OM: avec Bielsa, 463 jours de passion et d’incompréhension

Marcelo Bielsa - AFP
Les supporters de l’OM étaient pourtant prévenus : la deuxième saison se passe souvent mal avec Marcelo Bielsa. Mais devant le jeu développé et l’aura du personnage, le soutien s’est fait presque inaliénable. Presque. Entre son arrivée de star et son départ en forme de trahison, Bielsa à l’OM, une grande histoire d’amour… et de désamour. Tout a commencé le 2 mai 2014. Tout s’est terminé le 8 août 2015.
Une star à l’OM
Elie Baup limogé en décembre 2013, José Anigo intérimaire. Un zéro pointé en Ligue des champions, une sixième place en championnat, une équipe peu séduisante sur le terrain, des finances sur le déclin… C’est dans ce contexte que débarque Marcelo Bielsa, véritable (et seule) star du mercato marseillais) l’été dernier. D’emblée, le personnage intrigue. Il passera plusieurs semaines à scruter l’effectif, aidé de ses fidèles lieutenants. Début mai, le club intronise le technicien argentin.

Bientôt les pancartes, les cris de fans et les sourires reviennent à la Commanderie, pour l’idole des Newell’s Old Boys, prophète en son pays et gourou de Pep Guardiola. La star, c’est lui, l’homme à la glacière, éternellement en survêtement, qui ne regarde pas les journalistes dans les yeux en conférence de presse, qui n’hésite pas à tacler son président Vincent Labrune dès le début de saison pour un recrutement jugé inadapté. Les supporters olympiens l’idolâtrent. Le début d’une béatification.
Pour l’amour du jeu
Ce que voient les spectateurs sur le terrain ne fait que renforcer leur enthousiasme. Les Marseillais jouent. Ou plutôt rejouent. Pour l’amour du jeu, les joueurs enchaînent les entrainements à rallonge et les séances vidéo ultra-techniques. Tout est exigence avec Bielsa. L’OM ne joue qu’un match par semaine pour cause de non-qualification en coupe d’Europe ? Il doit donc être parfait. Le résultat oui, le contenu surtout. Et les Gignac ou Ayew de retrouver leur vista, les Mendy et Imbula de se transformer. Les supporters en ont pour leur argent et le rendent bien. La « Bielsa mania » est à son paroxysme à la trêve hivernale, avec un titre honorifique de champion d’automne.

Les premiers couacs
En janvier, le vent commence à tourner. Les résultats ne suivent plus, le jeu n’est plus aussi fluide, plus aussi séduisant. Une élimination par Grenoble en Coupe de France, des joueurs épuisés physiquement, une ambiance qui se détériore en interne. Dans une enquête publiée en février, RMC Sport révélait les causes de l’usure mentale qui s’était installée au club. Le champion d’automne perd peu à peu de sa superbe. Mais personne ne lâche Marcelo Bielsa, préservé des critiques.
La Ligue des champions s’envole
Huit maigres victoires durant la deuxième moitié de championnat et c’est une place en Ligue des champions qui s’envole. L’éternel rival parisien, qui ne marche plus dans la même cour, est de nouveau sacré champion de France. L’autre rival, lyonnais, fait un séduisant dauphin plein de fougue et de talent. Monaco réussit un retour en trombe sur le podium… L’OM termine finalement quatrième. C’est certes mieux que l’année précédente. Mais la Ligue Europa n’est pas la C1 et ne renflouera pas les caisses d’un club qui n’est pas au mieux. Les départs s’enchaînent vite. Gignac, Fanni, Morel et Ayew, en fin de contrat, quittent le club gratuitement. Les maîtres à jouer de Bielsa, Imbula et Payet, s’envolent respectivement pour Porto et West Ham, renflouant au passage les caisses. Les doutes s’installent.

Les incertitudes estivales
C’est dans ce climat quelque peu tendu que les supporters attendent le retour de Marcelo Bielsa. On aperçoit l’Argentin en tribune durant la Copa América, bien loin de la Canebière… Un nouveau contrat l’attend pourtant à la Commanderie. Margarita Louis-Dreyfus lui a personnellement demandé de rester, Vincent Labrune veut à tout prix éviter son départ. Ce n’est que le 6 juillet que Bielsa retrouve l’OM, pour le plus grand soulagement des supporters et du staff, alors que l’entraînement a déjà repris depuis plusieurs jours.
L’acte final
Adulé aux Newell’s Old Boys, il quitte le club en 1992 pour le Mexique, avant un retour express et gagnant en Argentin en 1997, avec le Velez Sarsfield. Star annoncée à l’Espanyol de Barcelone, il quitte le club après six matches. Nommé sélectionneur de l’Argentine en 1998, il quitte son poste en 2004 contre toute attente, après une place de finaliste de la Copa América et une médaille d’or olympique. En 2007, il prend la tête de la sélection chilienne… et démissionne en 2011, malgré le soutien populaire. Il mène l’Athletic Bilbao en finale de Ligue Europa l’année de son arrivée, lors de la saison 2011-2012. L’année suivante est moins glorieuse et il choisit de partir. Voilà comment Bielsa a gagné son surnom. « El Loco » ou l’art du contre-pied. Le départ surprise ce jeudi de Jan Van Winckel, son préparateur physique, ne présageait rien de bon. Mais Bielsa a une nouvelle fois pris tout le monde de court, en annonçant sa décision à la fin d’une conférence de presse qui s’était pourtant déroulée comme si de rien n’était, sans même avoir averti ses joueurs. Une dernière valse, le crépuscule d’une idole.