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Hourcade : « Eradiquer le hooliganisme ? Impossible »

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S’il juge marginal en France le phénomène hooligan, mis en lumière par une partie des incidents en marge du report d’OM-PSG, le sociologue Nicolas Hourcade le voit mal disparaître.

Nicolas Hourcade, que révèlent les échauffourées de Marseille sur le phénomène hooligan en France ?
Il y a eu deux types d’incidents à Marseille. D’abord ceux provoqués par hooligans, qui se revendiquent en tant que tel et voulaient se rendre de toute façon Marseille, report ou non. Ce sont les incidents qui ont éclaté sur le Vieux-Port. Et il y a eu un deuxième front des violences lié à l’arrivée de supporters de la tribune Auteuil à la gare Saint-Charles. Si le match avait été reporté ou maintenu avant, ceux-là ne se seraient jamais retrouvés là sans escorte. Ce n’était alors plus du hooliganisme mais une émeute en centre-ville, avec des supporters parisiens qui provoquent et des habitants qui réagissent. C’est là que les plus gros incidents ont eu lieu parce qu’ils n’étaient pas du tout anticipés par les forces de l’ordre prévu, qui n’avaient pas prévu de se déployer dans cette partie de la ville.

Quel est l’ampleur de ce phénomène ?
Il faut être rassurant. Globalement, les stades français sont très sûrs. Depuis une quinzaine d’années, il y a une amélioration du dispositif de sécurité, dans et en dehors des stades. Contrairement à ce qui est dit parfois, on peut aller au stade en famille, malgré des matchs plus tendus comme OM-PSG. Mais il ne faut pas passer les incidents sous silence. Le contexte général est bon mais il y a des incidents à appréhender. La situation françaises est simple : il y a des hooligans purs et durs, qui ne sont là que pour se battre autour des matchs et sont très peu nombreux en France, à l’exception du noyau dur parisien. A côté, le phénomène beaucoup plus massif est celui des groupes ultras. Ce sont des grandes associations, très nombreuses et avant tout là pour soutenir leur équipe mais acceptent aussi parfois le recours à la violence. C’est par exemple le cas de Nice, avec une firme ultra très virulente. Cette population ultra est beaucoup plus difficile à canaliser. Cela appelle des réponses différentes.

A-t-on des pistes concrètes pour éradiquer ce phénomène ?
Améliorer la situation, oui, mais éradiquer, bon courage ! Aucun pays n’y est jamais arrivé. C’est absolument impossible parce que la violence a toujours existé autour du football. Aucun pays n’y est arrivé. On peut en revanche la limiter avec des dispositifs de répression adaptés. Actuellement, la répression n’est pas toujours ciblée sur les comportements les plus graves. On prend autant pour un fumigène que des violences avérées. Ce qu’il faut, c’est un dialogue plus important avec les associations de supporters pour désamorcer les incidents et les tensions en amont. Il faut plus de cohérence à ce niveau-là.

Les clubs français, et notamment ceux concernés par ce phénomène, prennent-ils leurs responsabilités ?
On ne peut pas généralisé. Ne serait-ce qu’au PSG, toutes les directions n’ont pas eu les mêmes politiques. Les clubs français naviguent un peu à vue. Certains clubs arrivent à nouer des discussions constructives avec les associations de supporters et ça se passe très bien. Dans d’autres cas, les dirigeants ne savent pas trop comment s’y prendre. C’est la raison pour laquelle, au niveau national, que ce soit le ministère ou Ligue, il faut aider à nouer un certain type dialogue avec les supporters. Il faut un dialogue sain et ne pas discuter pour discuter. Chaque partie doit avoir des droits et des devoirs. Car il y a parfois des accords occultes entre dirigeants et supporters, comme en Italie. Et là, c’est particulièrement malsain. Il faut clarifier la situation pour permettre aux supporters d’avoir une place au sein du club et de s’y exprimer.

Nicolas Hourcade est sociologue à l'Ecole Centrale de Lyon, spécialiste des supporters.

La rédaction