Le sexe avant une compétition, est-ce vraiment un problème?

"Mes joueurs font l'amour avec leurs copines trop souvent, c'est pour cela qu'ils ne jouent pas bien au football ces derniers temps." Voilà comment Gigi Becali, le richissime et odieux propriétaire du FSCB (anciennement Steaua Bucarest), est récemment venu expliquer en conférence de presse les mauvais résultats de son club. Selon lui, trop de sexe serait préjudiciable à la santé physique des sportifs.
Tout le monde croit que le sexe est mauvais
Becali n’est pas le premier à tenir un tel discours. Avant lui, la médecin du club russe du Spartak Moscou, Victoria Gameeva, avait conseillé à ses joueurs d'éviter toutes relations sexuelles. D’après elle, "le sexe stimule la capacité de travail uniquement chez les femmes. Dans les arts martiaux, il arrive qu'une athlète féminine puisse se battre juste cinq ou dix minutes après avoir eu une relation sexuelle et que ses résultats soient meilleurs, expliquait-elle. Mais ça ne marche pas dans l'autre sens. Les hommes devraient éviter le sexe deux ou trois jours avant le match."
Les autres exemples sont légion. Entre Safet Susic, le sélectionneur de la Bosnie lors du Mondial 2014, qui avait interdit à ses joueurs toute relation sexuelle durant la compétition, "même la masturbation", ou encore Mohamed Ali, en boxe, qui s’imposait l’abstinence six semaines avant un combat, les sportifs tenteraient parfois de refroidir leurs ardeurs.
D’après Francis Collier, médecin au CHRU de Lille, "deux athlètes de haut niveau sur trois jugent inopportun le rapport sexuel avant un événement sportif. […] C’est essentiellement le risque de perte d’énergie, physique et mentale, qui les conduirait à ne rien faire".
Aucune étude ne démontre l'effet négatif du sexe avant une rencontre
Mais que dit la science à ce sujet? Est-on vraiment sûr que l’abstinence est un moyen de soutenir les performances ou, au contraire, que l’activité sexuelle les altère? En fait, les travaux universitaires semblent infirmer tout cela. Absolument rien ne dit que le sexe avant une rencontre est préjudiciable.
Dans leur article "Est-ce que le sexe la nuit avant une compétition altère la performance?", les chercheurs canadiens Samantha McGlove et Ian Shrier ont suivi une centaine de sportifs professionnels et amateurs, dans de nombreuses disciplines différentes, allant du tennis à la course à pied en passant par le football et le basket, pendant plusieurs années. Ils se sont focalisés sur leur consommation de sexe avant, pendant et après un tournoi ou une compétition importante. Résultat? Faire l'amour avant n'altère en rien l'endurance et la force physique. En matière de consommation énergétique, cela représente entre 25 et 50 calories perdues, soit l'équivalent de deux étages montés par les escaliers, avec plus ou moins d'effort.
Une légende, et même une excuse
Avant eux, le physiologiste américain du sport Tommy Boone a montré qu’une pratique sexuelle n’avait aucune impact sur la force physique. Il a suivi une dizaine d’athlètes et noté leur performance respective sur un tapis de course avant et douze heures après une relation sexuelle. Conséquence: aucune différence significative n’est à signaler.
Constat confirmé par une autre étude similaire réalisée en Suisse. Les cardiologues de l’Hôpital universitaire de Genève ont suivi huit joueurs de football professionnel, cinq marathoniens et deux haltérophiles, tous ayant une vie sexuelle active, pendant quatre jours. Les deux premiers jours, ils leur ont fait subir une série de tests physiques, sans que ces derniers ne modifient leurs pratiques sexuelles. Puis ils leur ont demandé de cesser toute activité charnelle pendant deux jours. Leurs résultats ont montré "que l'activité sexuelle n'a eu aucune influence néfaste sur la charge de travail maximale obtenue et sur la concentration mentale des athlètes".
Dit autrement, c’est donc bel et bien une légende que de croire que le sexe altère les performances sportives des athlètes. Une légende, ou plutôt une fausse excuse pour expliquer des défaites…