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The Best: Modric, le retour dans l'ombre

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Elu meilleur joueur Fifa il y a tout juste un an, après une nouvelle victoire en Ligue des champions avec le Real, et une finale de Coupe du monde avec la Croatie, Luka Modric a depuis disparu des radars. Alors que les trophées The Best reviennent ce lundi soir (20h15, sur RMC Sport 1), retour sur la saison noire du dernier lauréat.

Smoking noir, nœud de pap, médaille sur la poitrine, et sourire de circonstance. Il y a un an tout juste, il était le héros de la soirée. Au sortir d’une saison 2017-2018 presque parfaite pour lui, conclue par une victoire en Ligue des champions avec le Real Madrid, et une finale de Coupe du monde avec la Croatie, Luka Modric, 33 ans, se voyait élu meilleur joueur Fifa de l’année lors de la cérémonie The Best. Une reconnaissance pour l’introverti milieu de terrain, une consécration, même, validée par un Ballon d’or quelques semaines plus tard.

C’était il y a un an, mais c’était il y a une éternité. Alors que les trophées The Best reviennent ce lundi soir à Milan (20h15, sur RMC Sport 1), le natif de Zadar sait d’ores et déjà qu’il ne réalisera pas le doublé, les trois finalistes pour le titre étant Lionel Messi, Cristiano Ronaldo, et Virgil van Dijk. Au mieux, Modric peut espérer figurer dans le onze type Fifa-FIFPro. Mais au vu de la saison écoulée, même ce lot de consolation serait une surprise.

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Pas décisif dans les chiffres, et pas influent non plus dans le jeu

L’exercice 2018-2019 de Luka Modric est évidemment à mettre en parallèle avec celui très décevant du Real. Mais une question se pose: le Croate a-t-il connu une saison noire parce que la formation espagnole a sombré d’un point de vue collectif, ou le Real a-t-il sombré justement parce que ses cadres, à commencer par le Croate, n’ont pas été à la hauteur? Toujours est-il que pour le début d’une nouvelle ère, une ère sans Cristiano Ronaldo, Modric n’a pas su se démarquer. Statistiquement, le bilan du milieu est extrêmement faible: malgré 46 matches disputés toutes compétitions confondues, et aucune blessure notable, l’ancienne pépite du Dinamo Zagreb n’a mis que quatre buts, et délivré seulement huit passes décisives.

Alors oui, Modric n’a jamais été un joueur de chiffres. Le problème, c’est que ses prestations sur le terrain n’étaient pas plus rassurantes. Lors de la cuisante défaite contre l’Ajax au Bernabeu (4-1), en huitième de finale retour de Ligue des champions, il avait été l’un des symboles du naufrage merengue, incapable de servir correctement un Benzema qu’il aurait, quelques mois auparavant, trouvé les yeux fermés.

A l’époque, le Croate avait évoqué, nostalgique, le vide laissé par CR7. "Le remplacer est quasi impossible, soupirait-il. Bien sûr qu'il nous manque. Quand il est parti, le club a essayé que faire en sorte que les tâches soient partagées mais ce n'est pas facile car Cristiano met 50 buts par saison. Peu en sont capables. Mais il faut aller de l'avant."

Modric, quand tout allait bien
Modric, quand tout allait bien © Icon

Fatigue physique, usure morale et série noire

Lui n’a pas su le faire. Attendu comme le nouveau leader technique des Merengue, Modric n’a jamais pu (ou voulu) endosser ce costume. Il n’a pas non plus su se réinventer. Dans un Real moins dominant, une équipe qui n’avait plus autant la maîtrise du jeu qu’auparavant, ses lacunes sur le plan athlétique sont apparues plus criantes. C’est terrible à dire, mais le milieu a semblé devenir un joueur neutre, presque ignoré des observateurs.

La sélection nationale ne lui a pas non plus permis de se rassurer. Le capitaine des Vatreni, après l'épopée russe, a vu son équipe boire le bouillon en Ligue des nations (dernière de sa poule, derrière l’Angleterre et l'Espagne), pour n’assurer que le strict minimum depuis le début des éliminatoires à l’Euro 2020. Où il ne s’est distingué qu’une fois en cinq matches, avec un but… en Azerbaïdjan.

Comment expliquer cela? La course au Ballon d’or, et le cirque médiatique obligatoire pour quiconque veut décrocher le prix – tel un acteur en quête d’un Oscar – a sûrement pompé de l’énergie, physique et mentale, à l’intéressé. L’enchaînement des compétitions aussi. "Après la Coupe du monde, il est logique de ne pas pouvoir maintenir la même tension, expliquait-il à Marca en novembre dernier, pour justifier son début de saison en demi-teinte. C’est tellement intense, sur une période courte, que vous le payez forcément ensuite. Durant le Mondial tout allait parfaitement, nous étions au top, mais il est difficile de maintenir ce niveau individuel. […] Pour moi l’absence de présaison a été fondamentale. J’ai dû rejouer un mois après la finale de la Coupe du monde, or j’ai besoin d’une présaison."

Resté à Madrid tout l’été 2019 pour se refaire une condition, Modric pouvait donc légitiment espérer retrouver son meilleur niveau cette saison. Mais pour le moment, rien ne semble lui sourire… Expulsé dès la première journée de Liga face au Celta Vigo pour avoir écrasé le tendon d’Achille de Denis Suarez, Modric n’est réapparu que vingt petites minutes lors de la troisième journée contre Villarreal (2-2, une passe décisive pour Bale), avant de partir en sélection... et de se blesser à l’adducteur de la jambe droite. D’où son absence lors des trois derniers matches de la bande de Zidane, et notamment contre le PSG mercredi dernier en Ligue des champions (défaite 3-0).

Une saison de plus au Real, et après ?

S’il se remet rapidement sur pieds, et retrouve du rythme (78 minutes de jeu seulement avec le Real depuis la reprise), Modric voudra probablement montrer ces prochains mois qu’il est encore un joueur de classe, et qu’à 34 ans désormais, il n’est pas encore fini. Mais l’avenir du milieu posera forcément question l’été prochain, voire avant.

Initialement en fin de contrat en juin 2020, l’ancien joueur de Tottenham a bénéficié d’une prolongation automatique d’un an suite à son Ballon d’or. Mais bien qu’il soit lié au Real jusqu’en 2021, son départ a été plus qu’évoqué cet été. Son nom a été annoncé du côté de Paris, l’Inter a manifesté un réel intérêt, et l’AC Milan aussi. Selon la presse espagnole, le Real avait ouvert la porte, et se montrait à l’écoute d’éventuelles offres.

C’est le joueur qui aurait pris la décision de rester. "Luka est un grand joueur, mais il est difficile de l’attirer, a ainsi rapporté Zvonimir Boban, idole du milieu et nouveau directeur du football de l’AC Milan. Il ne voulait pas partir du Real Madrid après une mauvaise saison, et c’est tout à son honneur." Fin août, Modric a d’ailleurs multiplié les messages sur les réseaux sociaux pour célébrer son septième anniversaire chez les Merengue, rappelant au passage tout le chemin parcouru, et tous les titres remportés. Comme un joueur qui ne veut pas être oublié. Ou qui a, encore, quelque chose à prouver.

Clément Chaillou