"Il sort de nulle part, mais il est au-dessus du lot": sur les traces de Naby Keita à Istres

Naby Keita - FC Istres
Des tribunes aux trois quarts vides, le mistral qui balaye le stade Parsemain et des visages hagards. Le 9 mai 2014, après une défaite à domicile face à Dijon (4-2), Istres commence sa descente aux enfers avec une relégation en National. Sur le terrain, les tempes grisonnantes de Jérôme Leroy et Cyril Jeunechamp. Mais aussi un quasi inconnu du grand public, Naby Keita. Auteur de deux passes décisives en cette triste soirée, le milieu alors âgé de 19 ans ne se doute pas à ce moment-là qu'il deviendra un jour le joueur africain le plus cher de l'histoire.
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Des problèmes de papiers rapidement réglés
Après un essai non-concluant au Mans, le Guinéen arrive à Istres alors que la saison a déjà commencé. José Pasqualetti, l'entraîneur du club provençal, est rapidement sous le charme. "Frédéric Arpinon (le directeur sportif, ndlr) m'en avait parlé, se souvient le coach de l'époque. Le problème était que Naby n'avait pas régularisé sa situation au niveau de ses papiers. Au bout de deux jours d'entraînement, j'ai vite senti que le potentiel était très intéressant. J'ai donc demandé à mes dirigeants d'accélérer les démarches administratives."
"Après son premier match, il n'a plus jamais quitté l'équipe"
Dans une équipe en difficulté et malgré son inexpérience du football européen, Keita se fait vite une place dans le onze de départ. "Il n'y avait pas de discussions à avoir parce que ses partenaires se rendaient compte de ses qualités, explique Pasqualetti. C'est quelqu'un d'adorable, affable. Il est rentré dans l'équipe et c'est comme s'il était là depuis longtemps. Après son premier match, il n'a plus jamais quitté l'équipe." Il faut dire que pour ses débuts avec le maillot violet, le 22 novembre face à Nîmes (4-2), celui qui porte le numéro 34 marque et donne une passe décisive.
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Arrivé lors du mercato hivernal, Damien Perrinelle ne met pas longtemps non plus à se faire une idée sur son nouveau coéquipier. "J'arrive, je connais juste quelques joueurs. Lui je ne le connaissais pas, se souvient le défenseur aujourd'hui aux New York Red Bulls. Je parle à Cyril Jeunechamp et lui demande: "C'est qui lui?". Il me répond: "Il sort de nulle part, mais tu verras il est au-dessus du lot"." Une remarque qui se vérifiera, puisque Keita terminera la saison avec quatre buts en neuf passes décisives en 23 matchs.
Un "pitbull" entre Kanté et Verratti
"A cette époque, il y avait beaucoup de comparaisons avec N'Golo Kanté, qui explosait à Caen, poursuit Perrinelle. Naby a quand même un profil différent, plus technique, qui n'hésitait pas à dribbler pour casser les lignes. C'était une valeur sûre, il était super agressif au milieu. Quand je vois aujourd'hui les cartons qu'il prend, c'était déjà la même chose. Il débarquait de Guinée, l'intendant l'avait pris sous son aile. Il était toujours simple, discret. Mais il avait son caractère, il ne se laissait pas faire. Pour réussir, il le faut. C'était un gars hyper timide, qui ne parlait pas beaucoup, mais il laissait son côté timide de côté quand il était sur le terrain."
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"Il était très agressif, dans le bon sens du terme, confirme son ancien coach. Toutes proportions gardées, je le compare un peu à Marco Verratti. C'est un pitbull capable de piquer le ballon dans les pieds de ses adversaires. C'est un garçon intéressant aussi dans ses déplacements et techniquement au-dessus de la moyenne. Ça conforte le fait qu'il n'y a pas besoin d'être grand pour jouer à ce poste. Il était capable d'être le premier relais quand on avait le ballon."
Acheté 1,5 million par Salzbourg
Des qualités qui lui valent d'être transféré en 2014 au Red Bull Salzbourg, qui grille la politesse aux clubs français avec un chèque d'1,5 million d'euros. Deux saisons pleines plus tard, il file à Leipzig, autre club dans le giron de la boisson "qui donne des ailes". Avec le promu allemand, il s'impose comme l'un des meilleurs joueurs de Bundesliga et inscrit huit buts.
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Sous le charme, Jürgen Klopp le fait signer à Liverpool, mais accepte de ne le récupérer qu'en 2018-2019, histoire de ne pas se le faire souffler entre-temps Un transfert qui aurait coûté 52 millions aux Reds, voire 70 en comptant les bonus selon les médias allemands. Cela fait de Keita le joueur africain le plus cher de l'histoire, seulement trois ans après son départ d'Istres.
"Quand les boss viennent à New York, on me parle souvent de lui"
"Je suis surpris, forcément, admet Perrinelle. Il fallait avoir une boule de cristal pour le deviner. Mais son avenir était au haut niveau, c'est certain. C'est marrant parce que je suis aux New York Red Bulls, on a les mêmes dirigeants que Salzbourg et Leipzig, et quand les boss viennent, on me parle souvent de lui. C'est normal."
"Je ne suis pas inquiet pour lui, enchaîne Pasqualetti. Il faut qu'il tempère son agressivité. Mais s'il ne se laisse pas pourrir pas l'argent, s'il est bien entouré et s'il reste lucide dans sa tête, je pense qu'il peut aller loin." L'ascension du petit "qui arrive de nulle part" est peut-être loin d'être terminée.
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