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Les clubs français lorgnent vers le modèle allemand

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Il y a trois mois, l’affaire du bus de Knysna mettait en exergue les travers d’un football français à l’image de plus en plus écornée. Joueurs au comportement inacceptable, entraîneurs impuissants, dirigeants dépassés, public écœuré… Enquête sur les causes d’un malaise bien plus profond qu’il n’y paraît. Troisième et dernier volet : les clubs français se cherchent un nouveau modèle de financement.

Le football français est en grande difficulté économique. Si les comptes de la FFF n’inquiètent pas outre mesure (1,36 M€ de déficit), ce n’est pas le cas de la Ligue de football professionnel. Les clubs de Ligue 1 et Ligue 2 ont connu à l’issue de l’exercice 2009/2010 des pertes record à hauteur de 180 M€ dont 140 M€ pour la seule L1. Lyon, locomotive du foot tricolore depuis dix ans, a dévissé : 35,6 M€ de pertes.

Le président Aulas a beau parler d’« accident », la tendance est lourde. Le foot hexagonal plonge dans le rouge pour le second exercice consécutif (33,5 M€ 2008/2009). Principale cause : l’ultra dépendance des clubs français à l’égard des droits télés : 56% des revenus contre 42% pour l’Espagne, 38% pour l’Angleterre et 35% pour l’Allemagne ; seule l’Italie faisant « mieux » que la France avec 62%.

Au début de l’année 2008, le président Thiriez se réjouissait de l’issue des négociations pour la période 2008-2011. « Comme nous l'avions toujours dit, le football français, malgré le contexte difficile, a augmenté le montant de ses droits (668 M€, ndlr). Nous sommes extrêmement satisfaits du résultat obtenu dans un contexte qui, à beaucoup d'égards, peut être considéré comme difficile. »

Depuis, la crise est passée par là : Orange se retire, Canal + ne veut pas donner plus. La Ligue envisage de créer sa propre chaine de télévision mais l’époque du tout Droits TV est révolue. « Les revenus ont été consommé pour acquérir des joueurs, déplore Jean-François Lamour, ministre des Sports en 2002 au moment de l’envolée des droits. La préconisation du président de la Ligue de consacrer 10% de la nouvelle manne financière à la création ou à la consolidation d’actifs n’a pas été suivie. On a assisté à une course à l’armement plutôt qu’a l’assainissement des comptes. »

La baisse continue des droits de mutation (revenus tirés des transferts), soit 20% des recettes des clubs de l’Hexagone, ne fait que rendre plus urgent l’impératif d’un redéploiement des sources de revenus du foot tricolore.

Thiriez : « C’est l’avenir du foot français qui est en jeu »

Comment s’en sortir ? « Il est temps de rénover le modèle de financement du foot français, il faut que les clubs possèdent leurs stades d’où ils tireraient de nouvelles sources de revenus », avance Rama Yade, la secrétaire d’Etat aux Sports. Le modèle d’outre-Rhin semble être l’exemple à suivre. « Les Allemands ont des stades modernes, le Mondial 2006 y est pour beaucoup, explique Francis Graille, ancien président de Lille et de Paris. Ils sont arrivés à trouver un équilibre entre les recettes marketing, la billetterie et les droits TV. »

Le Bayern Munich dégage 55% de ses revenus du marketing contre seulement 24% en provenance des droits TV. En France, un spectateur dépense en moyenne 5€ quand il va au stade, soit deux à trois fois moins qu’en Angleterre ou en Allemagne. Les nouvelles enceintes en prévision à Lyon et à Lille doivent permettre de corriger le tir. Dans cette optique là, de nouvelles recettes liées à la construction ou à la rénovation de stades pour l'organisation de l'Euro 2016 sont attendues.

En 2014, date de mise en service de la plupart des nouvelles enceintes (4 nouveaux stades et 7 rénovés pour un budget de 1,7 milliard d’euros), la capacité moyenne d’accueil passera de 27 000 à 35 000 spectateurs. Un impératif pour palier les revenus tirés d’un marché frappé par la crise. « C’est l’avenir du foot français qui est en jeu », lançait sans détour, Frédéric Thiriez, au lendemain de l’attribution de l’Euro 2016 à la France.