
Coupe de France féminine: Yzeure face au plus grand défi de son histoire
“Dire qu’on ne pense pas au PSG, ce serait vous mentir”. Dix jours avant la finale de la Coupe de France féminine contre le Paris Saint-Germain, Christine Manie avait conscience de l’importance d’un tel rendez-vous. La capitaine d’Yzeure (38 ans), plus petit budget de D2, n’en est pas à son premier coup d’essai: elle a connu deux Coupes du monde, les Jeux olympiques 2012 et sept Coupes d’Afrique des nations avec le Cameroun. Et la défaite concédée le week-end dernier contre Mérignac-Arlac (3-1) est un léger frein dans la saison déjà exceptionnelle du FFYAA (Football féminin Yzeure Allier Auvergne).
“On ne se fait pas d’illusions, il y a dix classes d'écart”
Malgré le peu de moyens et un budget évalué à 270.000 euros, le club de l’Allier est actuellement 3e du groupe B en D2 (35 pts), juste derrière Rodez, promu en D1 (48 pts), et Nice (37 pts), son dernier adversaire en championnat (22 mai). Si le championnat reste la priorité, cette finale de Coupe de France face aux championnes de France en titre, dont le coup d'envoi sera donné dimanche à 18h15, est “la cerise sur le gâteau” pour Renaud Fabre, le directeur général du club. “C’est un exploit inimaginable. L’engouement est énorme de la part d’une ville de 12.000 habitants. On ne se fait pas d’illusions. Il y a dix classes d’écart. Mais s’il y a des cadeaux, on les prendra. Si on compare nos moyens, on peut se payer une joueuse du PSG avec notre budget, et pas n’importe laquelle (rires). Ce n’est que du bonus, mais les filles se préparent normalement, sans pression. Le groupe ne se prend pas la tête.”
Ce n’est pas Ophélie Meilleroux qui dira le contraire. L’ancienne internationale française (67 sélections) est venue au secours de l’équipe première en février dernier après le départ de Théodore Genoux. Le tout en conservant sa casquette de vice-présidente du club et son autre travail à Bourbon-Lancy (Saône-et-Loire), où elle exerce comme employée des services techniques de la ville. “J’ai repris le groupe il y a trois mois et, parfois, c’est difficile de tout gérer en même temps. Pour l’instant, je fais au mieux. Mais ce club me tient tellement à coeur”, confie celle qui a été formée à Yzeure.

Un petit poucet pas impressionné
Au milieu de son emploi du temps bien rempli, Ophélie Meilleroux a programmé avec minutie les derniers jours avant le grand rendez-vous au stade Gaston-Gérard de Dijon. Cinq séances d’entraînement, dont une veille de match très légère, pour essayer de contrecarrer les plans de Marie-Antoinette Katoto et Kadidiatou Diani. “Cela reste un match de foot, il peut se passer beaucoup de choses en 90 minutes. On rêve, mais on garde aussi les pieds sur terre", ajoute de son côté Christine Manie, qui a déjà affronté certaines joueuses lorsqu’elles évoluaient en sélection. "Le groupe est jeune et cosmopolite, mais avec beaucoup de maturité, poursuit-elle. Quand on joue les meilleures, ça nous pousse forcément à être meilleures nous-même.”
Cette finale de Coupe de France est pour une grande partie du groupe le match d’une vie, y compris pour la capitaine du FFYAA, également animatrice dans les écoles et coordinatrice de l’école de football. “C’est le plus beau moment par rapport à mon âge. Certes, j’ai connu deux Coupes du monde et les JO, mais j’étais jeune. Objectivement, jamais je n’aurais imaginé disputer un tel match à 38 ans.” L’internationale camerounaise refuse même d’évoquer le dernier grand match de sa carrière et envisage un parcours à la Formiga (44 ans), ancienne joueuse du PSG et désormais à São Paulo. “Elle me bluffe et je me suis inspirée d’elle. Je l’ai affrontée aux Jeux olympiques d’ailleurs! Mais Christine Manie est encore sur le terrain. À un moment donné, le corps dira stop, mais je garde toujours la motivation.”
Des moyens médiocres…
Une motivation transmise à ses coéquipières, ultra-motivées pour ce grand rendez-vous, malgré le prestige de l’adversaire. “Le PSG est l’une des meilleures équipes du monde et rivalise avec Lyon ces dernières saisons, constate Ophélie Meilleroux. Ce sera l’occasion de se comparer au niveau de la D1 et de voir ce qu’on vaut face aux meilleures. C'est aussi une récompense pour l’ensemble de la saison parce qu’elles ont fourni beaucoup d’efforts. Les filles méritent cette finale et elles montrent une énorme envie. J’ai rarement vu une force mentale aussi impressionnante.”
Les Yzeuriennes gardent la pêche malgré un environnement peu évident. Beaucoup d’entre elles viennent au stade Bellecombe en trottinette ou à vélo et travaillent à côté. “On a des conditions d’entraînement médiocres. On n’a pas de moyens pour avoir une structure professionnelle qui faciliterait la récupération. Nous avons seulement trois joueuses sous contrat fédéral”, poursuit la coach. À titre de comparaison, les Parisiennes ont toutes un contrat fédéral amélioré (il n’y a pas de contrat professionnel dans le foot féminin).

…mais un engouement présent
Pourtant, les supporters se mobilisent pour venir encourager leur équipe. “Des bus ont été affrétés pour transporter les Yzeuriens qui veulent venir à Dijon. On espère avoir quelque 400 ou 500 fans. On avait réussi à attirer 1.900 personnes pour la demi-finale à la maison contre Nantes”, soulignait Renaud Fabre il y a dix jours. Quelques heures avant le coup d'envoi, les espoirs sont au-delà des attentes. Plus de 1.000 supporters ont déjà réservé leur place pour parcourir les 200 kilomètres qui les séparent de la Côte d’Or.
Après Évian (2-2 puis 5-3 aux tirs au but), Toulouse (1-1 puis 5-4), Lille (1-1 puis 5-4), Rodez (1-0) et Nantes (3-1), Yzeure est en quête d’un nouvel exploit retentissant pour faire chuter le champion de France après un sans-faute historique.