Arsenal-PSG: comment Mikel Arteta a réussi à faire l'unanimité chez les Gunners

Hornsey Road, à deux heures du coup d'envoi de la rencontre entre Arsenal et Crystal Palace ce mercredi. Au milieu de l'artère principale menant à l'Emirates Stadium, une boutique éphémère d'écharpes, encore trempée du crachin britannique tombé une bonne partie de la journée sur la capitale anglaise, campe sur le trottoir. Une boutique nommée "Match Day" et gardée par une silhouette en carton de Mikel Arteta. "Quelle écharpe il vous faut ?", demande Dan en sortant la tête de ses stocks. "Arsenal original ? Celle du match du soir ? Un joueur ? Arteta ?" L'écharpe à l'effigie du coach fait partie des plus repérables sur l'étalage "C'est celle de Saka qu'on vend le plus car c'est le gamin d'ici, c'est notre star. Mais Arteta tient son rang, c'est le meilleur des coachs."
Un début d'histoire en "slow romance"
Ex-milieu de terrain des Gunners, l'Espagnol n'est pas arrivé sur le banc londonien dans la peau d'un illustre inconnu. En cinq saisons sous le maillot des Canonniers, l'ex numéro 8, capitaine sur ses derniers mois comme joueur, a remporté une coupe d'Angleterre et deux Community Shield avant de prendre sa retraite. Pour autant "le début de l'histoire entre le coach Arteta et les fans est une "slow romance" avance Amy Lawrence, journaliste pour The Athletic. "Il a fallu un petit peu de temps pour que les fans comprennent sa personnalité. Au départ, il s'est montré discret, froid, organisé et déterminé mais n'a pas laissé transparaitre beaucoup d'émotions."
Le poids des responsabilités certainement pour un jeune coach (38 ans) qui se lance pour la première fois dans un rôle de numéro un, un destin que ne lui prédisait pas forcément Luis Fernandez alors entraineur du PSG qui le repère à Bilbao avant de le ramener à Paris pour un an et demi, prêté par le FC Barcelone. "C'est vrai que c'était le genre de joueur qui arrivait tôt à l'entrainement et repartait après les autres. Il était à l'écoute, faisait ce qu'on lui demandait de faire sur le terrain et de manière remarquable", reconnait-il dans l'After Foot mercredi soir "mais je ne pensais pas du tout qu'il allait devenir entraineur."
Mais auprès de Pep Guardiola dont il devient l'adjoint à Manchester City quelques semaines seulement après sa retraite de footballeur, Arteta observe, apprend et prend de plus en plus de responsabilités. "J'avais été invité à venir voir un match de City", se souvient Fernandez "et le lendemain, pour l'entrainement, c'était Mikel qui gérait la séance. J'y ai assisté et je me suis dit 'Ah oui, il y a du changement du côté d'Arteta'."
Réunir des supporters jusqu'alors divisés
Alors à peine son nouveau costume de manager enfilé, Arteta s'impose rapidement comme un leader dans son ex-club. "Il a franchi la porte et a dit 'Ok, voici mes non-négociables, les choses que je ne tolérerai pas. Et voici les choses dont j'ai besoin. Vous devez choisir de quel côté de la ligne vous voulez être', explique Amy Lawrence "Il a laissé les joueurs choisir eux-même où ils voulaient aller. Depuis ce jour, il fait preuve d'une détermination à toute épreuve. Je pense que ses joueurs l'aiment pour cela, ils donnent tout pour lui."
Mais après avoir mis les joueurs derrière lui, Arteta a dû convaincre des supporters divisés, entre ceux qui adhèraient au football proposé par Unai Emery, d'autres beaucoup moins, nostalgiques des belles années sous Arsène Wenger. L'Emirates Stadium peinait à faire le plein. "Deux semaines avant son arrivée sur le banc, on pouvait avoir des affiches avec 30.000 ou 40.000 personnes dans le stade", observe Amy Lawrence. "L'apathie était omniprésente. Les gens avaient perdu espoir".
Journaliste pour le quotidien London Evening Standard, Simon Collings abonde dans ce sens: "A la fin de Wenger, aussi grand qu'il ait été, le public était divisé. Beaucoup de supporters étaient mécontents, désunis. Il a réussi deux choses: sur le terrain d'abord, de pouvoir mener Arsenal où il est cette saison avec autant de joueurs blessés et suspendus. Dans les tribunes ensuite, en unissant les supporters." Sur le parvis de l'Emirates Stadium, Curk, veste des Gunners sur le dos, affiche un large sourire à l'idée de parler de son entraineur. "Grâce à lui, on est de retour ensemble, comme lorsqu'on était au premier plan avec Wenger. Un club dans son entiereté, pas seulement les joueurs sur le terrain et les supporters dans les tribunes. Tout le monde est connecté."
Son management enthousiame également les fans. "Il excelle dans son engagement auprès des supporters et de par la façon dont il encadre les joueurs", souligne Arjun "Regardez quand il a voulu prêter Saliba, beaucoup de clubs voulaient nous le prendre. Il avait 18 ans, venait de France et Mikel Arteta avait un plan bien établi: l'envoyer en prêt pour pouvoir le récupérer plus aguerri. Regardez-le maintenant, c'est le meilleur défenseur du monde !"
"S'il y a bien un coach pour nous faire atteindre la finale de Ligue des Champions, c'est lui !"
Supporter des Gunners depuis toujours, il n'a aucun doute : "il faut faire confiance au coach ! Si quelqu'un peut nous aider à atteindre la finale et à remporter la Ligue des champions, c'est bien Mikel Arteta." Créateur de la chaîne Youtube "True Gooner", Josh est lui plus prudent. "Regardez les entraineurs qu'il reste dans ce dernier carré de Ligue des Champions: Paris a Luis Enrique, vainqueur de la compétition avec Barcelone, au Barça c'est Hansi Flick, il l'a gagnée avec le Bayern et l'Inter a Simone Inzaghi qui leur a déjà permis d'atteindre la finale. Arteta n'a toujours pas cette expérience. C'est un bon manager, avec de très bonnes idées mais il est là depuis cinq ans et il est temps pour lui de commencer à gagner des trophées (il a remporté la Coupe d'Angleterre en 2020). Nous sommes Arsenal, nous venons au stade pour rivaliser avec l'élite européenne". Avant de relativiser : "Même le légendaire Arsène Wenger, que vous connaissez bien en France n'a pas réussi à remporter la Champions alors si Mikel Arteta y arrive ce serait vraiment incroyable, un exploit pour le club".
Pour celà il faudra d'abord éliminer Paris, son ancien club, à l'issue d'une demi-finale qui était déjà l'objet de quelques questions en conférence de presse après le match nul face à Crystal Palace, lundi soir. Sans se cacher, le coach d'Arsenal s'est une nouvelle fois montré rassembleur. "Mardi, les fans devront jouer tous les ballons avec nous. Je leur demande donc d'apporter leur crampons, protège-tibias, leur short et leur maillot. Jouons tous ensemble mardi soir pour vivre l'une des plus belles soirées de l'Emirates." Il paraitrait que l'union fait la force.