Anigo : « La limite a été franchie »

EXCLU RMC SPORT. Invité de Luis Attaque, José Anigo a fait part de son exaspération après les tags liés à la mort de son fils sur les murs de la Commanderie. Pour l’entraîneur de l’OM, très touché, c’est allé trop loin.

José Anigo, cette victoire contre Valenciennes mercredi (2-1) doit faire un bien fou au groupe...

On respire. On était sous perfusion, on l’a retirée et on est mieux. Ça faisait quinze jours que l’atmosphère était assez compliquée. Quand on a une équipe composée de jeunes joueurs de talent, il faut comprendre que dans des clubs à pression comme le nôtre, il faut gérer ces situations et ce n’est pas forcément simple pour tout le monde.

Comment faire pour soigner les têtes ?

Ça passe par des résultats. Le premier, on l’a fait ce mercredi. Tout n’est pas parfait, on le sait. On est en train d’avancer, de faire au mieux. Il faudrait faire un bon résultat contre Toulouse et un autre contre Bastia pour pouvoir commencer à envisager le meilleur et voir des rayons de soleil qui percent un peu.

La clé n'est-elle pas le dialogue avec le groupe ?

Avec le groupe, ça se fait de manière naturelle. Individuellement, il faut des échanges permanents pour leur remettre beaucoup de confiance dans la tête. Ça passe par des conversations, des images pour leur montrer ce qu’ils sont capables de faire de bon, ne pas toujours appuyer là où ça fait mal. Il n’y a pas si longtemps que ça, certains étaient des joueurs exceptionnels dans d’autres clubs. Chez nous, ce sont de bons joueurs mais dans un autre contexte, dans un club plus grand et plus fort. Il faut remontrer tout ça. Tout n’est pas simple. Ils savent et ils peuvent.

Depuis votre prise de fonction, André-Pierre Gignac a pris une nouvelle dimension...

Il a pris du volume, beaucoup de confiance, une place forte dans le vestiaire. Il discute, il parle. Il y en a d’autres aussi : Mandanda, Cheyrou… Mais celui qui a explosé ces dernières semaines, c’est « Dédé ». Il partait de loin et là, il met des buts. La confiance s’accumule et tout va pour le mieux.

Peut-il prolonger sans baisser son salaire ?

C’est une question à laquelle je ne peux pas répondre parce que je ne m’occupe pas de l’aspect financier. Ce n’est plus de mon ressort. C’est Vincent (Labrune) qui gère. Dans le foot, il n’y a rien d’impossible. Des joueurs qui étaient au fond du trou, dont Gignac, sont présentés comme les tauliers de l’équipe. Il n’y a pas si longtemps, tout le monde le castagnait. Ça va très, très vite. Est-ce qu’il pourra resigner ? Je n’en sais rien. Peut-être. Ça dépendra de lui, du club et des discussions qu’il va y avoir.

« Il y a des choses dont on ne doit pas parler »

Etes-vous déçu par certains éléments expérimentés de votre effectif ?

Déçu, non. Mais est-ce que j’en attends plus ? Oui. Il y a quatre ou cinq joueurs qui peuvent prétendre au Mondial avec l’équipe de France. Ils doivent rehausser leur niveau, faire plus. Ce qu’ils font ce n’est pas mauvais, mais on en attend beaucoup plus. Je sais que dans les mois qui arrivent je vais les retrouver. La prise de conscience est faite, ça y est.

Certains ne semblent quand même pas concernés par l'avenir de l'OM...

Peut-être que vu de l’extérieur c’est comme ça, mais à court terme, leur objectif est de faire des choses très intéressantes avec leur club, pour que leur bonne image leur permette de prétendre à quelque chose après. Si avec ton club tu n’es pas bon ou moyen, tu ne proposes rien au sélectionneur. Tout passe par le club.

Y a-t-il un problème entre joueurs dans le vestiaire ?

Je vais de suite vous mettre à l’aise, il n’y a pas de problème dans le vestiaire. On peut parler de problème de niveau, de confiance, de ce que vous voulez. Mais de comportement entre les uns et les autres ou de malaise dans un vestiaire, c’est faux. Les joueurs vivent plutôt bien ensemble. Depuis que j’ai pris mes fonctions, je n’ai pas de problème de jeunes ou d’anciens. On peut tout leur reprocher mais ça ce n’est pas vrai. Il y a toujours un conflit de générations. Un mec qui a 30 ans n’a pas les mêmes centres d’intérêt qu’un mec qui en a 20. Mais est-ce qu’ils s’entendent mal ou qu’ils se disputent ? Non.

Les récents évènements extra-sportifs vont ont-ils fait réfléchir à un départ du club ?

Ce qui s’est passé ces derniers temps, notamment ce qui a été écrit l’autre jour (des tags sur un mur longeant le centre Robert-Louis Dreyfus, ndlr), c’est tellement ignoble et lâche que tu peux te poser la question de savoir si ça vaut le coup de continuer, malgré ton investissement, ta passion et ton amour pour le club. Il y a des limites à ne pas franchir. Les gens t’aiment ou ne t’aiment pas, ça fait partie de notre job, on le sait tous. Mais il y a des choses dont on ne doit pas parler et auxquelles il ne faut pas toucher. La limite a été franchie, je trouve ça dégueulasse et ça m’a touché profondément. Ce qui me fait continuer, c’est que des gens autour et à l’intérieur du club valent le coup qu’on continue à bosser. J’ai une mission de quatre mois. Dans quatre mois, on se posera tous la question de savoir s’il faut continuer l’aventure ou pas. Aujourd’hui, je ne peux pas me poser ce genre de questions. Parfois, des gens parlent de toi et tu ne sais même pas qui ils sont. Ils disent des conneries. Mais écrire des saloperies comme ça sur un mur… On a assez souffert chez nous pour qu’on continue à en prendre un peu. Surtout que quand quelqu’un n’est plus de ce monde, tu n’en parles pas.

En cas de défaite contre Valenciennes, auriez-vous pu changer d'avis ?

Non, je ne vais pas lâcher parce que j’ai une mission à remplir. Je vais le faire. Je me suis entouré d’un garçon comme Albert Emon (arrivé en tant qu’adjoint, ndlr) qui a une joie de vivre permanente, qui a une bonne connaissance du foot. C’est un bonheur d’être avec Albert et ça me fait du bien de l’avoir avec moi.

« Le profil d'Aliadière nous intéresse »

Est-ce certain que vous ne serez plus le coach de l'OM la saison prochaine ?

Dans la logique, oui, il y aura un autre entraîneur. Ma mission est d’essayer de gagner le maximum de places, d’accrocher la 3e place. Ce serait un miracle mais on avait onze points de retard (sur Lille, ndlr) il y a un mois et on est revenu à six points, alors qu’on ne s’y attendait vraiment pas. Si on récupère trois points par mois, c’est bien. On a eu un peu de chance, il faudrait continuer à surfer dessus. Si on joue mieux, on devrait y arriver.

Albert Emon peut-il être le futur entraîneur de l'OM ?

Je ne sais pas. Je ne pense pas. Honnêtement, personne n’est dans ce calcul-là, ni Albert, ni moi. Il pourra peut-être travailler avec un autre entraîneur si jamais il le souhaite.

Rod Fanni partira-t-il avant la fin du mercato ?

Non, c’est clair.

Jérémie Aliadière arrivera-t-il à l'OM avant vendredi soir ?

Je ne peux pas vous dire qu’il va arriver. Est-ce que c’est un joueur qui a un profil qui nous intéresse ? Oui, bien sûr. Après, est-ce que ça se fera ou pas ? C’est tellement compliqué de « faire » un joueur. Mais son profil nous intéresse.

Cette arrivée est-elle conditionnée à un départ de Saber Khalifa ?

C’est ce qui devrait se faire si Khalifa part. Mais il y a aussi d’autres joueurs. Rien n’est acté car Saber n’est pas encore parti. On en est encore loin. Tout reste hypothétique. J’aimerais avoir un attaquant de plus. Saber n’a pas formulé l’envie de partir de manière précise, mais parfois il y a des propositions qui sont intéressantes pour le joueur et le club et la question ne se pose plus. Saber ne partira que si on a une solution. S’il souhaite rester à Marseille, il restera. Il est bien accepté dans le groupe, il n’y a aucun problème.

Mamadou Niang peut-il revenir à Marseille ?

Je sais que Mamadou (prêté à Besiktas par le club qatari d’Al-Sadd, ndlr) reviendrais en courant. En plus, je l’adore. On n’a pas développé le dossier car financièrement, il faut trouver des accords et quand les joueurs partent là-bas, on n’est plus dans la même grille de salaires. Ce n’est pas toujours facile de pouvoir récupérer les joueurs. Si les clubs qataris ne prennent pas en charge une partie du salaire, tu ne peux jamais avoir ces joueurs.

Le dossier Kévin Monnet-Paquet est-il chaud ?

Je pense qu’il est beaucoup moins chaud qu’Aliadière.

« Thauvin aura peut-être une bonne surprise »

Etes-vous satisfait de vos jeunes recrues comme Lemina, Imbula ou Mendy ?

On est tous contents d’avoir pris ces joueurs car ils ont de la qualité. Ils arrivent pour certains de Ligue 2, donc il faut les « fabriquer ». On voudrait qu’ils soient au même niveau que des joueurs expérimentés, c’est difficile. Dans le projet mis en place à deux ou trois ans, ce sont peut-être ces joueurs qui nous permettront d’avoir une équipe très compétitive. Le talent, ils l’ont tous.

Imbula est quand même passé de titulaire à remplaçant...

Il est extrêmement talentueux mais il est dans un club avec beaucoup de passion et ce n’est pas facile pour lui de prendre cette pression sur le dos. Il n’est pas logique qu’un garçon de 20 ans prenne cette pression. La pression, elle doit aller sur le dos des tauliers, qui ont l’habitude du club et de l’ambiance qui règne autour.

A-t-il eu des problèmes de comportement ?

Non. Il est impliqué dans le travail. C’est un affectif, un Africain. Il faut tout le temps parler avec lui, d’échanger et tu peux en tirer 100%, voire 150%. Il faut lui parler très souvent.

Florian Thauvin doit-il aller à la Coupe du monde ?

Si je donne mon avis, on va dire que je décide à la place de Deschamps. Mais si on me demande mon avis, je dirais qu’il a tellement de talent et de classe… Je pense qu’il n’a pas encore tout montré. Il est en train d’émerger doucement, il n’a que 20 ans. Il faut le laisser mûrir tranquillement et peut-être qu’il aura une bonne surprise.

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Luis Attaque