Vieira – Benzema : pourquoi ils ont été écartés

A des degrés divers, les deux grands perdants de la liste des 30 paient des relations difficiles avec Raymond Domenech.

Vieira, le coup de grâce
L’histoire retiendra sans doute que Patrick Vieira a fêté la dernière de ses 107 sélections face au Nigéria (0-1) en juin 2009. Mise à part la forme quelque peu cavalière (Domenech n’a pas pris la peine de l’appeler), cette éviction ne sonne pas comme une injustice. Depuis deux ans, la carrière de Pat le Long est pourrie par une litanie de blessures. Le joueur a essayé de forcer le destin en signant au Mercato à Manchester City.

Le sélectionneur a même fait semblant d’y croire. « Pat est plus que candidat à l’équipe de France, lançait-il en janvier, mais il a besoin de jouer ». Vieira a disputé douze matches dont sept comme titulaire. Trop peu pour convaincre… D’autant que le joueur traîne comme un boulet le douloureux épisode de l’Euro 2008 lorsqu’il est arrivé blessé à la cuisse en Suisse. Jean-Pierre Paclet, médecin des Bleus à l’époque, admet que ce jour-là Domenech avait cruellement regretté d’avoir enfreint la règle d’or qu’il s’était fixée en tant que sélectionneur : ne jamais coucher sur une liste le nom d’un joueur blessé. « L’égo de Vieira lui interdit d’être sur le banc », lâche Paclet. Sa blessure avait surtout parasité l’ambiance au sein du groupe.

Pas question de commettre deux fois la même erreur. « C’est un déchirement, a plaidé Domenech mardi soir, mais il faut juger d’une manière professionnelle. Et j’ai estimé que c’était difficile par rapport à sa saison. »

Benzema, la sanction
On ne peut pas accabler Zahia de tous les maux. Si l’implication de Karim Benzema dans la ténébreuse affaire n’a pas aidé à sa sélection, elle n’a pas non plus guidé à son éviction de la liste des 30. Mais on aborde là un domaine comportemental qui a pesé lourd dans le choix de Raymond Domenech. Quand le sélectionneur le justifie par des « critères pas forcément visibles », il évoque cet Euro 2008 où des clans intergénérationnels se sont formés, les jeunots s’isolant de l’expérience des cadres. Il pense aussi aux déclarations de Benzema après le match face à la Roumanie, en septembre dernier. Rentré en fin de match, il avait déclaré ensuite qu’il n’avait pas eu « envie de tout donner ». Des propos suicidaires aux yeux de Domenech qui aura sanctionné un élève hyper doué mais insolent.

Absent des trois derniers matches des Bleus, son temps de jeu minimal à Madrid a évidemment été un obstacle. Il y est surclassé par Higuain, n’a été titulaire que 14 fois cette saison pour huit buts en Liga. C’est peu. Mais Henry ou Lassana Diarra, son partenaire au Real, ont eux aussi très peu joué ces derniers mois. Hier après-midi, au cours d’une conférence de presse à Madrid, Benzema avait anticipé son absence en Afrique du Sud : « Je serais déçu, mais pas abattu », avait-il déclaré. A 23 ans, « il a tout l’avenir devant lui », a rassuré Domenech. Maigre consolation.

Louis Chenaille et Silvère Beau