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Coupe du monde: Bienvenue dans la fan zone des petites mains du Mondial

Coupe du monde 2022: Dans la fan zone pour les travailleurs migrants de Doha

Coupe du monde 2022: Dans la fan zone pour les travailleurs migrants de Doha - RMC SPORT

A 14 kilomètres du centre de Doha, un stade de cricket a été transformé en fan zone pendant la Coupe du monde. Loin de tout, elle est surtout destinée aux immigrés venus au Qatar pour travailler autour de la compétition, qui habitent tous aux alentours de cette zone industrielle.

Sauf à se perdre ou à se tromper d’adresse, aucun supporter présent à Doha pour la Coupe du monde ne verra ce lieu. Pour arriver devant ce stade de cricket, au milieu d’une énorme zone industrielle à 14 kilomètres de Doha, il faut faire 25 minutes de voiture. Cela prend un peu plus d’une heure en transport en commun.

Depuis le début de la Coupe du monde, ce stade a été transformé en fan zone. Les couleurs de la Coupe du monde, le turquoise, le rose, le bordeaux, s’affichent un peu partout. Un énorme écran a été installé. Sur la pelouse ou dans les gradins, pendant les matchs, aucune femme, mais des centaines d’hommes regardent les rencontres.

Coupe du monde 2022: Dans la fan zone pour les travailleurs migrants
Coupe du monde 2022: Dans la fan zone pour les travailleurs migrants © RMC SPORT

Les indications, ici, sont traduits en arabe, en anglais, comme dans toutes les zones FIFA. Mais aussi en hindi, langue parlée par la grande majorité de ces hommes. "Il y a des Ougandais, des Somaliens, des Indiens, des Kenyans, des Pakistanais, des gens du Bangladesh, du Népal. C’est génial, on suit tout ça tous ensemble", sourit Junaid, arrivé ici depuis sept mois. Tous sont des petites mains du Mondial: ils travaillent dans les hôtels, dans les stades, dans la sécurité, dans les zones d’accueil du public.

"On supporte nos équipes africaines"

"S’il n’y avait pas cette fan zone, on regarderait les matchs sur nos portables, en streaming, dans nos chambres. Ca serait quand même beaucoup moins confortable", explique Ephraim, originaire du Kenya. Son sourire semble sincère. Comme tous les autres, il est heureux d’être là. Ca se voit pendant le match. Quand le Maroc se qualifie face à l’Espagne, ils sont nombreux à sauter de joie. "On supporte nos équipes africaines", souffle un Ougandais.

Et même si on est loin de la ferveur du centre-ville de Doha, même s’il n’y a ici pas de drapeau et très peu de maillots de foot, personne n’a l’impression d’être exclu. "On a l'impression de vivre le Mondial de l'intérieur. On n'est pas mis de côté. On vit cette Coupe du monde", insiste Junaid. "Ils ont amené la Coupe du monde jusqu’à nous", explique un autre travailleur. "Et puis ce n’est pas si loin que ça. Moi j’habite à même pas deux kilomètres", insiste Ephraim.

Car tous habitent dans cette zone industrielle. Après la rencontre, Lauben, un Ougandais de 28 ans m’emmène jusqu’à son logement. Un bâtiment de 4 étages, à une vingtaine de minutes de marche du stade de cricket. Dans les couloirs, une quinzaine de ces compatriotes s’amusent et prévoient leur programme du lendemain. Tous travaillent dans le même hôtel.

"Je n’aurais jamais pu gagner autant en Ouganda"

"Ca c’est ma chambre", lance Lauben, en poussant une porte. On entre dans une pièce d’une dizaine de mètres carré. Dix casiers, cinq lits superposés et une petite table basse composent le mobilier. "On est dix à vivre ici". La pièce suivante, c’est la cuisine commune. Un réfrigérateur, deux lavabos, une fontaine d’eau potable et trois gazinières pas vraiment en bon état.

"C'est très bien, je suis bien ici. Mon logement est pris en charge par mon employeur. En arrivant, je m'attendais à quelque chose de plus grand mais on s'en satisfait." Pour lui, comme pour tous les autres, venir ici est une réelle opportunité économique. Il explique gagner 1 300 rials qataris par mois, soit environ 350 euros. "Je n’aurais jamais pu gagner autant en Ouganda, les salaires sont bien moins importants."

De ce salaire, il ne garde que le minimum pour vivre. Il envoie le reste à sa famille. Lauben a signé un contrat de deux ans. Après ça, il rentrera en Ouganda pour trouver d’autres opportunités professionnelles. En attendant, il va continuer de travailler à l’hôtel de 8h à 17h. Et le soir, jusqu’à la fin du Mondial, il ira à la Fan Zone située à vingt minutes de chez lui. "J’aimerais aller au stade. Mais c’est trop cher. Une place coûte un mois de salaire pour moi. Je sais pourquoi je suis venu, je connais mes motivations: aider ma famille. La Fan Zone, c’est gratuit, et c’est très bien!"

Par Martin Bourdin, à Doha