Avec un quatrième sacre record à l'Euro, l'Espagne achève un parcours parfait salué de tous: récit d'une soirée historique

Elle a mis du temps à se lancer mais la finale de l'Euro 2024 aura finalement tenu toutes ses promesses. Après une première mi-temps terne, l'Espagne a pris le dessus sur l'Angleterre (2-1) au stade olympique de Berlin, et est devenue la nation la plus titrée de la compétition.
Si, en ce jour de fête nationale française, les Bleus n'étaient pas sur la pelouse, l'affiche n'en restait pas moins alléchante entre deux équipes au destin opposé. D'un côté, l'Espagne, invaincue jusqu'alors dans la compétition, en quête d'un quatrième titre continental inédit. De l'autre, une Angleterre poussive, menée au score lors de chacun de ses matchs de phase finale, tentant de mettre fin à 58 ans de disette depuis son titre au Mondial 1966. Une opposition de styles, aussi, avec Roja impressionnante collectivement face à des Three Lions davantage portés par leurs individualités.
Mais entre ces deux équipes, chacune solides dans leur domaine, le match a longtemps été fermé. La première période, peu flamboyante, a vu des Espagnols fidèles à leurs principes, monopolisant le ballon. Mais peu inspirés, ils peinaient à changer de rythme et déséquilibrer la défense anglaise, jamais inquiétée. Les hommes de Gareth Southgate, eux, réussissaient bien quelques assauts dans le camp adverse, rapidement repoussés par la Roja, mais impressionnaient par leur solidarité défensive.
Une deuxième période bien plus attrayante
Si Harry Kane et les siens avaient réussi à faire bloc pendant les 45 premières minutes du match, ils ont été les premiers à craquer, dès le début de la seconde mi-temps. Quelques instants après la reprise, le jeune prodige Lamine Yamal plaçait une accélération dévastatrice et trouvait à l'opposé Nico Williams dans la surface de réparation anglaise, qui ne tremblait pas pour envoyer le ballon dans les filets de Pickford.
A nouveau séduisants et sereins, beaucoup plus précis techniquement, les hommes de Luis de la Fuente ont alors montré un tout autre visage. Dani Olmo aurait pu permettre à la Roja de prendre le large quelques secondes plus tard si sa frappe n'avait pas été trop croisée. Plus entreprenants, les Espagnols ont enchaîné plusieurs actions dangereuses et ont semblé proches de faire le break, sans succès.
Des occasions manquées qu'ils ont fini par payer à la 72e minute. Sur une remise en retrait de Jude Bellingham, Cole Palmer, démarqué, ouvrait son pied et trompait Unai Simon pour relancer la partie. Un nouveau souffle pour les Anglais, initié à l'heure de jeu par Gareth Southgate qui avait procédé à ses premiers changements et fait le choix fort de sortir son capitaine Harry Kane, remplacé par Ollie Watkins. Le même qui était entré en jeu à sa place en demi-finales à un peu moins de dix minutes du terme, et qui avait inscrit le but de la victoire face aux Pays-Bas.
Mais après avoir laissé passer l'orage, c'est bien la Roja qui repartait de plus belle et reprenait l'avantage à la 86e minute. Sur un une-deux d'une quinzaine de mètres, Mikel Oyarzabal, à la limite du hors-jeu, précédait Saka et trompait Pickford sur le centre fort de Cucurella. Complètement emballée, la finale, arbitrée par le Français Froiçois Letexier, a failli basculer à nouveau quelques minutes plus tard: sur un corner, les Anglais ont tiré à trois reprises, butant sur Simon puis Olmo. En vain.
Lamine Yamal élu meilleur jeune de cet Euro
Invaincue dans la compétition, avec des victoires sur l'Italie et la Croatie en phase de groupes puis l'Allemagne et la France en quarts et demi-finales, l'Espagne s'impose finalement logiquement. "C'est la meilleure équipe du tournoi. Ils le méritent", a réagi, fair-play, Gareth Southgate sur la BBC à l'issue de la rencontre. Avant même le coup de sifflet final, le contraste était saisissant entre les deux équipes. Alors que les Three Lions poussaient pour tenter de revenir, certains Espagnols submergés par l'émotion ne pouvaient se retenir de lâcher quelques larmes. Puis laissaient éclater leur joie.
Pour les Anglais, déjà battus en finale en 2021 - face à l'Italie aux tirs au but -, l'histoire se répète malheureusement. Tête basse, yeux rougis, le regard vide et la tête entre les mains, Harry Kane et ses coéquipiers ne cachaient pas leur déception. L'attaquant de 30 ans, auteur de plus de 400 buts en clubs et en sélection, devra encore attendre pour remporter un premier titre dans sa carrière. "Ce n'est jamais facile mais nous avons montré une incroyable résilience, du caractère pour en arriver là mais il faut transformer quand c'est possible et nous ne l'avons pas fait. C'est très douloureux, et ça va faire mal pendant un moment, a-t-il confié après le match sur ITV. Tout ce qu'on peut dire, c'est merci aux supporteurs, à ceux qui ont cru en nous, nous reviendrons."
Alors que les supporteurs anglais, venus en nombre - près de 50 000 personnes dans un stade de 70 000 places -, quittaient les gradins avant la cérémonie, Rodri recevait le trophée de meilleur joueur du tournoi tandis que Lamine Yamal était nommé meilleur jeune du tournoi. L'attaquant, auteur de quatre passes décisives et buteur à une reprise - face à la France - lors de cet Euro, est devenu le plus jeune joueur à participer à une finale d'un tournoi majeur. A 17 ans et un jour, il a battu le record de Pelé détenu depuis la Coupe du Monde 1958 (17 ans et 249 jours).
"C'est sûrement le plus beau jour de ma vie sportive. On est une famille et maintenant nous sommes la sélection la plus titrée à l'Euro, s'est réjoui Rodri à la TV espagnole. Je demande aux gens de sortir demain dans la rue et de se sentir fiers." Entre ce titre et le sacre de Carlos Alcaraz à Wimbledon un peu plus tôt dans la journée, les Espagnols ont en effet de quoi être fiers.