Euro 2016: comment l’Islande s’est invitée parmi les grands

- - AFP
Des installations enfin adaptées au froid
Son nom signifie « terre de glace ». Une description qui colle plutôt bien à l’Islande, cette île de l’Atlantique Nord, coincée à mi-chemin entre la Norvège et le Groenland, où le mercure atteint péniblement les 13 degrés en été. Autant dire que le monoï ne fait pas un carton dans le pays. Les pelouses sont le plus souvent blanches, dures et bosselées. Pas l’idéal pour jouer au football. A moins de construire des terrains synthétiques, couverts et accessibles à tous. C’est la petite révolution qu’a entrepris l’état insulaire il y a une dizaine d’années. Et il en récolte aujourd’hui les premiers fruits. « Pendant longtemps, il n’y avait que des terrains en gravier et ils étaient souvent gelés, explique Geir Thorsteinsson, le président de l’Association de football d’Islande (KSI). Maintenant, nous disposons de terrains artificiels couverts. C'est l'idéal pour la longue trêve hivernale en Islande (d’octobre à avril, ndlr). Ça nous aide à développer notre football ».
Un système de formation renforcé
L’Islande compte environ 325 000 habitants. Soit un peu moins que la ville de Nice. Un réservoir restreint qui a longtemps été exploité avec les moyens du bord. Sans encadrement ni structure digne de ce nom. Pendant des années, ce sont les parents et les grands frères qui ont joué les entraîneurs de fortune pour les équipes de jeunes. Même à un bon niveau. Mais là encore, la KSI, avec l’appui du gouvernement, a développé un système de formation afin de pouvoir s’appuyer sur des coaches diplômés. Des stages de détection ont également vu le jour pour les U15 et U17. Une batterie de mesures qui permet aujourd’hui aux 22 000 licenciés de l’île de bénéficier d’un accompagnement de qualité. Dès leurs premiers dribbles.
Des joueurs qui s’expatrient
Désormais, les plus beaux joyaux du pays s’exportent dans toute l’Europe. Dans des ligues mineures, en Norvège ou au Danemark. Mais aussi dans les championnats les plus renommés comme l’Angleterre, l’Italie ou l’Espagne. Un exode massif qui profite évidemment à l’équipe nationale. Loin du monde amateur qui a longtemps bercé leur petit pays, les Islandais se familiarisent avec le très haut niveau. Et gagnent en expérience, à l’image d’Alfred Finnbogason (Olympiakos), meilleur buteur du championnat néerlandais en 2014 avec Heerenveen, Gylfi Sigurdsson (Swansea) ou Kolbeinn Sigthorsson, passé de l’Ajax Amsterdam à Nantes cet été.
Un coach qui fait l’unanimité
C’est le visage de cette Islande qui gagne. Depuis son arrivée en 2011, Lars Lagerbäck a fait progresser une nation qui pointe désormais au 23e rang du classement FIFA, soit une place devant… la France. A 67 ans, le coach suédois dépasse largement ses fonctions de sélectionneur. Il accompagne également le développement global du football dans le pays. A la tête de la première génération formée sur les pelouses indoor, l’ancien entraîneur du Nigeria a amené de la rigueur tactique et de la discipline. Sous ses ordres, l’Islande a manqué de peu d’accrocher un billet pour la Coupe du monde au Brésil, battue en barrages par la Croatie. C’est finalement en France que les Islandais disputeront leur première grande compétition internationale après avoir décroché dimanche un nul suffisant contre le Kazakhstan (0-0). Un résultat historique que Lagerbäck accueille avec modestie. « Je ne suis pas un héros national. Des gens tels que Mandela ou Martin Luther King sont des héros. Je suis juste un entraîneur de football, a confié celui qui doit laisser les commandes de la sélection à son adjoint islandais Heimir Hallgrímsson après l’Euro 2016. C'est incroyable de travailler avec ces joueurs. Nous sommes qualifiés à deux matchs de la fin. C'est quelque chose de fantastique. »
Un héritier à Eidur Gudjhonsen
Il a pris sa retraite le soir de la défaite face à la Croatie, en novembre 2013. A 35 ans. L’Islande a alors dû se mettre en quête d’un successeur à Eidur Gudjhonsen, l’une des rares stars de l’histoire du pays, passée par le FC Barcelone et Chelsea. Mais elle l’a peut-être déjà trouvé avec Gylfi Sigurdsson. Fer de lance de la génération 1989, première à se qualifier pour un Euro Espoirs il y a quatre ans, le milieu offensif de Swansea a tout d’un grand. Son doublé contre les Pays-Bas, un penalty et une superbe reprise du droit, l’ont rappelé à tout le continent. Avec cinq buts et deux passes décisives en huit matches, l’ancien joueur de Tottenham s’est montré redoutable lors des éliminatoires de l’Euro 2016. Et compte bien prolonger le plaisir dans neuf mois en France.