Riolo: "Souvenirs et émotions"

La cérémonie d'ouverture (dont on se fout globalement toujours), passée, un Russie/Arabie Saoudite, anecdotique, avalé et on pourra envisager les choses sérieuses. Il y a différentes façons d'approcher une Coupe du Monde. Malheureusement, la culture du résultat, de la performance a gagné du terrain ces dernières années. On s'est gavé ces jours-ci du succès de 1998. Le 3/0. Ça a un peu viré à la nausée.
On ne voit le Mondial que sous l'angle du "qui va gagner", qui va marquer le plus de buts. C'est le sempiternel refrain du "favori"! On est tous devenus bookmakers. On fait des paris. On a travesti notre esprit et notre regard sur le sport, et en l'occurrence le foot, le Mondial! Évidemment, on attend tous les champions du monde, les héros, surtout si ce sont les nôtres. Mais une Coupe du Monde, ça ne peut pas n'être que ça!
Chaque Coupe du Monde propose son album souvenir
C'est étonnant de constater qu'avec le temps, ce qui reste des Coupes du Monde, ce ne sont pas forcément des succès, des victoires! De 1970, on se souvient autant des deux actions de légendes ratées de Pelé (lob du milieu de terrain et grand pont sur feinte), que du but en finale de Carlos Alberto. De 1982, je n'oublierai jamais Zico/Socrates/Eder. Ils n'ont pas gagné. Ils ont perdu tôt, et pourtant j'en suis sûr, c'étaient eux, les plus forts! De 82 encore, qui a oublié la plus belle et tragique défaite de notre foot? De 1986, on préfère le quart entre l'Argentine et l'Angleterre ou la finale?
Chaque Coupe du Monde propose son album souvenir. Il y a ceux qui transcendent les passions personnelles. Ca c'est le lot des Pelé, Maradona, Cruyff, Zidane. Et puis, il y a les autres. Chaque pays a ses souvenirs, ses émotions. Un petit pays comme l'Écosse s'accroche encore au but d'Archie Gemmill en 1978 contre les Pays-Bas. L'Algérie n'a jamais oublié 1982.
On veut des buts façon James 2014, Bergkamp 1998
Les tactiques, les schémas, les statistiques, on se garde ça pour nos championnats, la Ligue des Champions. Un Mondial, c'est au-delà de tout ça! On veut voir des favoris s'écrouler comme l'Espagne en 2014. Une tragédie comme celle du Brésil dans cette même Coupe du Monde. Un match aussi fou que Ghana/Uruguay en 2010. On veut voir Messi et Ronaldo briller pour leur pays! Découvrir des joueurs, même s'ils ne brillent qu'un été... On veut des buts façon James 2014, Bergkamp 1998. Je pourrai remplir des pages entières de petits bouts de Coupe du Monde. J'en veux encore. Je veux empiler dans tous les coins. Et pas forcément des résultats et des victoires...