est, il y a quelque chose qui apparaît. Ce qu'on voit aujourd'hui, ce sont les effets de Pierre Sage".
Des statistiques flatteuses
Comme dans "l’ancien régime", l’OL affiche des temps de passage extrêmes d’une période à l’autre, en l’occurrence d’un mois de mercato aux semaines à l’effectif figé. Au temps du mandat de Pierre Sage, les mois de janvier et d’août sonnent creux (à peine un point par match), là où les autres tournent à plein régime (jusqu’à 2,46 points par match de février à mai 2024).
Paulo Fonseca enfile les mêmes chaussures à crampons depuis qu’il a pris en main l’équipe: 0 point à Marseille pour le dernier match avant la fin de la fenêtre des transferts, 6/6 pour les deux matchs suivants! Et une efficacité redoutable: là où il fallait tirer 17 fois pour marquer un but en janvier (quatre buts en 58 tirs dont 16 cadrés), il suffit de trois en février (huit buts en 24 tirs, dont 15 cadrés).
Peut-être le résultat du travail minutieux du technicien portugais, que ce soit par vidéo ou sur le terrain. "Les joueurs adhèrent au discours", dit-il régulièrement dans des conférences de presse où il se force à parler en Français (alors que ses causeries dans le vestiaire ou ses commandements sur le terrain se font en anglais), afin d’envoyer un message plus direct aux fans, via les journalistes. "L’ambiance positive au sein du club a aussi été la clef de cette progression", insistent, en se rejoignant, différentes sources autour du groupe. Il l’encourage via des mots toujours bienveillants en fin de match, même après la défaite au Vélodrome et surtout après le 4-0 impeccable de Reims.
Avec un effet concret à Montpellier: les entrants sont décisifs. Charles apprécie: "C’est notable parce que ça peut être des gens qui amènent, quand il y a 1-0 en face ou il y a 1-1, le but de la victoire, la passe décisive qui va faire qu'on va gagner, se réjouit ce supporter. Ce n'est pas 11 joueurs qui sont titulaires qui nous rapportaient trois points, c'est 14, 15, 16 joueurs. Donc oui, c'est nouveau".
De l'intérieur aussi, à petite touche
Et même quand ça cafouille dans les remontées de ballons depuis l’arrière, il évoque "le courage" de ses hommes, à l’image de Lucas Perri, en difficulté sur la pelouse difficile du Groupama Stadium face à Reims. Une forme de "calinothérapie" appréciée à Décines. De quoi mieux faire passer le message "défensif", qu’il répète tout au long de ses prises de parole depuis son arrivée. Sa 7e conférence de presse à deux jours de la réception du PSG ne déroge pas à la règle: "Nous avons d’abord travaillé l’aspect défensif", insiste-t-il encore vendredi dernier. "Paulo Fonseca veut que tout le monde soit impliqué dans ce travail, et pas seulement les défenseurs", rapporte un habitué des séances au LOSC, du Portugais qui voit à Lyon, un groupe à "l’écoute et en plein progrès".
La vidéo inside de ses trois premières semaines, de son atterrissage à l’aéroport Lyon-Bron, le 30 janvier au match à Montpellier insiste justement sur cette minutie: on le voit imaginer la tactique sur tableau blanc avec ses adjoints puis replacer ses joueurs sur le terrain d’entraînement, se mettant même dans la peau de Lucas Perri pour lui montrer comment organiser les relances. "Avec calme, tu dois gagner du temps pour pouvoir tout voir". Visiblement, ce travail est apprécié: "Il est assez sur les détails, explique Alexandre Lacazette, le capitaine. Le coach sait ce qu’il veut et ce qu’il ne veut pas. Il est pointilleux sur certains détails et veut que l’on joue son football, ça passe par des consignes claires et du travail".
Encore beaucoup à faire
Les progrès se voient, grâce notamment à cette stabilité défensive retrouvée. "Mais c’était contre Reims et Montpellier", notent bon nombre d’observateurs. Il va aussi devoir intégrer Thiago Almada, le champion du monde argentin arrivé cet hiver dans une structure offensive qui tourne. Nuamah, Cherki, Mikautadze et Lacazette marquent, dans la foulée d’un Corentin Tolisso "plus fort que quand il est parti au Bayern, en 2017", note son complice et capitaine Alexandre Lacazette.
Mais Norvan Derderian tranche: "Sa patte, cela ne peut pas se juger en quelques matchs. C'est beaucoup trop tôt pour parler d'une patte quand il y a eu trois rencontres effectuées, notamment contre des équipes moins bien classées et on ne peut pas attendre non plus une saison complète. Je dirais quelques mois pour pouvoir évaluer un petit peu".
Avec un examen de passage qui donnera des indications sur les véritables progrès. Paulo Fonseca préfère dédramatiser: "Non, ce ne sera pas décisif pour le podium", note-t-il. Sans oublier l’ambition à avoir: "On aborde le match avec une grande détermination, annonce-t-il en conférence de presse. C’est une opportunité pour nous de montrer notre qualité et la progression de l’équipe. On travaille beaucoup. Le PSG est l’équipe la plus forte, ils ont un véritable collectif, ils pressent haut. On sait qu'il s'agit d'une des meilleures équipes d’Europe, ça sera difficile pour nous mais j’ai de la confiance et nous sommes très motivés. Nous devrons être à fond et faire un match parfait". Comme l’avait fait la formation dirigée alors par Bruno Genesio, le 3 février 2019 (2-1 avec des buts de Moussa Dembélé et Nabil Fekir).
Six ans après, les Lyonnais ne seraient pas contre d’interrompre la série actuelle des Parisiens, vainqueurs à quatre reprises au Groupama Stadium (et un nul) sur leurs cinq derniers passages, sans oublier le trois à la suite de la dernière saison, en Ligue 1 mais aussi en finale de la Coupe de France. Ultime détail: il y a 6 ans, le PSG se déplaçait pour le compte de la 23e journée, auréolé d’une série incroyable de 20 succès en 22 matches et chutait pour la première fois dans l’hexagone. Et devinez, cette opposition est positionnée à la... 23e journée et le PSG est… invincible. Un signe?