OM, les raisons d’un faux-départ

André-Pierre Gignac et Michy Batshuayi - AFP
Bielsa, une méthode à assimiler
Difficile de comprendre vraiment les intentions du nouveau coach de l’OM. Une défense à trois contre Bastia (3-3), à quatre contre Montpellier (0-2) avec Morel dans l'axe aux côtés de Nkoulou (Bielsa a apprécié ses performances dans l'axe et pourrait le maintenir à ce poste) et Romao au milieu alors que ce dernier avait plutôt séduit en défense lors des matchs amicaux… Difficile d’y voir clair dans les intentions de l’Argentin. « L’adaptation aux nouvelles méthodes et au style de jeu me paraissait acquise, se défend Bielsa. Après deux matches, on a pris un point sur six, du coup les médias expliquent que les joueurs ne se sentent pas à l’aise avec la nouvelle méthode, mais il n’y a aucune nouveauté. Quand il n’y a pas de résultat, on prétend que les joueurs ne sont pas à l’aise avec la méthode. »
Mais ces joueurs, justement, qu’en pensent-ils ? « C’est vrai qu’il y a des petits réglages à peaufiner, admet Dimitri Payet. Mais ça nous avait plutôt bien réussi en matches de préparation, ça veut donc dire qu’on sait le faire. » Benjamin Mendy enchaîne : « On essaye de s’adapter au mieux, mais c’est vrai qu’on est mieux dans le système à trois. On adhère tous au discours du coach, on s’adapte, que ce soit à trois ou à quatre derrière. » Au-delà des incompréhensions tactiques, un autre constat surprend alors que le championnat vient juste de débuter : les Olympiens sont fatigués et finissent les rencontres sur les rotules, comme l'a reconnu Romain Alessandrini dimanche. Certains joueurs, comme Gignac, avaient déjà remonté cette information à leur entraineur avant le déplacement à Bastia. Bielsa ne s'est pas caché sur ce sujet. Vendredi, il a reconnu qu'il en avait sûrement trop demandé à ses joueurs lors de l'avant-saison. Depuis, les séances sont plus légères.
Des recrues qui tardent à arriver en défense
Le gros point noir de l'effectif marseillais. Marcelo Bielsa est en manque de défenseurs centraux, au point de devoir faire du bricolage. Cette pénurie de munitions agace le coach argentin, qui a voulu mettre son président Vincent Labrune devant ses responsabilités vendredi en lui rappelant qu'il avait demandé un effectif quasiment bouclé dès la reprise, mais aussi que les 35M€ promis pour le recrutement (dont 15 provenant des ventes) n'avaient pas encore été dépensés. Selon nos informations, l'équation est beaucoup plus compliquée. Le président olympien est en fait furieux de voir les « lofters » prendre leur temps avant de s'engager avec d'autres clubs. Au sein de la direction, on en vient même à se demander si les Fanni, Amalfitano ou Cheyrou ne repoussent pas volontairement leur transfert à la fin août pour bloquer d'éventuelles arrivées. La vengeance des bannis, en quelque sorte…
Vincent Labrune, qui a également dû faire face à une conjoncture compliquée (la Coupe du monde qui retarde les négociations pour certains départs, la blessure de Mandanda qui avait un bon de sortie, le fair-play financier et la crise qui bloquent le marché des transferts), s'attend donc à une accélération des transferts à la fin du mois. Et il rappellera à son coach, s'il le faut, qu'il a aussi su garder des éléments jugés intransférables tels que Thauvin, Imbula, Mendy, voire Payet, que le président de l'OM aurait aimé céder à Swansea pour 8 M€, mais que l'Argentin a finalement voulu retenir. « Ni Labrune, ni Bielsa ne sont réellement paniqués, promet un dirigeant phocéen. Le calendrier était jugé plutôt abordable sur le mois d'août (Bastia, Montpellier, Guingamp, Nice), et la priorité pour Labrune est de recruter des joueurs de qualité, pas de céder face à l'urgence d'une ou deux mauvaises performances. » Après les échecs sur les dossiers Manquillo et Rekik, Vincent Labrune a d'ailleurs soumis une liste de joueurs à Marcelo Bielsa. Or, il se murmure que l'Argentin est parfois un peu long pour valider les profils et les joueurs qu'il souhaite intégrer à son système de jeu. Un proche du club résume la situation à sa façon : « Trouver des joueurs qui plaisent à Bielsa ? La tâche doit être très compliquée pour Labrune. Car le système de Bielsa, il n'y a que Bielsa qui le comprend. Pas étonnant que le recrutement prenne du temps. »
Le loft, à qui la faute ?
Si Vincent Labrune assume totalement l'instauration d'un loft en promettant, au passage, que tous les joueurs concernés avaient été prévenus dès la fin du championnat qu'ils ne feraient pas partie du projet de Bielsa (Kadir, Sougou, Fanni, Amalfitano et Cheyrou), ce choix d'écarter certains joueurs s'est aussi fait en concertation avec l’Argentin. Selon lui, ses méthodes, qui demandent un engagement total et une adhésion à 100% à son projet, ne peuvent fonctionner qu'avec un effectif (très) réduit. Il avait demandé 22 joueurs à Labrune (pour doubler les postes) et il se dit désormais prêt à se contenter de 20 joueurs, voire 18. Certains, sur lesquels Bielsa ne comptait pas, ont donc été mis en marge du groupe, ce qui a forcément créé quelques tensions dans le vestiaire... et réduit les options du coach argentin.
Si Lucas Mendes a été vendu pour une somme difficilement refusable (5 M€ hors bonus), Rod Fanni aurait pu rendre quelques services – au moins avant son transfert - dans un secteur défensif à la dérive... même si l'ancien Rennais restait sur une saison dernière très compliquée. Certains joueurs regrettent d'ailleurs de ne pas avoir eu l'occasion de prouver leur valeur à l'entraîneur argentin. Dans l'entourage de Foued Kadir, on assure par exemple que le joueur était revenu sur Marseille avec la conviction qu'il allait faire partie du projet Bielsa. Mais il a tout de suite été mis en marge du groupe. Parfois mis de côté par les prédécesseurs de Bielsa (Gerets, Deschamps puis Baup), Benoît Cheyrou avait aussi montré une certaine faculté à se battre pour prouver sa valeur et convaincre ses coaches. Son expérience fait peut-être défaut pour assimiler la révolution que veut instaurer Bielsa.