RMC Sport

Algérie-Cameroun: comment le bouillant stade de Blida est devenu le fief imprenable des Fennecs

placeholder video
L’Algérie s’apprête à accueillir le Cameroun, ce mardi (21h30), en barrage retour de la Coupe du monde 2022. Un choc programmé au stade Mustapha-Tchaker de Blida, à une cinquantaine de kilomètres au sud d’Alger. Une enceinte de 35.000 places réputée pour son ambiance volcanique, dans laquelle les Fennecs n’ont encore jamais perdu.

La vallée de la Mitidja est connue pour ses vignes et ses arbres fruitiers. Mais depuis une quinzaine d’années, cette vaste plaine du nord de l’Algérie est également un temple du ballon rond. Au niveau de la wilaya de Blida. C’est là, au pied des monts verdoyants de l’Atlas blidéen, que le stade Mustapha-Tchaker a été inauguré durant l’hiver 2001. A une cinquantaine de kilomètres au sud-ouest de la capitale. Deux décennies plus tard, il se dresse comme le fief imprenable des Fennecs...

L'écrin incandescent accompagne désormais les succès de l’équipe nationale et de son bouillant public. Depuis sa grande première en 2002 contre la République démocratique du Congo (2-2), l’Algérie n’a jamais perdu à Blida, où elle compte 36 victoires (dont 23 clean sheat) et 7 nuls en 43 matchs (118 buts marqués, 22 encaissés). Avec plusieurs soirées légendaires face au Sénégal (3-2 en 2008), à l’Égypte (3-1 en 2009) ou au Burkina Faso (1-0 en 2013).

"Le stade est petit, mais ça vaut un Vélodrome en fusion"

Après avoir longtemps voyagé entre Alger, Oran, Constantine ou Annaba, la sélection a noué une relation particulière avec ce petit stade de 35.000 places, ses deux tribunes principales et ses virages découpés en cinq blocs. Au point de ne plus vouloir le quitter. Les protégés de Djamel Belmadi ont d'ailleurs demandé à y disputer leur barrage retour de la Coupe du monde 2022, ce mardi face au Cameroun (21h30). "Les joueurs aiment jouer à Blida. Ils s’y sentent bien, ils ont leurs repères. C'est eux qui ont insisté pour jouer ici", a confié le sélectionneur en conférence de presse, trois jours après la victoire à Douala lors du match aller (0-1, but d’Islam Slimani).

Il faut dire que la ferveur est sans pareil dans l’enceinte de la "Ville des Roses", que l’équipe d’Algérie a un temps partagé avec l’USM Blida (désormais en troisième division). "L’ambiance est exceptionnelle, ça te met des frissons. C’est la Bombonera, décrit Smaïl Bouabdellah, journaliste chez Prime Video. Le stade est petit mais ça vaut un Vélodrome en fusion lors d’un gros match de Ligue 1. Il n’y a pas de spectateurs, que des supporters. Tout le monde chante. Ce n’est plus le douzième homme à ce niveau-là, c’est carrément le treizième homme!" "Ce stade est un porte-bonheur pour l’Algérie, appuie Ishaq Chebli, qui travaille pour DZ Foot. L’ambiance est vraiment énorme. J’y ai vu des matchs en tant que journaliste, mais aussi en tant que supporter, c’est incroyable. On a du mal à décrire cette atmosphère. Il faut le vivre. C’est magnifique."

Supporters algériens
Supporters algériens © Icon

"Tu peux mettre trois heures pour faire trois kilomètres"

Lorsque l’équipe d’Algérie est de passage, c’est le pays entier qui se rassemble à Blida. Les supporters affluent de toutes les régions, parfois plusieurs jours avant la rencontre. Certains dorment devant le stade pour ne pas manquer l’ouverture de la billetterie. Des files interminables et anarchiques se forment au bord des routes. Un joyeux désordre qui entraîne son lot de scènes cocasses et de débordements. "Quand tu entres dans Blida un jour de match, tu as l’impression d’être en opération commando, illustre Mohamed Brahdji, qui travaille lui aussi pour DZ Foot. La ville est quadrillée, totalement saturée. Il y a du monde partout, beaucoup de gens sans billet. Il y a trois kilomètres pour rallier l’entrée de la ville au stade. Tu peux mettre trois heures à les faire si tu n’as pas pris tes dispositions!"

Face à cet enthousiasme frénétique, les portes du stade Tchaker s'ouvrent dès le matin. Les premiers supporters prennent place dans les gradins près de dix heures avant la rencontre. Et il n’est pas rare de voir le stade afficher complet à l’heure du déjeuner. Avec souvent plus de monde que prévu à l’intérieur. "Les supporters chantent toute l’après-midi en attendant le coup d’envoi", témoigne Smaïl Bouabdellah. Portés par ce soutien massif, les joueurs viennent communier avec leurs fans au moment de la reconnaissance du terrain. Et lorsque la nuit tombe, l’enceinte se change en volcan. Avec une mer rouge de fumigènes dans les tribunes. "Pendant le match, certains supporters tirent des feux d’artifice dans les rues autour du stade. Ils font la fête dehors", complète Isaq Chebli.

"Les adversaires filment avec leurs téléphones"

De quoi transcender les Fennecs sur le pré. "C’est une forteresse où l’Algérie n’a jamais perdu. Ça galvanise les joueurs, c’est sûr. Ça les rassure aussi, même s’ils ne doivent rien entendre sur la pelouse", sourit Smaïl Bouadbellah. Les visiteurs en prennent également plein les yeux. "Lorsque les joueurs adverses entrent sur le terrain, ils sortent tous leur téléphone pour faire des vidéos, des storys et prendre des photos", raconte Ishaq Chebli. "J’ai discuté avec beaucoup d’adversaires de l’Algérie qui sont venus à Blida, ils disent tous que c’est magique, assure Mohamed Brahdji. Le stade est dans une cuve entourée de hauts sommets. Le public est en surchauffe. La ferveur est dingue. Ça a vraiment l’allure d’un coupe-gorge pour l’équipe adverse."

Après un coup de gueule de Belmadi il y a quelques mois, la pelouse, autrefois bosselée, a été refaite récemment. Elle est désormais impeccable. De quoi mettre les partenaires de Riyad Mahrez dans des conditions idéales à l'heure d'affronter leur destin. Leur dernière venue s’est soldée par un nul face au Burkina Faso, en novembre dernier (2-2). Un score qui les qualifierait cette fois face au Cameroun. Mais dans la fournaise de Tchaker, les vainqueurs de la CAN 2019 chercheront à offrir une victoire au peuple vert et blanc. Pour écrire une nouvelle page de la folle histoire de Blida. Avant de s’envoler pour le Qatar.

https://twitter.com/AlexJaquin Alexandre Jaquin Journaliste RMC Sport