Le dernier héritage de Mandela

Des portraits de Mandela qui recouvrent les murs de Soweto - -
Zurich, le 7 juillet 2000, pour la première fois de son histoire le Comité exécutif de la FIFA doit procéder à un troisième tour pour désigner la prochaine nation hôte de sa phase finale, en l’occurrence celle de 2006. L’Afrique du Sud est en finale contre l’Allemagne qui la coiffe sur le poteau : 12 voix contre 11. L’Afrique n’aura pas sa première Coupe du Monde, l’influence et le charisme de Kaiser Franz Beckenbauer ont fait la différence. Mais Danny Jordaan et la délégation sud-africaine ont la sagesse de se montrer dignes, au point d’impressionner Sepp Blatter qui avait fait d’eux ses favoris. Le président du foot international est alors convaincu que l’édition 2010 doit se jouer en Afrique. Enfin.
La décision est prise : l’Afrique du Sud repart immédiatement en campagne. La vision de Nelson Mandela de réunifier son pays et lui redonner lustre et identité à travers le sport doit se concrétiser. Dès son arrivée au pouvoir en 1994, le prix Nobel de la Paix avait fait de cette candidature une cause nationale. L’organisation réussie de la Coupe du Monde de rugby 1995, avec victoire des Springboks à domicile et naissance aux yeux du monde de « la nation arc-en-ciel » l’a conforté dans cette conviction.
Trois Prix Nobel et des légendes du foot
Pour cette deuxième tentative, les Sud-Africains ne négligent aucun détail. Le nouveau président Thabo MBeki, Nelson Mandela lui-même et son fidèle Danny Jordaan, ancien comme lui de l’ANC, le Congrès National Africain anti-apartheid, battent la campagne sur le thème : notre candidature est celle de toute l’Afrique. Après des mois de lobbying et des milliers d’heures de vol pour prêcher la bonne parole auprès des décideurs de la FIFA, leur oral du 15 mai 2004 devant le Comité exécutif sera un modèle du genre. Crédibilisée par la présence de trois prix Nobel, Nelson Mandela, Frédérik De Klerk et Desmond Tutu plus quelques légendes du football africain comme George Weah, Roger Milla ou Abedi Pelé, la candidature sud-africaine l’emporte 14 à 10 face au Maroc.
C’est toute une nation qui explose de joie. Ce 15 mai devient la troisième date la plus importante du processus de réunification du pays après celles de la sortie de prison de Nelson Mandela en 1990 et du titre mondial des Springboks en 1995. Point commun à ces trois étapes cruciales : Mandela. Le fil conducteur, le talisman qui a redonné fierté et espoir à tous les habitants d’un pays divisé et meurtri et convaincu les élites du football mondial. « C’est d’abord la Coupe du Monde de Mandela », affirmait encore il y a quelques heures l’actuel Président de la république sud-africaine, Jacob Zuma. « Nous devons mettre fin à la discrimination et au racisme », ajoutait hier le boss de la FIFA Sepp Blatter. Autant d’hommages en prélude à l’immense acclamation que recevra « Madiba », son surnom en Afrique du Sud, en s’asseyant dans quelques heures sur son siège du Soccer City stadium. Le coup d’envoi de la première Coupe du Monde africaine dans le quartier du militant Mandela ? Quelle évidence, finalement…