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Riolo: "La mentalité Ligue 1…"

Analyse du problème majeur de notre football…

Nos confrères et amis de Team Duga ont lancé cette semaine une opération du genre « sauvons le foot français ». On aurait pu appeler ça, selon une bonne vieille formule, « un Grenelle du foot »! Je me demande combien de fois sur notre antenne, on a fait ça! « Beaucoup » semble un chiffre raisonnable. Cette année le piètre spectacle de la L1 pousse à s’interroger à nouveau. 

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La particularité cette fois-ci, c’est que l’insatisfaction vient juste après le titre de champion du monde. Un sélectionneur français et des joueurs français deviennent rois du monde et notre L1 s’écroule? On nous parle d’un immense réservoir de joueurs, le meilleur du monde, mais cette base ne permet pas à nos clubs d’éviter les gifles en Coupe d’Europe, même contre des équipes de petits pays? On profite de la Coupe du Monde pour inventer un slogan « la Ligue des Talents » et on ne voit qu’un triste football? Ça fait beaucoup de paradoxes non?

Le sursaut européen récent (OM, Monaco) avait fait naître une sorte d’espoir de renouveau. Mais ça n’était qu’un soubresaut, une secousse imprévue. La saison dernière après 16 journées, hors PSG, trois équipes comptaient une moyenne de deux points par matches: OL, ASM et OM. Aujourd’hui, Lyon affiche quatre points de moins. Six pour l’OM. Evitons de compter pour Monaco. La régression n’est pas négligeable.

Il y a deux ans. Deux ans, pas 5 ou 10. Le top 5 était composé de Nice, Monaco, PSG, Lyon et Rennes! Quand j’ai regardé ça, je n’en croyais pas mes yeux. On oublie que notre championnat est mouvant, instable. Progression, régression ne veulent pas dire grand-chose.

Un problème de mentalité

Je parlais de paradoxe. Les plus marquants ne sont pas ceux que j’évoquais non sans ironie. Ils sont ailleurs. D’abord et comme d’habitude, on va évacuer les fausses excuses liées à l’oseille qu’on n’aurait pas. Les noms des adversaires rencontrées en Coupe d’Europe, ça doit ouvrir les yeux une bonne fois pour toutes. Ça fait des années que cette excuse est irrecevable.

Alors c’est quoi notre problème? Il faut le chercher et l’analyser dans les attitudes. La mentalité des joueurs mais plus globalement les clubs! Comment on explique les résultats de Lyon ? Bon contre City, bon contre beaucoup d’équipes mais à mi-temps. On entend depuis des semaines les mêmes propos dans la bouche de Genesio ou Aulas.

Comment on explique l’OM? Inexistant en Europa League, là où il avait affiché un visage reluisant la saison dernière. Faible en championnat avec les mêmes joueurs. Prenons le cas de Rennes. Lamouchi s’en va et deux jours après avec Julien Stéphan, Rennes livre un match abouti et gagne à Lyon? Mais par pitié qu’on ne parle pas de la magie ou de la folie du foot, d’un déclic ou de je ne sais quoi. C’est trop court. S’il y a un déclic psychologique, comme à Nantes d’ailleurs, c’est bien la preuve que c’est une affaire de mentalité, d’attitude générale. La plupart de nos clubs sont comme ça. Voyez Saint Etienne. Gasset dit clairement qu’il était déçu par ses joueurs. Après ça? Réaction et victoire. On se bouge le cul en réaction, pas parce que c’est juste le métier, la passion des joueurs!

Les Verts comme d’autres, comme tous. Capable de faire mieux et souvent mal. Il n’y a aucune continuité. C’est comme si à chaque fois, il fallait travailler sur la motivation! J’avais rencontré Henri Stambouli, directeur du centre de formation à Marseille il y a quelques années. Avec lui, ce jour-là se trouvait Georges Prost. Formateur réputé, Prost a travaillé à Lyon et en Angleterre, notamment. Il m’a expliqué que la France était le seul pays où on bossait sur la motivation. C’est comme s’il fallait expliquer que pour jouer au foot, il fallait s’impliquer. J’avais trouvé ça incroyable!

L’exemple rennais

Le problème n’est donc pas principalement la qualité des joueurs ou nos moyens. T’as pas de bons joueurs, bah ok, fais avec ceux qui sont là. T’as pas l’oseille, et bien démerde toi avec ce que tu as. Le vrai problème c’est l’exigence, le travail que chacun doit fournir de façon régulière! Je reviens sur le cas de Rennes. C’est impensable ce qu’ont fait les Rennais à Lyon. D’un coup, on livre un gros match? Et puis quoi le prochain match, on se relâche? Ou alors, on adore Stéphan, on bosse mieux toute la saison et l’année prochaine, on retombe dans le même problème? 

Après avoir dit ça, le moment est venu de ressortir l’argument usé jusqu’à la corde du travail qui est plus important à l’étranger, non? Mais ce n’est même pas un argument dans un débat! Il n’y a pas de débat. C’est une réalité mille fois vérifiée! On les connaît les raisons du problème! 

Je vais même ajouter que la qualité de nos entraîneurs, le jeu, c’est presque secondaire quand les bases ne sont pas respectées.

Sans ça, la qualité de notre formation ne sert à rien. Enfin si, elle sert les clubs étrangers. Ils récupèrent les oranges et en extraient le jus. Nous on reste avec les caisses d’oranges par terre. Le jus est dégusté ailleurs.

Un manque d'exigence

Cette mentalité est tellement ancrée qu’au fond les joueurs en sont parfaitement conscients. Les meilleurs choisissent leurs matches, ceux qui intéresseront les recruteurs. Les autres ne voient aucune raison de se bouger plus que ça. Ils ont un contrat, tout va bien.

En fait, c’est un comme s’il y avait deux foots en France. Le premier est celui de l'équipe de France avec les meilleurs joueurs qui évoluent à l'étranger. Là-bas, ils se transforment. Affrontent la concurrence, acceptent des entraînements plus soutenus. Ils apprennent finalement la compétition de très haut niveau. L’autre foot, c’est le nôtre, celui du quotidien. Celui des paradoxes. Bon un jour, mais pas toujours. Et surtout pas deux fois par semaine. La fatigue, c’est le grand sujet de notre foot.

On peut être fort dans un gros match, motivant, celui avec du monde au stade. Un peu comme Bordeaux. C’est ce foot tout mou, de « feignasses » et de « glandeurs » qui est notre plaie. A Lyon, à Rennes, Marseille, Nantes, Sainté, Bordeaux, quasiment partout, la réflexion est la même. L’exigence, le travail pourraient être largement supérieurs. Qui peut réparer ça? Les dirigeants, les entraîneurs évidemment. Mais c’est en tout cas à ce niveau que réside le souci premier de notre foot…

Daniel Riolo